SIX - PROLOGUE D'AMITIÉ

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Mes pieds foulaient l'allée de graviers au pas de course. Le vent frais et humide de l'aube me caressait délicieusement le visage. Je m'arrêtais près d'un banc pour respirer. J'étais à bout de souffle et l'air glacial me brûlait la gorge. Mes joues étaient rougies à la fois par le froid et l'important effort physique que je venais de fournir. La totalité de mes muscles me criait de m'arrêter, de les laisser se reposer. Je buvais une grande gorgée d'eau et prenais le temps de m'étirer en profitant du lever de soleil qui se profilait devant moi. Entre les buildings, je pouvais voir l'immense boule de feu s'élever dans le ciel, un peu plus chaque seconde. C'était magnifique. D'une main raidie par le froid, je dégainais mon portable et capturais ce moment pour l'envoyer à Jarred. En pensant à lui, mon cœur se serrait.  Je refaisais le lacet de ma basket et m'élançais de nouveau dans une course effrénée.

Une semaine. Sept jours. Cela faisait maintenant sept jours que j'étais ici, à New-York. Je n'arrivais pas à m'y faire. Chaque jour loin de Jarred, Nelson et Julia me semblait être un peu plus difficile que le précédent à surmonter. Cette drôle d'impression me traversait, selon laquelle le temps s'écoulait d'une lenteur atroce. Plus ma vie ici se construisait, prenait forme, plus il paraissait ralentir. C'était insoutenable. Je faisais tout ce qui était en mon pouvoir pour le faire accélérer mais cela semblait échouer lamentablement à chaque fois. 

Avec Nelson, Julia et Jarred, nous nous appelions tous les jours. Sans exception. Nous pouvions passer vingt minutes comme des heures entières à nous parler au travers des petits écrans de nos portables. Ce n'était pas ce qu'il y avait de mieux en terme de communication. J'aurais tant préféré les avoir auprès de moi, mais rien que le fait de les voir me donnait chaque fois le sourire. 

Ils me manquaient terriblement. Je n'arrêtais jamais de penser à eux et à la distance qui nous séparait. Mon cerveau me forçait à garder cette pensée dans un coin de mon esprit. J'avais beau l'occuper, aller courir, découvrir un peu plus le quartier de Manhattan ou même plus simplement, passer la majeure partie de mon temps dans le café/bibliothèque du bas de la rue, rien n'y faisait. Ils ne sortaient jamais de ma tête. Tout comme maman... Et cela rendait la chose encore plus douloureuse et difficile qu'elle ne l'était déjà.

Quant à Jacob, il était reparti pour l'Argentine deux jours auparavant. Il me manquait lui aussi. Mais j'étais déjà faite à ce manque. Depuis son départ pour son pays d'origine, j'étais rodée. Il était toujours présent, ce manque mais était devenu un manque presque normal et habituel. Il faisait partie de moi.

...

J'entrais dans l'appartement, transpirante et me rendais immédiatement à la cuisine. Je mourrais de faim. En entrant, une délicieuse odeur de pâtisserie vint me titiller les narines. Becca se tenait comme à son habitude derrière l'îlot central et préparait je ne savais quoi à manger. Je m'affalais, me laissant tomber de tout mon poids sur l'une des chaises et attrapais un kiwi ainsi qu'un croissant encore chaud.

— Ils sortent tout juste du four, je viens d'aller les chercher à la boulangerie.

Je croquais dedans.

— Hmmmmm. Ch'est vraiment echéllent, fis-je, la bouche pleine.

Un petit rire s'échappa d'entre les fines lèvres de Becca.

— Bon prête pour cette première journée de cours ?

A l'entente de cette simple question, mes yeux se levaient au ciel de façon automatique.

— Tellement pas...autant j'aime pas être ici, autant le lycée est le deuxième endroit que je déteste le plus sur Terre.

Becca levait les sourcils, visiblement étonnée de ma réponse.

Pluie de Crystal | #wattys2019Où les histoires vivent. Découvrez maintenant