Assassinat d'un Fantôme

Chapitre 4 : Jack O'Lantern, mon ami

J'émergeai, complètement dans le pâté. Mon réveil, lui, finit sa course sur le mur d'en face. Méthode ancestrale.

Roulant sur le côté, j'attrapai le saphir noir sur ma table de nuit. Réflexe numéro un : toujours se protéger des manifestations paranormales. J'enfilai donc mon collier à tâtons, tout en bâillant à m'en décrocher la mâchoire.

Dix-neuf heures trente.

Pfff... Heureusement qu'on m'avait donné deux heures de repos supplémentaires, vis-à-vis de l'usage de l'œil-de-tigre, la veille. Malheureusement, il faisait déjà nuit. Une fois dans ma cuisine, ma tasse de thé vert à la main, je me permis de sourire.

Rien de tel qu'une tartine, du thé et le calme d'un début de nuit pour bien démarrer...

— Salut, poulette.

Mon cri strident fut suivi de l'explosion de ma tasse sur le sol, lâchée sous le coup de la surprise.

— Bordel, Klaus ! m'exclamai-je en fusillant le fantôme du regard. Je viens à peine de me réveiller !

— D'où les marques de draps sur tes joues, railla-t-il. Et la nuisette. Jolie.

Il posa une fesse sur ma table, son grand sourire me faisant grogner de désapprobation.

— Pourquoi tu es autant en forme, crétin ?

— Je ne sais pas... Peut-être parce que je suis déjà mort ?

Je haussai les épaules. Il me fallait chercher une pelle et une balayette, pour nettoyer les dégâts.

— Prépare-moi un autre thé, au lieu de glander ! criai-je, de l'autre bout de mon appartement.

— Je ne glande pas ! répondit-il. Je viens te dire qu'après ta défection d'hier soir...

— Je ne tenais plus debout !

— ... nous avons trouvé le nom de notre morte.

De retour dans la cuisine, je me mis à genoux sur le sol pour ramasser les morceaux multicolores de ma défunte tasse. Au moins, je ne verrai pas son fantôme, à elle.

— Hé, je reste un homme, Anastasie. Évite de te mettre à quatre pattes en minijupe, s'il te plaît.

— Klaus ! m'exclamai-je en m'asseyant brusquement. Parle-moi de l'enquête, plutôt !

À cause de l'excès d'adrénaline de la veille, je n'avais pas été capable d'assurer la fin de mon service. J'étais donc rentrée chez moi vers les quatre heures du matin, pour m'endormir à six. Dans ce laps de temps, tout avait pu arriver.

— Oh, nous savons juste que la victime, Clarissa Relang était une jeune fille sans histoire de Tarascon. Chômeuse tranquille, célibataire, dont l'âme se prélasse tranquillement dans l'au-delà. Elle ne se souvient de rien, et personne n'aurait pu vouloir sa mort.

Je vidai ma pelle dans la poubelle, pour ensuite me tourner vers mon Daugr de meilleur ami, dont le demi-sourire m'en arracha un.

— Pour une fois que nous avons l'identité de nos énigmatiques cadavres, nous devrions pouvoir réussir à pister ses derniers faits et gestes. Nos indics de Tarascon n'ont toujours pas atteint la paix intérieure ?

— Non, chef. Toujours bloqués sur Terre.

— Dans ce cas, en route, Mister Ego. Nous avons peut-être une chance de trouver notre tueur en série.

*

En arrivant sur la place de la Collégiale, bâtiment où nous avions retrouvés le corps de notre morte, je ne pus m'empêcher d'admirer la silhouette du château de Tarascon. Dans la nuit, il dominait tous les alentours, sa majesté n'ayant aucune rivale.