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Le soleil se lève. J'ai marché tout le reste de la nuit en direction de la station de capsule la plus proche. Bien sûr, ce n'est que le dernier point de mon plan. Je dois d'abord trouver de quoi payer pour le passeur clandestin qui m'aidera à accéder au Jardin.

   Je déambule dans les rues sales et sans dessus-dessous de ce qui devait être Rennes. Les vitrines des magasins sont brisées, un coup d'oeil suffit pour savoir que des pillages ont déjà eu lieu. Certaines voitures sont sur leurs toits, d'autres sont sur le côté. Une odeur de pourriture, d'égoût et de mort flotte dans l'air. Des nuages cachent le soleil qui a du mal à montrer le bout de son nez. Je branche mon walkman que j'ai trouvé dans le placard de mes parents.Mon iPhone ne fonctionne plus et je déteste entendre mes pas qui font un beaucoup de bruit sur le béton dans la ville fantôme donc le walkman était ma seul option.

   Je croise quelques animaux errants à la recherche de nourriture. Je passe à côté d'eux, la main sur mon couteau caché dans mon jean dans mon dos.J'écoute Zombie de The Cramberries, un groupe du 20ème siècle. Si ça ne tenait qu'à moi, je chanterais jusqu'à me briser les cordes vocales pour que toute la Terre et même le Jardin m'entende.M'entendre dire que je suis toujours vivante, prête à en découdre. M'entendre dire que les humains sont des vrais égoïste sans aucune entraide.

   Pendant que le refrain battait son plein dans mon oreille, je perçois un mouvement derrière un mur à moitié effondré. Je défais mon casque, jure dans ma barbe et dégaine mon arme. J'essaye de me remémorer mes cours de baby-karaté mais j'en viens vite à la conclusion que ça ne me servira à rien  même face à une mouche. J'avance à pas de loup et tombe nez à nez avec une fille qui doit avoir environ mon âge,blême et en sang. Je remarque que sa blessure se trouve au niveau de son ventre, une profonde coupûre qui a cependant arrêté de saigner. Je pourrais l'abandonner là, agonisant lentement. Après tout, on ferait pareil si c'était moi. Mais je refuse de devenir un monstre au yeux de mon peuple si il m'en reste un. Je n'aurais pas la mort de cette fille sur la conscience. Je regarde autour de moi pour trouver un abri et repère un immeuble en meilleur état que les autres. A l'annonce de la fin du monde, la population est descendue dans la rue, brûlant les immeubles, brisant les vitrines, dégradant le mobilier urbain, criant scandale au gouvernement. La police anti-émeute était complètement dépassé par l'ampleur que prenait la situation. C'était pas vraiment le jour pour aller manger une glace en ville !

   Je passe le bras de la fille sur mon épaule et la soulève comme je peux pour l'amener à l'abri. Elle entrouvre les yeux mais ne dit rien pour autant. Elle doit croire que je suis une hallucination. Si seulement...

   Je soulève son tee-shirt pour inspecter sa blessure qui n'a pas l'air infectée. J'arrache le bas de mon  sweat pour faire une compression et fabriquer un pansement qui devrait la garder en vie. La fille ne dit rien, je crois qu'elle a perdu beaucoup de sang quand même.

   Je m'assois sur une grosse pierre trouvé et commence à ouvrir une boîte de conserve de cassoulet. « Courage Harley, plus que 1 semaine à tenir et tu pourras aller manger un bon McDo au Paradis ». J'observe cette fille que je viens de sauver car je me rend compte que je ne l'ai pas vraiment regardé. Elle est de taille moyenne, des cheveux mi-long couleur caramel et une peau hâlée. Elle a un petit nez retroussé et de long sourcils fins. Elle devait être ce genre de fille populaire, habitant dans le Sud de la France, fille unique avec des parents riches et aimants. Le genre de fille que tout le monde adorait. Bonne note, sportif, artiste, un max d'amies, bref pas vraiment le genre de personnes à pouvoir survivre seule. Je me souviens que je détestais ce type de fille. J'étais celle toujours assise au fond, solitaire et j'avais loin d'avoir la langue dans ma poche ce qui m'a valu quelques ennuis. Mais après tout, qui suis-je pour juger cette fille juste à son physique ? Peu importe, il n'y pas de place pour les sentiments ici. Demain, elle partira. Degré ou de force. Je ne veux avoir personne à mes côtés. Je veux avoir toutes mes chances avec les passeurs. Ou mourir en paix.

   Je soupire, rechignant à dormir à même le sol froid et dur. La nuit est tombé depuis plusieurs heures je pense. La fille blessée émet de petits ronflements ce qui doit être bon signe quand même. Je réfléchit au lendemain. La route est encore longue et je n'ai pas avancé beaucoup aujourd'hui à cause d'elle. Il me reste que très peu de temps et il faut encore que je trouve de quoi payer. Braquer une banque ? Pas mon style et je ne sais pas forcer un coffre fort.Fabriquer de la fausse monnaie ? Oui pourquoi pas ça pourrait être une idée. Peut-être qu'avec un peu de chance cette fille n'est pas complètement  inutile après tout. Je remet en marche mon walkman écoutant Between The Bars de Elliott Smith. Je tourne la tête vers la grande fenêtre qui devait être un jour magnifique.J'observe chaque petit point lumineux, m'imaginant que c'est le Jardin. Ressemble t-il à la Terre ? Ou peut être à une de ces planètes dans Star Wars ? Je m'endors bercée par la musique et les petits ronflements mignon de cette fille à côté de moi.

3 semaines pour survivre { TERMINÉ }Où les histoires vivent. Découvrez maintenant