Chapitre 14

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Natalya rase les murs, sa main droite serrant la crosse de son pistolet, l'autre prêt à saisir des couteaux accrochés à la cuisse. Elle ne sait rien de cet endroit et avance à l'aveuglette, essayant de se repérer à travers les couloirs sombres. Les ennemis ne sont pas loin, elle le sent au plus profond de ses fibres, cette atmosphère oppressante imprègne son être tout entier. Mais pour ressentir la densité des ténèbres qui entourent la présence du mal, il faut avoir franchi le pas, il faut avoir enlevé la vie à quelqu'un. Et Natalya l'a déjà fait tant de fois... Elle sait reconnaître l'odeur du sang et de la peur. Elle est guidée par cette effluve, qui trace un chemin à suivre, un fil invisible qui l'entraîne dans le dédale interminable des couloirs brumeux. C'est étrange : l'espace semble être élastique ici. Dès qu'elle pense avancer, elle revient à son point de départ. Ses jambes ne lui appartiennent plus et la jeune mafieuse continue, comme si son corps sait mieux ce qu'elle doit faire.

Cette senteur âpre qui l'accompagne en ce territoire inconnu lui donne l'impression d'être un animal qui suit l'odeur de sa proie. Mais Natalya ne sait même pas ce qu'elle cherche. Elle ne sait pas ce qu'elle fait là. Elle ne sait pas qui elle est. La seule chose qui fait à peu près sens dans son esprit, c'est cette envie irrépressible de trouver sa victime. 

Car seule une proie peut dégager une odeur si attirante, un parfum exquis de panique, de sueur, de fébrilité, le désespoir de la victime avertie par son instinct primitif du danger imminent. La jeune mafieuse se sent grisée et change tout-à-coup d'endroit, sans transition. Mais son esprit n'en tient pas compte, focalisé sur son objectif. Telle une panthère, elle sort ses griffes et regarde autour d'elle d'un œil aiguisé. Elle se trouve dans un pièce suffisemment éclairée, un véritable puits de lumière à côté des couloirs sombres. Marchant souplement, elle regarde tout autour d'elle, analysant chaque détail. Les zones d'ombre, le sol fait d'une matière étrange qui étouffe le bruit de ses pas. Et soudain, un bruissement, derrière elle. Une respiration. Une déglutition.  Il n'en faut pas plus à l'Assassin pour se retourner. Son cerveau n'a pas fini de retranscrire l'information que lui envoient ses yeux que les muscles de son bras droit se sont déjà mis en action et elle lève le pistolet devant elle, son index posé sur la gâchette. En une fraction de seconde, elle voit le visage de l'homme, qu'elle grave dans sa mémoire. Puis, l'arme pointée sur elle. Et Natalya tire. La balle va se loger entre les deux yeux de son agresseur, qui s'effondre au sol. Elle l'enjambe nonchalamment, bascule à nouveau dans un autre décor.

Il fait froid. Elle n'entend rien. Ne voit rien. Ses sens semblent anihilés par cet endroit lugubre. La jeune mafieuse n'a pour seul repère que la sensation de ses pieds touchant le sol, à intervalles réguliers. Graduellement, elle perçoit des murmures, qui effleurent ses oreilles. Les sons se font plus distincts. Et soudain, le temps d'une seconde, dans un flash lumineux, l'image du corps de l'homme qu'elle vient de tuer apparaît devant elle. Puis, c'est de nouveau le noir total. Un peu tendue, presque effrayée, la jeune mafieuse fait un pas en arrière, se sentant prise dans un étau. Elle ne s'appartient plus. Ses yeux cherchent une sortie. Une limite. Mais elle ne perçoit rien. Pourtant, toutes les fibres de son corps sentent l'approche du danger. Elle se tourne dans tous les sens, prête à réagir. Et soudain, une personne surgit derrière elle, lui place une lame sur le cou, sans que Natalya ne puisse se défendre. En une fraction de seconde, il la bloque contre lui, l'empêchant de se soustraire. Et il tranche. « meurtrière »

***

Natalya se réveilla en sursaut, saisissant le couteau caché sous son oreiller dans un réflexe défensif, le cœur battant à tout rompre. Constatant qu'il n'y avait aucun danger et qu'elle se trouvait dans son lit, la jeune mafieuse laissa l'adrénaline de son rêve se dissiper et sa main retomba contre son corps. Encore troublée, elle secoua la tête et alluma son téléphone : il était sept heures et quart. Natalya s'extrait des draps avec difficulté, relevant en un chignon bâclé ses cheveux humides de sueur. « Bordel, j'ai vraiment fait un mauvais rêve » songea-t-elle avec une certaine incrédulité. D'ordinaire, elle ne rêvait que rarement et ne s'en souvenait pas. Mais cette fois, elle avait rêvé de sa propre mort ! Il y avait de quoi se réveiller en panique. L'adolescente prit le temps de petit-déjeuner correctement et but beaucoup d'eau afin d'hydrater sa gorge sèche. Puis, elle se doucha, s'habilla, prépara ses affaires de cours et s'apprêta à partir. Elle avait définitivement besoins de prendre un peu l'air.

Identity [en cours]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant