Chapitre 9

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Quatre jours. Cela faisait maintenant quatre jours entiers que Natalya se faisait un sang d'encre. La nuit, elle était réveillée par la moindre sirène de police retentissant au loin et s'asseyait par-dessus les couvertures, le cœur battant la chamade, la respiration haletante, les pupilles dilatées et les muscles crispés. Puis, constatant que rien ne se passait, elle retombait lourdement dans les draps, prise de sueurs froides et incapable de se rendormir. Alors, elle se levait et allait se remplir un verre d'eau, puis, deux afin d'hydrater sa gorge desséchée.

L'adolescente ne se reconnaissait plus. Elle avait l'impression d'être une petite chose vulnérable prise dans les engrenages d'une machine infernale qui pouvait la broyer à tout moment. Elle s'était crue forte, mais semblait avoir oublié que seules les personnes conscientes de leurs faiblesses étaient puissantes. Soudainement, Natalya se reprit et aurait presque eu envie de se gifler : elle avait toujours été prise dans cet engrenage infernal , et c'était uniquement par sa faute que le processus s'était accéléré.

« Quand on met les pieds dans la Mafia, on est toujours confronté à la brutalité, à la mort, au mensonge, à la trahison. Tout ça, c'est pas fait pour les faibles. Ça commence dans la violence et ça se termine souvent de la même manière. Rares sont ceux qui meurent de vieillesse, tranquillement dans leur sommeil » lui avait dit un jour Dmitri. Et il avait eu raison.

Secouant la tête, Natalya recouvrit son sang-froid et réfléchit. Elle se trouvait à New York et avait commis un crime dans un bar qui possédait sûrement une vidéosurveillance. Malgré tout, cinq jours s'étaient écoulés  elle n'était toujours pas derrière les barreaux. Il y avait de quoi se poser des questions : soit elle avait beaucoup de chance, soit Lev ou quelqu'un qu'elle connaissait était au courant de ses agissements. Mais aucune des deux possibilités ne lui plaisait beaucoup.

En attendant, la jeune mafieuse s'isolait. Elle en parlait plus ni à Ashley ni aux autres filles, se murant dans le silence et collectionnant les remarques désobligeantes de ses professeurs. En soupirant, Natalya se dit que cette journée ne ferait pas exception à la règle. Elle ne le faisait vraiment pas exprès, pourtant, enfin pas trop. Mais il y avait toujours un professeur qui trouvait une remarque à lui faire. « Je vous jure, à la fin de mon séjour ici, j'aurai une vraie collection » songea-t-elle avec un léger rictus aux lèvres.

Elle enfila machinalement sa veste sombre, assortie d'ailleurs avec le reste de son style vestimentaire : Natalya n'aimait pas les couleurs vives. Le rose, le rouge, le bleu, le vert ou encore le jaune lui donnaient l'impression de n'être qu'un grotesque oiseau multicolore exposé à la vue de tous, paradant avec ses couleurs mises en valeur, une cible, en somme. Et il était impensable que Natalya s'expose volontairement comme un cible. Déjà qu'elle se trouvait dans une situation fâcheuse, elle n'allait pas en plus en rajouter. La jeune mafieuse préférait de loin être le chasseur, la panthère noire dissimulée par l'épaisseur des feuillages, bondissant au bon moment pour neutraliser puis tuer sa proie, plutôt que d'incarner le volatile qu'on mettrait en cage.

Alors que l'adolescente se rendait au lycée à pied, les semelles de ses chaussures se posant souplement contre le goudron des rues, son téléphone vibra au fond de sa poche. Par réflexe, elle le sortit et jeta un rapide coup d'œil à l'écran. Mais elle savait par avance de qui il s'agissait et c'est pour cette raison précise qu'elle le laissa sonner, sans décrocher. Elle ne pouvait tout simplement pas répondre : que dirait-elle? Lev n'acceptait pas les excuses. Il voulait de l'ordre et de l'efficacité, et à la rigueur, des solutions. Pour le moment, Natalya n'en avait aucune. Rapidement, un message concis s'afficha :

Identity [en cours]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant