Jour 62

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Le 24 décembre, en fin de matinée, j'ai reçu un simple SMS d'Irénée : « Tu veux passer ? ». Avec plaisir ! J'ai presque couru jusqu'à son appartement. Nous avons encore échangé des baisers. En toute simplicité, mais cela fait toujours un bien fou.

— Je ne vais pas pouvoir rester longtemps. Ce soir, nous avons un repas de famille, je dois me préparer. Toi aussi tu as sans doute à faire.

— Euh non, pas vraiment.

J'ai senti de la tristesse dans sa voix. Qu'est-ce que ça fait mal de sentir que celui qu'on aime est triste !

— Tu vas rester seul ?

— Je crois bien, oui. Mais je me suis acheté du foie gras et une bouteille de champagne, ce sera mon petit réveillon à moi.

— Tu n'es pas invité dans ta famille ?

— Non. Je n'ai pas envie d'en parler.

Moi je voulais qu'il en dise plus mais je n'avais pas le cœur à le questionner, à l'obliger à me parler.

— Ne t'inquiète pas pour moi. Il faut que tu y ailles, tes parents t'attendent.

— Je ne veux pas te laisser seul.

— J'ai l'habitude, ce n'est pas grave. Et puis, peut-être que tu m'enverras des SMS ?

À nouveau ce sourire, qui me fait fondre. Il a été douloureux de quitter Irénée, en sachant qu'il resterait seul alors que moi j'allais rejoindre ma famille pour la plus grande fête de l'année.


Sur le chemin du retour, j'ai appelé Sébastien.

— Qu'est-ce qui se passe avec Irénée ?

— C'est compliqué.

— Toi tu réveillonnes avec la famille, pourquoi il n'est pas invité ?

— Il m'en voudrait si je te le disais.

— Je ne comprends rien. C'est lui qui veut rester seul ?

— Il n'a pas vraiment le choix.

Sébastien n'allait pas m'en dire plus. Avant de rentrer, j'ai profité des dernières minutes d'ouverture d'un Séphora pour acheter un ultime cadeau de Noël.


La fête de famille a commencé. On pense toujours que l'on peut jouer la comédie de la joie. Sauf qu'au milieu des siens, c'est assez difficile. Après l'entrée, ma mère m'a demandé de l'aider à débarrasser la table. Rien de plus naturel, je l'aurais fait sans qu'elle le dise. Par contre, elle a interdit à d'autres de nous aider, sous prétexte qu'ils étaient invités ! En fait, son objectif était de se retrouver seule avec moi dans la cuisine.

— Qu'est-ce qui ne va pas, Mathieu ? Tu as l'air tellement triste. Pourtant c'est ton jour préféré de l'année.

C'est vrai que depuis que je suis petit, le 24 décembre a toujours été ma soirée favorite. Celle où tout le monde est réuni et où on se fait plein de jolis cadeaux.

— Non, ça va.

— Tu sais que tu ne peux pas me mentir.

Décidément, je ne peux donc mentir à personne dans ce monde ?

— C'est juste que j'aie appris qu'un copain allait passer Noël tout seul.

— Comme c'est triste ! C'est quelqu'un du lycée ?

— Non, c'est Irénée, le cousin de Sébastien. Il était à la fête l'autre soir, il est vraiment sympa.

— Pourquoi il est tout seul ? Sébastien ne l'a pas invité ?

Le journal de Mathieu (7)Where stories live. Discover now