Qui es-tu ?

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Jère. Je rôde. Jobserve. Janalyse. Jinterviens. Voici les actions que je répète sans cesse depuis le début de mon existence. Je ne sais pas qui je suis. Je ne sais pas doù je viens. Je me suis réveillée, un jour, allongée au milieu dune place emplie de monde. Des passages autour de moi, personne ne semblait me prêter attention. Ils continuaient leurs routes, sans que quelque chose ne les choque ou ne les interpelle. Ils présentaient tous ce même visage renfermé, vide démotions. Je me décide enfin à me lever. Je mapprêtais à recevoir le choc dune épaule, mais celle-ci me traversa. Cest à cet instant que je compris.

Personne ne remarque mon existence car je ne suis plus.

Jai longtemps essayé de comprendre, dessayer de trouver une raison, de trouver une explication à ce que je vis. Et surtout, de trouver qui je suis. Je suis comme une coquille vide.

« Qui es-tu ? »

Je voudrais bien le savoir.

« Qui es-tu ? »

Je me pose cette question des jours durant. Elle tourne dans ma tête, se répète sans cesse. Elle néglige mes pensées.

« Qui es-tu ? »

Je marche, tel un robot. Traversant des personnes par centaines à l'allure vive qui ne sont au final que des personnes aussi vides que moi. Traversant des rues tout en étant moi-même traversée par les véhicules passants. Pourquoi suis-je ici ? La frustration de ne pouvoir interagir avec mon entourage. La frustration de ne pas connaître mon identité me bouffe. Je suis condamnée.

Je me suis beaucoup demandé comment occuper ce temps sans fin. À quoi cette existence misérable pourrait bien servir. Alors j'ai commencé à réfléchir plus sérieusement. Si je suis ici, que personne ne peut me voir, ou même m'entendre, pourquoi ne pas essayer d'agir sur les objets matériels de ce monde ? Cette idée me semblait tellement stupide. Mais j'ai besoin d'essayer, vivre une existence ignorée est la pire sensation au monde. Je prie. Je prie pour avoir ne serait-ce qu'une infime possibilité d'agir sur des objets. J'ai peur. J'ai peur de ne pouvoir rien faire. Peur d'être condamnée à la solitude face à ce monde qui me nargue. Face à ce monde qui défile sous mes yeux, comme si tout était parfait. Mais non putain. Regardez autour de vous. Regardez ce qui vous entoure. Regardez-vous les uns les autres. Vous ne voyez pas que la vie vous bouffe ? Qu'elle vous consume ? Que vous ne présentez aucuns sentiments sincères ? Réveillez-vous... ouvrez les yeux face à vos émotions. Vivez pour ceux qui ne peuvent pas. Profitez.

Dans un excès de détermination, je marche à toute allure, traversée par ces personnes qui ne se doutent de rien. Je prends les devants. Je me poste face à une porte des plus quelconques. Un bois sombre, assez ancien mais conservé à la perfection, le temps ne semble pas l'avoir affecté. C'est ce pan de bois qui déterminera si je suis condamnée à cette existence misérable ou si j'ai une chance de pouvoir trouver des réponses à mes questions.

La bouffée d'air que je prends n'a jamais été aussi profonde. Mon poing se resserre avant de se décider à agir. Mes yeux se ferment presque automatiquement, de peur d'être face à une dure réalité. Mais le froid s'étend dans mon membre. Le froid. Ce froid. Le froid du bois. Le bruit. Le grincement de cette dernière qui s'ouvre face à la pression qu'exerce mon bras. Mon cur se réchauffe. Aurais-je un espoir ? Qui suis-je ? Bientôt le saurai-je ? Mais en cette quête d'identité, je veux rendre à cette population ses sentiments. Je veux les voir sourire. Je veux les rendre heureux. Cette porte est mon espoir.

Peut-être que mon identité me reste inconnue, mais je sais que jai vécu ici. Mes notions et mes valeurs me prouvent que je ne suis pas inconsciente face à ce système. Jai des connaissances, je connais lhistoire, mais je ne connais pas la mienne. Cet inconnu meffraie et mexcite à la fois. Ma joie commence à se mêler à ce sentiment. Sentiment qui peu à peu retombe pour finalement disparaitre. Mon espoir sest éteint lorsque je me suis retrouvée face à ces personnes qui regardent le sol. Comment puis-je faire face à tout cela ? Comment puis-je aider des personnes qui ne peuvent me voir ? Comment puis-je intervenir dans la vie dautant de personnes ? Ma détermination a dépassé mes capacités. Tu ne peux y arriver. Tu es seule. Dans limmensité de linconnu.

Les Wagons PerdusOù les histoires vivent. Découvrez maintenant