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J'entrouvre les yeux. Il fait noir. Je tâtonne sur mon chevet pour attraper mon téléphone. Il affiche 7h. Je ne suis pas obligé d'aller au lycée aujourd'hui. Je n'en ai vraiment pas envie. Charlie ne m'en voudra sans doute pas elle... Charlie! J'avais complètement oublié pendant quelques secondes. Tout me revient, scène après scène dans ma tête. Tout me semble encore irréel, de l'accident jusqu'au moment d'aller dormir... Cela fait maintenant quelques minutes que je suis éveillé et que je réfléchis... Et Charlie n'est toujours pas apparue.
« - Charlie? »
Pas de réponse. Peut être dort-elle? Je ne vois personne dans ma chambre en allumant le flash.
« - Charlie tu es là? »
Toujours rien. Je me lève, puis je me dirige vers le salon. Je crie encore:
« - Charlie t'es là? »
Je vois soudain ma mère débarquer.
« - Qu'est-ce que tu gueules comme ça dans toute la maison? C'est pas fini oui? » Je sursaute ne m'attendant pas à ce qu'elle soit là.
« - Oh excuse moi... »
En attendant je m'inquiète... Il y a plusieurs options: soit elle est partie faire un tour, pensant que je dors encore, soit elle est capable de devenir invisible et le fait exprès... Elle pourrai également dormir. Enfin je l'ai appelé 3 fois... Ou bien ce n'était qu'un rêve après tout. Mais je ne veux pas y croire. Je vais vérifier dans le jardin, autour de la maison, dans les chambres, rien. Personne. Sauf ma mère qui râle en jouant au poker en ligne. Je commence sérieusement à m'inquiéter. Je ne veux pas que tout soit fini. Je ne veux pas croire que tout cela n'était pas réel. Même si c'était trop beau pour être vrai... Je dois y croire, sans elle je ne suis rien. Une coquille vide, inanimée. Sans raison de vivre. Garder espoir, garder espoir. Je respire un grand coup, je regarde l'heure: 7h15. Cela fait 15 minutes, 15 minutes ce n'est rien.

12h. Mon cœur bat aussi vite que les battements d'ailes d'un colibri. Je suis pris d'une angoisse profonde. Que dis-je, je panique. Tu ne peux pas avoir disparu, je t'en supplie... Tu n'as pas le droit... Pas le droit de me faire espérer comme tu l'as fait hier, et partir pour de bon, sans rien dire, me laisser SEUL. Car malheureusement, c'est ce que je suis. Un pauvre type, avec pour seule bouée de sauvetage une fille, qui un jour disparais et ce pauvre type sauvé redeviens juste un pauvre type. J'angoisse, j'ai peur, je m'apitoie sur mon sort, je déprime. Contrairement à Charlie, je ne suis pas du genre à pleurer. Mais je ne me suis jamais senti aussi perdu de ma vie. Je m'assois sur mon lit, je regarde le mur d'en face, le regard vide. Je replie mes genoux sur moi même, et je pose ma tête dans mes bras. Je pleure doucement, des perles salées roulent sur mes joues. Perdu, je suis perdu. J'ai perdu. J'ai perdu tout ceux que j'aimais, mon papa, ma meilleure amie, ma mère aussi d'une certaine manière... Je finis par basculer sur la droite, dans la même position, mais allongé. Je ressemble certainement à un bébé comme ça... Je somnole, mes pensées négatives me poursuivent et m'empêchent de sombrer dans un sommeil profond. Je fais des sortes de mini cauchemars, qui n'ont aucun sens.
« - Eh... Réveilles toi il est 14 heures! »
Je me frotte les yeux, confus. Une silhouette est penchée juste au dessus de moi, l'air inquiet. Des tresses, des joues rebondies et les sourcils froncés... Charlie!
« - Charlie! Bordel c'est toi!, je m'écrie.
- Ben oui c'est moi! J'aurai peut être du te laisser dormir finalement...
- Charlie je me suis fait un sang d'encre! Je pensais que t'avais disparue! T'étais où pendant tout ce temps?!
- Oh excuse moi j'aurai du te prévenir... J'ai attendu quelques heures après que tu te sois endormi... Je suis allée voir mes parents, ils me manquaient déjà trop... Je suis rentrée vers 13 heures, comme tu es un gros dormeur et que je savais que t'irai pas au lycée...
- J'étais debout à 7 heures Charlie! Tu peux pas savoir comment je me suis inquiété!, je m'énerve. Charlie...
- Samuel... Tu as pleuré?, demande-t-elle en regardant point par point mon visage, sûrement gonflé et rougi.
- C'est pas le sujet tu...
- T'as pleuré, me coupe-t-elle. À cause de moi. Samuel je suis vraiment vraiment désolée... Je...
- Ne t'inquiètes pas. Ne me refais juste plus ça d'accord?
- D'accord, promis. Je suis navrée, je ne veux pas que tu pleures pour moi...
- N'en parlons plus, parles moi plutôt de tes parents. Ça va, ils tiennent le coup?
- Eh bien... C'est la grande dépression visiblement... Ils n'ont pas cessé de pleurer dans leurs bras toute la soirée. Ça m'a brisé le coeur, vraiment. J'avais du mal à le supporter, je suis donc allée dans ma chambre, j'ai fait mon tour. C'est si étrange de ne pas pouvoir toucher d'objets, ni les prendre... Ce qui me manque le plus c'est de ne pas pouvoir écouter de la musique.
- Charlie ça ne fait même pas 24 heures...
- Et alors? J'ai besoin de ma dose chaque jour! Autrement c'est la mort...
- Littéralement.
- Je te défend de vanner là dessus, t'es vraiment...
- Rho ça va c'est de l'humour. Viens, je vais mettre un peu de musique. Tu veux que je mette quoi?
- Met un truc qui bouge.
- Qui bouge un peu ou qui bouge tellement qu'avec le son à fond la barque pourrait se briser en deux?
- Seconde option, tu me prends pour qui?
- C'est bien ce que je me disais. »
Je lance Someday de Two Door Cinema Club

(L'auteure a eu l'envie inopinée de partager cette musique qui vaut la peine d'être écoutée).

On profite, on est bien. En une heure je suis vraiment passé d'un état de mort cérébrale à un bonheur fou. Ce bonheur qui me rappelle que je ne suis pas tout seul. Que je ne le serai probablement plus jamais.

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