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"- Mon Dieu Samuel je ne veux pas mourir... Je ne veux pas disparaître...
- Charlie calmes toi. Ça va aller, je tente de la calmer. En réalité j'étais aussi voir plus paniqué qu'elle.
- Ça ne peut pas être fini... Ça ne peut pas..." sanglote-t-elle.
Je la prend dans mes bras. C'est ce que je fais quand je ne sais pas quoi dire. Dans ce cas là j'en avais aussi vraiment besoin, bien que je n'attrape que du vide. Il est vrai qu'elle se fait de plus en plus pâle, son visage, mais également son corps tout entier... Je n'ai jamais vu cela, petit à petit ses couleurs blanchissent, un peu comme un jean qu'on aurai trop lavé. On est assis, l'un à côté de l'autre. Je ne sais pas quoi dire... Elle non plus. Est ce que cet effet est temporaire? Ou va-t-elle réellement disparaître, pour de bon? Je dois dire ou faire quelque chose, on ne peut pas rester plantés là... Mais que faire? Que dire? Réfléchis, réfléchis... Charlie renifle silencieusement, observant peu à peu ses mains laisser passer la lumière. On voit presque à travers elle à présent... Le processus semble s'accélérer au cours du temps... Je suis si stressé que j'en tremble. Je vais la perdre une seconde fois? Je vais souffrir autant que lorsque j'étais sur le parking de l'hôpital? Ou est ce que ce sera pire? À quel point, et jusque quand je devrai porter la douleur? Charlie tourne la tête, et me regarde. Ses yeux qui pétillaient autrefois sont maintenant éteins, sans vie, sans étincelle, noyés par les larmes qui ne cessent de couler. Moi aussi et je ne m'en étais pas rendu compte, je pleure. À chaudes larmes, qui roulent sur mes joues jusqu'à mourir dans le creux de mes lèvres. Ces derniers jours je n'ai même pas put profiter de ces derniers instants... Tout ça parce que je n'ai été qu'un imbécile égoïste. J'ai simplement envie de mourir. Ne plus rien ressentir, ne plus être triste, ne plus être seul. Ces pensés ont eu l'effet d'un interrupteur qu'on aurait allumé dans mon cerveau.
"- Charlie...
- Oui..?
- Ecoute je... J'ai réfléchi à ta proposition... Si tu pars, je pars aussi.
- Samuel c'était une connerie, je regrette d'avoir dit ça...
- Tu n'as rien à regretter. Je suis prêt à m'en aller. De toute façon je n'ai rien d'autre à faire cette après-midi.
- Arrête... T'es stupide..., crie-t-elle.
- C'est simple tu m'as dit n'est ce pas..? J'ai pensé aux médicaments... J'ai de la codéine dans le placard à pharmacie. La boîte est encore pleine j'ai toutes mes chances.
- Espèce de débile tu ne peux pas mourir! Tu ne peux pas! Tu as 17 ans Samuel! Tu ne peux pas partir à cause de moi!
- Eh bien... Tu n'avais qu'à ne pas prendre autant de place dans mon cœur..., je lâche en me dirigeant vers la salle de bain.
- Samuel, j'en vaut pas la peine..., chuchote-t-elle en s'agenouillant devant la porte, la voix quasiment brisée par les sanglots. J'en vaut tellement pas la peine... "
Je m'agenouille également devant elle.
"- C'est pas ce que tu voulais? Qu'on soit réunis?
- Tu ne comprends pas... On sera jamais réunis Samuel! J'ai été stupide de te mettre ça dans la tête... Arrête et pose cette boîte je t'en supplie! Je t'en voudrai pour toujours si tu le fais...
Je marque une pause avant de répondre. J'hésite.
- C'est vrai, tu m'en voudra pour toujours?"
Elle me répond en baissant les yeux et en hochant la tête, pleurant de plus belle. Elle est translucide à présent. Je vois mon lit à travers elle. Ce n'est qu'une affaire de minutes, voir de secondes.
"- Hey... Regarde moi.
- ?
- Je ne le ferai pas, je dis en posant le contenant.
- Tu me le jure?
- Je te le jure. "
Elle disparaît toujours plus, chaque seconde qui passe...
- Je crois... Que c'est bientôt la fin pour moi..., dit-elle avec un petit sourire triste, les yeux baignés de larmes.
- Je suis là. Jusqu'au bout, je te quitterai pas, je fais du ton le plus ferme que ma voix me le permet.
- Dis Samuel...
- Oui Charlie?
- Tu ne m'oubliera pas hein? Tu me le promet?"
Cette question a eu le même effet que si on avait arraché mon cœur, réduit en bouillie avec une fourchette, passé au mixeur et donné à manger au chat.
- Quelle question... Jamais voyons..., je dis en tentant d'esquisser un sourire, mais la douleur au fond de mon cœur est trop forte.
- Je suis rassurée alors... Je peux partir tranquille.
- Oui Charlie... Soit... Rassurée..."
Je ne peux plus me contenir, j'éclate en sanglots, tentant de la prendre dans mes bras, son corps n'est presque plus qu'un voile transparent.
"- Charlie... T'es... la personne... la plus formidable... que j'ai jamais rencontré... Je pourrai... Jamais t'oublier..."
Je le sens, c'est presque fini.
"- Merci... Pour tout..."
Lorsque j'ai ouvert les yeux et retiré mes bras, elle n'était plus là. Ça y est. Elle a disparu. C'est fini, comme ça. Je suis à genoux, dans la pénombre, le visage trempé. Mais j'ai arrêté de pleurer. Je sais ce qu'il me reste à faire. Je saisit la boîte, elle est toujours par terre. Je l'ouvre. Est ce que j'arriverai à avaler tout ça? Ou est ce que je mourrai d'étouffement avant? Je n'en sais rien. Je n'y pense pas. Je m'assois sur mon lit, et je vide le contenu des comprimés codéinés dans ma bouche. Je parviens à les avaler mais avec difficulté.
Lors de la première minute, rien ne s'est passé. Je me suis allongé sur mon lit, et j'ai fixé le plafond. Une bien triste dernière image, j'ai pensé, mais tant pis. La deuxième minute m'a provoqué de violentes douleurs à l'estomac. Je suis pris de nausées. Mais je ne vomirai pas. Je ferme les yeux, je me concentre. Lors de la troisième minute, mon ventre ne m'a plus fait mal, les nausées ont disparues. Je suis juste bien. Je vois pleins de couleurs autour de moi. Quel bonheur. Ensuite, le néant. Ainsi s'achève mon existence. Hop, en quelques minutes. Il faut dire qu'il y en avait pas mal des comprimés...
"- Pardon" est ma dernière pensée. Je m'excuse auprès de tout le monde. Spécialement Charlie à qui j'ai juré. Mais tu comprends, n'est ce pas, pourquoi je n'ai pas put tenir cette promesse. Pardon maman aussi. Je t'aime fort. Pardon papa, tu n'est sûrement pas fier de moi. Ou peut être que tu n'en penses rien, après tout toi aussi tu es mort. C'est marrant, je n'ai pas aperçu cette lumière dont on parle dans tous les livres et films à la télé. Je n'ai également pas vu ma vie défiler devant mes yeux. Peut être que je ne le mérite pas après tout. J'ai 17 ans et j'ai décidé de mettre fin à mes jours, niveau dignité il y a mieux. Quoi que... Je finis par l'apercevoir cette lumière, comme si je sors d'un tunnel. J'ouvre les yeux. Je ne vois pas grand chose. Alors ça y est, c'est ça la mort? Mais petit à petit ma vision se précise, et je suis... Dans une chambre d'hôpital. Oh non, ce n'est pas vrai... La boîte entière ne m'a pas suffit? C'est impossible, il y en avait tellement! J'essaie de me lever, mais je suis retenu par la douleur bien réelle que me provoque ma main, dans laquelle est enfoncé un cathéter. Un médecin entre. Du moins un type avec une blouse blanche et des lunettes entre.
"- Ça alors...Il est réveillé..."
Il prend son portable et appelle je ne sais qui, et répète:
"- Il est réveillé.
"- Eh bien, en effet, il semblerai que oui, je sois réveillé..?, je dis à voix basse.
- Samuel, comment te sens tu?", me demande le médecin.
Plusieurs infirmiers et infirmières arrivent dans la chambre.
"- Bien... J'imagine? Pourquoi mon réveil suscite-t-il tant... D'engouement?
- Cela faisait 7 mois depuis avant hier que tu étais dans le coma Samuel.
- Ça alors, la codéine n'a même pas réussi... J'ai juste fait une longue sieste alors?
- De la codéine? De quoi parles-tu?
- La raison pour laquelle je suis dans le coma, n'est ce pas? J'ai avalé un flacon entier de codéine, j'ai failli mourir et ma mère à du appeler les secours et puis je me suis retrouvé là..."
Je suis déçu. Vraiment déçu que cela n'ai pas fonctionné.
"- Tu ne te souviens donc de rien.
- Je me souviens de m'être allongé sur mon lit, et après c'est le trou noir.
- Il y a 7 mois, tu as eu un accident Samuel, explique une des infirmières.
- Un... Accident..?, je répète, perplexe.
- Oui. Une camionnette t'a renversé sur le chemin pour rentrer à la maison, d'après une de tes amies, qui a justement appelé les secours.
- Attendez... Vous êtes sûrs que vous ne vous trompez pas? J'ai clairement été dans le coma à cause d'une overdose et...
- Samuel voyons non..., dit calmement un autre infirmier. Si cela aurait été le cas, on aurait retrouvé des traces de drogues ou de médicaments sur toi, mais d'après ton amie vous vous étiez fâchés et tu n'a simplement pas fait attention avant de traverser...
- Une... Amie vous dites? Comment s'appelle-t-elle?
- Charline... Ou quelque chose du genre...
- Charlie?!, je m'exclame.
- C'est exact. Elle a été là chaque jours, à attendre que tu te réveilles. Elle passe toujours aux alentours de 18 heures, elle devrait être entrain d'attendre à l'accueil. Je vais la chercher pour toi si tu veux, elle sera sûrement très heureuse."
Ça alors. Charlie? Mais c'est impossible, je l'ai vue disparaître... Devant mes yeux...

Mais c'est bien Charlie qui est là. Entrant dans la chambre, bien réelle. Elle a ses deux petites tresses, un jean et sweat à capuche. Elle porte sa main à sa bouche en m'apercevant.
"- Oh Samuel..."
Elle semble bouleversée. Elle court et me prend dans ses bras, et je les sens.
"- J'ai vraiment crut que t'allais partir tu sais..., fait elle en sanglotant.
- Mais alors... Tu n'a pas disparu?
- Mais non imbécile, sourit-elle. J'ai été là chaque jour en attendant que tu te réveille. Ce que tu m'a fait peur..."
C'est ainsi que ce qui s'est révélé être un cauchemar a prit fin. Et mon dieu ce que c'est bon d'être vivant.

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