Chapitre 2

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   — Foster, pourquoi tu m'as fait paniquer comme tu l'as fait ? s'exclama Keefe en débarquant dans la chambre de Sophie. J'ai faillit faire une crise cardiaque hier, moi ! Il n'y avait personne à Havenfield.
   — Oh oui, Grady et Edaline m'ont emmené acheter une nouvelle breloque, répondit la jeune fille.

   Elle désigna le bracelet accroché à son poignet gauche, auquel pendait à présent une alicorne d'argent en plein vol, dont la crinière était sertie de petits cristaux. Ses parents adoptifs avaient insistés pour la lui prendre, prétendant vouloirs se rattraper de ne pas lui en avoir offerte une nouvelle pour sa rentré en Niveau 4. Même si la jeune fille les soupçonnait plutôt de vouloir se faire excuser pour son catastrophique rendez-vous avec les Entremetteurs.

   — D'ailleurs, comment va notre nouvelle Maman Paillettes ? demanda l'Empathe en s'essayent sur l'immense lit de son amie.
   — Très bien, visiblement être mère la comble de bonheur. Et les poulains se portent bien aussi, expliqua la Télépathe. Félix n'arrête pas d'embêter sa sœur.
   — Je maintient qu'on aurait dû l'appeler Keefou, se plaignit le jeune homme. C'est un nom qui va de paire avec les fauteurs de troubles !
   — Ah, non ! Un Keefe c'est déjà bien suffisant, s'esclaffa Sophie devant la moue boudeuse de son ami. Et toi, comment vas-tu ?
   — Bien. Les câlins géants avec mon papounet ont cessé depuis le Festival Céleste, tu te rends compte ? Je n'ai plus droit à l'amour paternel ! s'exclama-t-il. Et ma mamounette s'est fait une joie de prendre Mister Frangette sous son aile...

   La Télépathe attrapa la main de son ami et entrelaça leurs doigts, dans l'espoir de croiser son regard. Mais le jeune homme regardait fixement le tapis floral.

   — Sais-tu que ton obstination à éviter mon regard est des plus mignonne ? questionna-t-elle en souriant.
   — T'as entendue ? cria le jeune homme en relevant la tête vers la porte close. Foster à dit que j'étais mignon !

   Aussitôt, le battant tourna et Ro passa sa tête dans l'entrebâillement de la porte.

   — Tu t'y prends très mal pour la conquérir, tu le sais non ? demanda l'ogresse à son protégé.
   — Je ne suis pas venu la conquérir, répliqua l'Empathe. Mais lui faire part de mes récentes découvertes.
   — Lesquels ? demandèrent Ro et Sophie à l'unisson.

   La princesse était à présent face au jeune homme, qui l'a regardait sans ciller.

   — Pourquoi tu ne m'en à pas parlé ? demanda Ro en découvrant ses dents pointues.
   — Je voulais te l'annoncer hier, en même temps qu'à Foster, mais elle n'était pas là, expliqua-t-il. Donc on remet ça à aujourd'hui !
   — Qu'as-tu découvert ? s'impatienta la Télépathe.
   — Un fragment de souvenir.

   Les mots restèrent en suspens dans la pièce, comme s'ils n'avaient pas leur place dans cette conversation. Ou qu'ils étaient trop absurdes pour être entendus.

   — Comment ? fut tout ce que Sophie parvint à dire. Je veux dire... ( Elle de racla la gorge. ) on ne peut pas déclencher des souvenirs juste comme ça. Il faut procéder à un sondage, trouver le bon déclencheur et...
   — C'est seulement une scène sans importance Foster, sa ne nécessite pas de sondage, l'interrompit son ami. Je suppose qu'à force de répéter les exercices de Tiegran, encore et encore, et bien, j'ai fini par trouver le déclencheur sans m'en rendre compte.
   — Peut-être, admit la jeune fille. Je peux le voir ? Ou bien...
   — Non, c'est bon, la coupa Keefe. Ah moins que tu veuille faire ton numéro d'Apparenté avec Fitzy, où vous vous regardez dans le blanc des yeux ? la taquina il.

   Impossible de dire s'il rigolait ou non, mais il souriait.

   — Non, je peux me débrouiller seule, affirma la Télépathe.

   Elle prit une inspiration et posa ses doigts sur les tempes de son ami. L'esprit du jeune homme semblait rugueux, comme si ces souvenirs d'ordinaire si nettes et colorés avaient ternis, comme pour la décourager de regarder. Ce qu'elle ne fit pas. La scène qu'elle cherchait ne fut pas difficile à trouver. Son ami semblait la repasser en boucle depuis un moment.

   Keefe, alors âgé de huit ou neuf ans, se tenait dans une pièce, vaste et circulaire. La salle n'était pas très meublé, mis à part un grand bureau de verre jonché de papiers, quelques étagères sur lesquels étaient posé des babioles et autres sorte de trophées, des bibliothèques garnies d'épais volume aux relieurs dorés et d'un mur de cristal scintillant, il n'y avait rien d'autre. Le jeune Keefe porta son regard sur une feuille où était dessiné une femme blonde et élancée, aux même regard bleu glacier. Sa mère. C'était son dessin, qu'elle avait gardé. Une étincelle de fierté jaillit dans l'esprit du jeune homme.

   — J'ai été tellement fier à ce moment, à me dire qu'elle ne l'avait pas jeté ou même déchirée pour en faire des confettis, songea l'Empathe.
   — Je suis désolée...
   — Ne le sois pas.

   Le souvenir sauta et repris plus tard, comme un saut dans le temps. Le jeune garçon se tenait face à sa mère, un morceau de papier dans les mains. Lady Gisela, vêtue d'une magnifique et froufrouteuse robe pervenche, replaça une mèche de cheveux dans son chignon élaboré.

    — Que fais-tu dans mon bureau Keefe ? Ne t'ai-je pas interdit d'y entrer ?
   — Si, mais les règles sont faites pour être brisées, rétorqua le jeune homme. Et ça ( il tendit le bout de papier devant lui ), qu'est-ce que c'est ?
   — Tu n'as pas à savoir, gronda la Polyglotte en arrachant le mot des mains de son fils. Ce ne sont pas tes affaires.
   — Pourquoi je n'arrive pas à lire ?
   — Parce-que ce n'est pas rédigé dans la Langue des Lumières, Keefe, répondit-elle sur le ton de l'évidence. Maintenant va dans ta chambre.

   Elle attrapa fermement le poignet de son rejeton et le tira jusqu'à la porte. Et puis... plus rien. Le souvenir s'arrêtait là. La Télépathe laissa retomber ses bras sur ses cuisses.

   — Qu'y avait-il d'écrit sur le bout de papier ? demanda-t-elle.
   — Je n'en sais malheureusement pas plus que toi Foster, soupira Keefe.

Gardiens des Cités Perdues ~ 8. HéritageOù les histoires vivent. Découvrez maintenant