Petite Ballerine pourquoi tournes-tu toujours dans le vide ? Sache que tu me donnes le tournis à force de tournoyer. Dans ta jolie petite boîte à musique, tu es vêtue de ta robe turquoise, tes mouvements de danse m'hypnotisent Ballerine. Tu danses en rond sans raison mais tu me fais sentir triste et angoissé lorsque je t'observe. J'aimerais tellement que tu puisses me raconter ton histoire. Pourquoi cet air si triste sur ton visage, où se trouve ta douce moitié petite Ballerine...Je n'étais qu'un jouet, me répéta l'homme au teint basané. Je refusais d'y croire car je l'aimais, il était mon créateur aux mains abîmées car il était le fils d'un ouvrier. Il taillait la pierre et sculptait le bois. Je me souviens que ce brun avait un regard timide et empli de gentillesse. Il était si passionné en me fabriquant, qu'il fantasmait sur chacune de mes courbes, chacun de mes traits. Je ressentais sa main tremblotante vers mon petit corps fragile, comme si j'avais une grande importance pour lui. Je sentais mon cœur battre à toute allure au plus profond de ma poitrine. Ça me faisait peur mais je savais que ceci signifiait quelque chose de bien. L'amour. J'étais amoureuse de mon créateur. Lorsqu'il eut fini de me confectionner, il m'avait placé dans une petite boîte qui me fit tournoyer à toute allure. J'étais si bien, je voyais le monde virevolter si vite autour de moi qu'une simple couleur m'enveloppait. Tout se figea lorsque je pensais à lui, le reste devenait flou et mes idées étaient plus claires. Je l'aimais malgré le fait qu'il était pauvre, il était mon monde et bien plus que ça. Il me faisait tourner dans le vide sans arrêt au rythme de la musique. J'étais sa toute première expérience et il était fier. Cependant, il se remettait dans son atelier et confectionna une autre boîte, je n'étais pas d'accord, je sentais la jalousie monter en moi. Cette sensation si réelle s'empara tellement de moi que j'étais parvenue à prendre vie tout comme lui vivait. Je débarquais de ma boîte à musique avec un air excentrique pour hurler sur lui. Sa réaction était évidente, il était tombé en bas de sa chaise. Il se posa sur ses genoux et s'avança vers sa table avec un air apeuré. Il y avait tant de confusions qui se lisait parfaitement dans son regard. Je n'étais pas censée être vivante.
Je me refusais de croire qu'il voulait me remplacer. Il n'était qu'à moi. Je me tournais dos à lui, mon visage refermé vers le haut, je boudais, je lui montrais tout mon mécontentement envers son idée impardonnable. Ses yeux noisettes restaient rivés sur mon petit corps de ballerine, je m'étais sentie gênée. Mes joues devinrent alors rosées et une température monta en moi telle de l'eau en ébullition. Il avait compris ce que j'étais, une humaine comme lui, il ne resta qu'à savourer notre flamme, mais il ne voulait rien comprendre. J'espérais à mon ultime rêve qui était d'être à lui et à lui seul.
« Ballerine, veux-tu bien cesser ces bêtises, ça ne marchera jamais entre nous. » S'opposait-il lorsque je lui donnais envie par mes petits mouvements coquets. Ceci me faisait rire, car je savais qu'il adorait ça. Je continuais toujours jusqu'à ce qu'il m'enferme dans ma petite boîte sans que je puisse sortir. Ma mélodie ne résonnait plus et le noir me peina. Lorsqu'il ouvrait la boîte, je me mettais à tournoyer vivement en rond, je tournais dans le vide, car mon amour n'était pas réel et je m'obstinais dans ce rêve faux. Je me disais sans cesse que j'arriverais à le convaincre de notre amour. Par conséquent, il était toujours au travail et usina d'autres poupées semblables à moi. Je marchais souvent au travers d'elles et je ne trouvais rien de similaire à moi. Elles ne bougeaient pas comme un être vivant, elles ne faisaient que danser et danser. Elles obéissaient à leur boîte à musique comme si elles étaient prisonnières dans la mécanique. Je n'avais pas eu tort, mon créateur les avait tous truquées dans les engrenages de la boîte. Je trouvais ceci cruel de sa part, mais il m'avait répondu qu'il ne voulait pas reproduire cette erreur. Mon cœur s'était contracté, j'étais donc une erreur ! Moi celle qui l'avait toujours aimé. J'avais tourné les talons, je boudais, j'étais furieuse de ce qu'il venait de m'annoncer. Cependant, il m'avoua que j'étais la plus magnifique de ses erreurs. Je lui souriais et m'en alla vers ma petite boîte à musique afin de lui montrer ma joie en dansant devant mon miroir. Ma petite robe suivait la cadence de la mélodie et mes cheveux basculèrent sur le rythme de mon corps fragile. Mon regard dans le sien qui était envoûté par mon apparence si parfaite, je savais que nous étions faits l'un pour l'autre. Je voulais qu'il comprenne que ni l'âge ni la taille avait de l'importance en amour. Il suffisait d'écouter notre cœur pour que nous sachions que notre amour battait l'un pour l'autre. Je tournais, tournoyais dans le vide, l'esprit embrouillé d'amour. J'étais heureuse d'être avec mon créateur.
Un bon matin, il avait ouvert les rideaux d'un geste hardi, la lumière du jour pénétra la boutique sans merci. Il attrapa un balai et épousseta les meubles de fond en comble. Pourquoi avait-il fait ces gestes et de tout nettoyé ? Depuis bientôt trois ans qu'il laissait cet endroit dans l'ombre et dans la poussière sans que personne entre dans sa boutique. Je me décrochais de ma petite boîte à musique afin de savoir ce qu'il faisait. Son ombre aboutissait sur les boîtes à musique, il les ouvrait toutes l'une après une et activait leur mécanisme tous en même temps. Mes sœurs prenaient place sur les étagères, sur les meubles et devant la vitrine, que faisait-il ? Mon cœur se contractait, j'étais dans l'incompréhension. Je l'observais de mes yeux amandes horrifiés, il n'était plus le même. Comment osait-il exposer mes sœurs devant tous ces gens ? Je hurlais son nom afin qu'il s'arrête, mais rien à faire. Il ne m'écoutait pas. La clochette de la porte d'entrée sonnait brouillement. Je me cachais activement derrière la tasse à café de l'homme. J'avais peur. Ce dernier vendait mes sœurs, je comprenais la crainte d'être remplacée par contre les voir partir l'une après l'autre me peinait. Elles étaient peut-être sans vie mais je me sentais moins seule lorsqu'elles dansaient autour de moi.
Une vive douleur me surprenait. Ça me faisait si mal que j'avais du mal à respirer. Était-ce donc ça la tristesse, le chagrin ? Mon visage se ternit à la vue de la boutique qui s'affaiblissait rapidement semaine après semaine. Mon créateur changea aussi d'attitude, il était devenu plus colérique et voulait avoir beaucoup plus d'argent. Mon bel homme au teint basané devenait fou à lier, son regard timide devenait odieux et ses mains étaient de plus en plus blessées par les heures de travail qu'il se donnait. Je me cachais de lui et de sa colère. Je m'accroupis sur moi-même les genoux près de mon visage entre les livres de la vieille bibliothèque. Ma petite boîte à musique ne sonnait plus. J'avais peur de m'y réfugier pour qu'ensuite il me vende comme il l'avait fait avec mes sœurs. Mais ce n'était pas une vie, ce n'était pas ma vie ! Je m'étais donc levée une nuit et j'ouvris ma maison qui enfermait mon magnifique miroir. Je m'étais installée confortablement le visage maussade vers le sol. Ma main au-dessus de ma tête et une jambe relevée vers le haut, j'étais restée immobile, paralysée par la tristesse jusqu'au petit matin. Mon créateur m'interpellait, je n'étais plus capable de dire un seul mot. J'étais redevenue un jouet comme il m'avait dit au départ. Triste de me voir sans vie, il m'avait gardé à ses côtés oubliant tout ce travail derrière lui. Ce drame avait continué jusqu'à sa mort sans que je puisse me réveiller de ma peine, car son amour qui m'avait éveillé n'y était plus. Même s'il me suppliait ce n'était pas ces mots qui m'avaient fait sentir vivante, mais bien son désir et sa passion.
Je suis maintenant avec une famille adorable qui habite une adorable petite fille qui prend soin de moi. Je suis nettoyée, je danse et je chante, mais je reste à jamais le cœur noué de peur ainsi de peine par un passé troublant.
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Les Histoires De Taty
Teen FictionIci tu trouveras des one shot et aussi des textes sur n'importe quel thème. Qu'ils soient mignons ou bien émouvants, mes écris sont là pour vous occupez ainsi que vous faire vivre des nouvelles aventures à chacune d'entre elles... Ah oui ! J'aime li...