Le coeur dans l'âme

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2 ans plus tôt

C'est le grand jour, nous l'attendons avec impatience depuis près de six mois. Tout est en place, les invités sont bien installés, la salle est correctement sécurisée, Arthur stress pour son discours. Il est toujours un peu stressé alors qu'au final il assure toujours comme un pro. Je sais que la montée d'adrénaline qu'il ressent avant de parler en public lui fait l'effet d'une drogue. Il a besoin d'être apprécié de la foule, ça l'aide à se sentir bien. Je pense que ce besoin de reconnaissance perpétuel qu'il ressent est une conséquence du harcèlement dont il était victime à l'école.

On se connait depuis l'école primaire, on est devenu amis lorsque j'ai été le premier à m'interposer entre lui et les brutes qui l'embêtaient. Depuis on ne s'est plus lâchés. De notre duo, il a toujours été le plus actif, je ne sais même pas comment il trouve le temps de dormir, son cerveau tourne toujours à 300 kilomètres par heure. Malgré l'impression que j'ai d'être à la traine derrière lui et ses idées de génies, l'entreprise nous appartient à parts égales. Il y a toujours tenu, il dit tout le temps qu'il ne serait rien sans moi et que je suis une partie essentielle de cette entreprise. J'imagine que c'est pour me réconforter. Mais bon je ne vais pas me plaindre, j'ai un boulot qui me plaît, je travaille avec mon meilleur ami et à tout juste vingt-cinq ans je fais partie tout comme Arthur des personnes les plus riches du pays.

Le discours va commencer, je lui chuchote quelques mots d'encouragement avant qu'il ne monte sur scène puis le suis. Je me place derrière lui. Je le regarde pendant qu'il parle. Il a vraiment un style très attrayant quand il est habillé en costard comme aujourd'hui, je comprends que toutes les filles lui courent après. Ce que je ne comprends pas c'est qu'il ne soit toujours pas en couple. Je sais qu'il y a plein de filles qui pourrait lui plaire dehors, mais non, il n'a toujours pas trouvé la perle rare. Quand on en parle, il esquive le sujet en disant qu'il s'occupera d'être en couple plus tard, que pour l'instant il est très bien célibataire. C'est un homme bien, je sais qu'il trouvera la personne qu'il lui faut un jour. En attendant ce jour, je veille sur lui comme sur un enfant car c'est en réalité un morveux hyperactif. Je ne sais pas comment il arrive à convaincre les investisseurs qu'il est sérieux. Dès qu'il travaille, c'est pour lui comme de résoudre un puzzle, de résoudre des énigmes. Une sorte de drogue mentale.

Le discours se passe bien, les questions qui en découlent aussi jusqu'à ce qu'un homme étrange se lève et qu'il sorte une arme après quelques paroles à peine. Mon cœur manque un battement lorsque je le vois viser Arthur, je crie son nom et me jette sur lui pour le protéger, mais c'est trop tard, j'ai entendu la détonation, il a déjà tiré. S'en suive les cris et ma tête qui me fait mal ma vision devient floue quelques instants. Arthur me regarde, je vois sa chemise tachée de sang puis son visage horrifié regardant la mienne. Je baisse la tête et vois une tâche grandissant au niveau de mon cœur.

Cela fait deux secondes que les détonations ont eu lieu.

Je retourne la tête vers lui, je sens toute force me quitter et comprends que c'est fini. Il me reste juste assez de temps pour lui souffler quelques mots.

"Ne m'oublie jamais, Arth... N'oublie pas que je t'aime, depuis le tout premier jour."

Il me dit de me taire, que je vais survivre, mais il me devient dur de rester parmi les vivants, je lutte autant que possible. Je sens qu'il essaye de bouger et qu'il rampe jusqu'à moi. Il pose ses lèvres sur les miennes.

"Reste avec moi Tony, je t'aime, je ne suis rien sans toi... S'il... S'il te plaît... tu es le plus fort... Je t'ai..."

Cela fait dix secondes que les détonations ont eu lieu.

Ses paroles ne sont plus que des murmures, il peine à parler mais résiste tout comme j'ai essayé de le faire, mais je ne peux pas, je ne peux plus. Sa voix devient de plus en plus lointaine et mon champ de vision se rétrécit.

Cela fait onze secondes que les détonations ont eu lieu.

Ainsi, au milieu des cris, des pleurs, du bruit, tout n'est plus que néant. Je sens la vie quitter définitivement mon corps dans un dernier soupir.