Arène

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Ils m'attendent. Je les entends acclamer les combattants. Ils sont des milliers, eux, pour seulement une centaines, entourés d'un brouhaha constant, ne pouvant ni échapper à leurs regards, ni même tourner le dos à ce destin qui les attends. Que ce soit vainqueurs ou bien vaincus. Aucun, sauf moi. Malheureusement.

Je suis maudis de cette arène, de ces bonnes grâces, de ces victoires, de ces victuailles. Maudit par le bonheur et la joie que mon statut est supposé m'apporter. Quel échec. De vivre ainsi. En pseudo-héros, voué et dédié à vivre et finir sur ce ring. Cela fait nombres d'années que je suis Champion et esclave de ce lieu. Figure d'admiration du public et des combattants. Je me hais pour ce que je suis devenu. C'est affreux, j'ai fini par entretenir ce cercle que j'espérais briser en détrônant mon prédécesseur. Cette vaste blague.

Quelle erreur.Quel ennui.

Personne est capable de briser ce cercle. Même moi, j'en ai été incapable. En me promettant de détruire cet Ouroboros, j'ai fini par en devenir un. Pitoyable. Mon seul souhait est que l'on me renverse. Mais encore aujourd'hui, ce sera sans succès. Ils se ramollissent tous en face de la bête que je suis. Et, comme à chaque fois, ils périront, sans avoir réussit à me libérer de ma condition. C'est étrange, cette sensation. de passer d'être salvateur à un être en détresse. Et dire que je venais uniquement honorer sa promesse, à la base. Quelle ironie du sort.

Ils hurlent de plus en plus fort. Ils font vibrer le stade. Ils sont terrifiants. Ils me glacent le sang. Je suis celui qu'ils appellent le lion. Eux, sont des charognes. Observant et attendant la fin de ce macabre divertissement pour ce délecter des carcasses encore fraîches, de la pâture que l'on offre. Et l'issue est la même à chaque fois. La mort, pour chaque vaincu. Aucune fois, ils n'ont acceptés d'en sauver, ne serait-ce qu'un.

Le monstre n'est pas dans les entrailles de l'arène, comme ils le pensent. Mais bien dans les tribunes.

La fin se rapprochent. Les sons se font encore plus fort et les vibrations s'intensifient également. A ce stade, ils doit n'en rester qu'au moins 7, sur les 208 initiaux. La plupart étant soit morts, soit mourants. Il en restera deux, avant que je n'arrive. Ils rajoutent du défi, cette fois. Un combat en deux contre un.

Je l'entends. Plus que 4, le commentateur s'affolent, la foule hurle, ils frappent du pieds de plus en plus forts, mon cœur veut lâcher, je ne veut pas y aller, y retourner, ça m'effraye de devoir y plonger une fois de plus,je veut en finir avec tout ça. Il ne me reste que deux solutions pour m'en sortir. Soit mourir dans cette pseudo-gloire, entouré de ces hyènes hypocrites, glorifié et mis sur un piédestal de sang, de chair, de larmes et de lames. Glorifié pour mon statut de gladiateur, glorifié pour mon statut de soldat génocidaire. Ils sont nombreux, ceux que j'ai sur la conscience. Plus de cent gladiateurs et sans doute sept cents que j'ai tués en tant que soldats. Je n'arrive plus à supporter ces âmes. J' en viens à les entendre, la nuit. Je n'en peut plus.

Que quelqu'un me sauve de ce cauchemar.

Recueil du TempsWhere stories live. Discover now