chapitre 1

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*Londres, mi-juin 2006, remise des diplômes dans une école renommée d'audiovisuel.*

"— Enfiiiiin !!!!!! Je n'arrive pas a y croire on a réussiiiii !!!!!!

Mes amis rient autour de moi. On a tous eu notre diplôme, après de longues et intenses journées de travail acharné.

— Les vacances vont enfin pouvoir commencer ! Fait Adam, l'un de mes meilleurs amis.

— C'est pas trop tôt je commençais a désespérer ! dis-je sur un ton dramatique.

— S'il te plaît Adam, pas d'alcool cette fois ! Ajoute Owen en riant. Je reste traumatisé de ta dernière fête !

— Mais qui t'as dit que j'allais organiser une fête ? Lui rétorque Adam, un sourire en coin.

Je réponds en riant :

— Tu commences toujours par "les vacances vont enfin pouvoir commencer" avant d'annoncer que t'organises une soirée.

Le soir même de la fin des épreuves, Adam avait invité la moitié de la promo à une soirée pour "décompresser" comme il l'avait si bien dit, et le lendemain on s'était tous retrouvés avec une gueule de bois sans nom, qui nous avait fait regretter jusqu'à notre naissance.

— Moui, bon, cette fois je propose autre chose, on va aller en boîte ! Andy, je te mets au défi de repartir avec quelqu'un !

— Non c'est mort, je pars pas avec n'importe qui moi ! 

— Ohhhh allez, c'est juste un coup d'un soir ! Rétorque Adam, comme si ça n'avait aucune importance.

Les battements de mon cœur accélèrent un peu. On se connaît depuis plus de six ans, ce sont mes meilleurs amis et nous sommes bien sûr très proches, mais je n'arrive toujours pas à leur avouer que je suis gay. Je ne peux tout simplement pas repartir avec une fille pour leur faire croire quelque chose, en plus du fait que je suis à peu près aussi à l'aise avec les gens que je ne connais pas, qu'un pingouin face à une orque. Qui sait ce qu'il pourrait se passer après ? Peut-être qu'un jour on se croisera dans la rue et  elle nous reparlera de ce fameux soir, qui n'aura finalement pas été si fameux que ça... Oh non, je n'ose même pas imaginer.

— Ça va ? T'as pâlit d'un coup, ça te fait peur, c'est ça ?

Owen ricane et je tente un sourire. Mais ce dernier est tellement coincé que je suis sûr qu'il me donne un air constipé.

— Non, tout va bien. Bon, on y va ? Moi je rentre en tout cas, je...j'ai... j'ai des courses à faire."

En vérité, je cherche juste à m'isoler pour calmer les battements de plus en plus affolés de mon cœur. Parler d'amour ou de filles avec eux me mets toujours en panique, j'ai peur qu'ils ne se rendent compte que je ne leur dis pas tout, et qu'ils finissent par me détester en apprenant que je ne suis pas comme eux. Et s'ils me trouvaient anormal ? Et si je leur inspirais uniquement du dégoût ? Voire même de la peur ? Tous les scénarios catastrophes possibles et imaginables tournent en boucle dans ma tête, il faut que je me calme.

Je salue mes amis rapidement et commence à rentrer, mes pensées s'entrechoquant de manière désordonnée. Un jour je leur dirai. Mais pas tout de suite, je n'arrive pas à l'admettre totalement moi-même, alors qu'eux l'acceptent comme ça... C'est tout bonnement impossible. Mais il va quand même falloir que j'arrive à leur annoncer avant qu'ils ne le découvrent... Au risque de les perdre. 

Je m'arrête quelques secondes pour relever la tête et regarder ce qui m'entoure afin profiter quelques instants du printemps-début été, qui s'installe doucement mais sûrement. On a déjà commencé à sortir les t-shirts depuis quelques semaines et remit les blousons et doudounes au placard, l'été promet d'être chaud !

Soudain, je sens une main se poser sur mon épaule, ce qui a pour conséquence de me faire sortir de mes pensés en sursautant.

— Eh, mec, ça va ? Me demande Adam. T'as pas l'air bien, on te raccompagne au moins jusque chez toi, viens.

Owen arrive derrière nous, se place de l'autre côté et nous marchons en silence pendant quelques minutes, avant qu'Adam ne reprenne la parole :

— Si c'est par rapport à ce que j'ai dit tout à l'heure je suis désolé, je voulais pas te mettre un coup de pression. Je sais que t'es pas à l'aise avec ça...

AH, donc ils l'ont remarqué finalement... Peu à peu je reprends contenance, puis mon sarcasme habituel refait surface :

— Moi ? Stresser ? Je ne vois pas de quoi tu veux parler. D'ailleurs, tu as vraiment dit quelque chose ? Il me semble avoir entendu une mouche voler, mais à part ça, vraiment aucune sonorité ressemblant de près ou de loin à ta voix. Lui répondis-je avec une moue étonnée.

Owen rit légèrement tandis qu'Adam fait un petit sourire.

— Content de voir que tout va bien. Donc pour ce soir c'est ok ? Demande Owen. Moi je suis carrément partant!

— Ouais pourquoi pas, ça me permettra de vous voir vous prendre des râteaux toute la soirée.

Je souris en coin, je ne suis pas particulièrement sympa avec eux mais cette pensée continue de me faire sourire. Ils me donnent tous les deux un petit coup en râlant et on finit par se séparer devant chez moi:

— Bon, on se retrouve à vingt-trois heures là-bas ?

— Yep, à toute mec ! Fait Adam.

— Essaye d'être à l'heure cette fois ! S'esclaffe Owen.

— Ouais, je rappellerai plus jamais à Andy de venir. dit Adam en se tournant vers moi avec un sourire en coin.

Je ris en me remémorant le bal de fin d'année, au lycée, je l'avais totalement oublié et j'avais débarqué 1h30 en retard parce qu'Adam et Owen m'avaient appelés en panique. Ils se disaient perdus sans moi. En même temps, ça me paraît logique, je suis leur étoile directrice et leur modèle. Sans moi leur vie n'a plus de sens. Je n'ai jamais compris pourquoi ils disent que je prends la grosse tête... Enfin, j'imagine que personne n'est parfait.

— J'essayerais de penser à vous mais je ne vous garantis rien ! J'ai tellement de choses plus intéressantes à faire...

— Excusez moi de prendre trop de place dans votre vie Sir. Dit Adam en s'inclinant devant moi, comme pour imiter un valet faisant la révérence à son roi.

— Je pense que tu devrais t'agenouiller et me supplier de te pardonner."

Adam s'exécute et se met a genoux tout en élucubrant des phrases incompréhensibles à cause du ton plus que pleurnichard qu'il utilise, entrainant un fou rire entre Owen et moi, bientôt accompagné du principal intéressé.

Ils me laissent devant la porte de mon immeuble, puis je rentre chez moi et regarde l'heure, 17h12, ça va, j'ai le temps. Je décide donc de m'installer sur le canapé et de regarder un film documentaire en attendant l'heure de chercher de quoi manger et de me préparer à sortir.

Tiny Little LoveOù les histoires vivent. Découvrez maintenant