La prison des dieux

54 11 32
                                    

                                                                                         Chapitre 36

Le monde autour de moi a semblé s'arrêter. J'avais l'impression de me faire transpercer par des couteaux, et de me faire écraser par le poids immense de la tristesse. Maintenant, plus rien n'avait de sens. Mon cœur s'est vidé afin de se remplir de haine et de chagrin, des émotions si puissantes qu'elles ne pouvaient pas tenir en moi. Je sentais que le monde m'abandonnait, me laissant seule. 

Seule. À jamais.

Dans un dernier élan de courage, j'ai séparé le corps de Maïwen de la main griffue de la sirène avant de transporter mon amie vers la surface. Au moment où on y arrivait, sa bouche s'est miraculeusement ouverte afin d'inspirer une bouffée d'air. Elle était en vie !

— Maïwen ! ai-je crié.

Un son rauque s'est échappé de sa gorge. Plus loin, j'ai aperçu Djenn, Aisha et Liam qui se battaient contre un groupe de monstres. Un simple signe de la main leur a fait comprendre qu'il fallait que l'on atteigne l'île. Ignorant tout ce qui se passait autour de moi, je me suis focalisée sur mon objectif en me mettant à nager avec la force du désespoir, transportant mon amie inconsciente. Les sirènes qui nous ont vues sont arrivées trop tard car nous avions déjà atteint l'île. J'ai déposé Maïwen sur le sol avant de voler à la rescousse d'Aisha, Djenn et Liam. Ils tentaient de nous atteindre, battant frénétiquement des bras et des jambes tout en maintenant les sirènes éloignées. J'ai plongé dans l'eau sombre armée de ma dague et je me suis mise à nager vers eux. Avec un cri de rage, j'ai formé deux rayons noirs qui sont partis de mes mains à une vitesse vertigineuse avant d'atteindre leurs cibles de plein fouet. Les deux monstres touchés ont hurlé de douleur tout en sombrant dans les profondeurs. 

   Aisha, aux prises avec trois sirènes, était submergée. Sans perdre une seconde, j'ai bondi vers l'une de ses trois assaillantes en la poignardant dans le dos. On a tué les deux autres avant de nager vers l'île. Djenn et Liam avaient déjà atteint la terre ferme et s'affairaient autour de Maïwen. Au moment où je sortais de l'eau, Aisha hurla. J'ai fait volte-face et je l'ai vue en train de se faire traîner par les chevilles tandis qu'elle tentait désespérément de s'agripper à quelque chose. Je me suis jetée au sol avant de lui saisir les poignets. Aisha se faisait maintenant écarteler, partagée entre moi et la sirène qui lui tenait les pieds. Mais heureusement, Liam arriva à temps pour lui donner un violent coup de pied. La petite, libérée de son emprise, bondit sur la terre ferme en manquant de me bousculer au passage.

Une affaire réglée.

Mais il y avait Maïwen. Je l'ai prise dans mes bras pour l'éloigner de la mer en guettant tout signe de vie de sa part. On a repéré une petite grotte et nous sommes tous rentrés à l'intérieur. Une ouverture ronde au plafond laissait entrer la clarté de la lune, et j'ai donc déposé mon amie juste en-dessous du rayon de lumière blanche.

— Que lui est-il arrivé ? demanda Liam.

— Une de ces saletés de monstres a tenté de lui arracher le cœur. Et je suis intervenue trop tard, ai-je dit, envahie par la culpabilité.

Maïwen respirait faiblement. J'ai enlevé le sac de son dos avant de fouiller son contenu. Des vêtements, de la nourriture, de l'eau... Le livre. Et les fioles. Je me suis mise à feuilleter frénétiquement les pages de l'ouvrage qui étaient sèches grâce au sac à dos imperméable. « Guérison ». Je me suis stoppée net sur ce titre avant de parcourir du regard les textes qui parlaient de végétaux magiques aux propriétés curatives. « Fleurs Espinis ». C'était ce que Maïwen avait utilisé pour soigner Liam et Shenyou des blessures infligées par le dragon. J'ai sorti toutes les potions du sac avant de hurler :

Les pouvoirs de la lune obscureOù les histoires vivent. Découvrez maintenant