Chapitre 11 : "Ma petite" 💙

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PDV Aylan

Je rentre chez moi. J'ai un petit sourire aux lèvres. Moi, le bad boy au cœur de pierre, je suis amoureux. Qui l'aurait cru ?

-Bonsoir, Mafalda.

-Bonsoir, monsieur.

Mafalda est notre employée de maison. Je la connais depuis que je suis tout petit. Comme à son habitude, elle m'a préparé un gouter : des pancakes et du jus d'orange. Je m'affale dans le canapé et regarde un peu la télé. Mafalda cuisine en chantant une chanson en espagnol.

Mes parents adoptifs ne sont jamais là et c'est bien dommage. J'aimerais pouvoir leur parler de ce que je vis en ce moment. Ils m'ont gâté, m'ont couvert de jouets, m'ont offert des vêtements chers, des voyages, une console hors de prix que j'ai bousillé, ils m'ont pris sous leur aile mais ils ne sont jamais là dès que j'ai besoin de me confier. Ils n'ont pas pu combler ce vide que je ressens en moi.

Je m'assieds en tailleurs sur mon lit. Je tire les rideaux et mets mon CD dans le lecteur, un disque de Tchaïkovski (j'ai une passion secrète pour la musique classique). Je me roule un joint. Je m'allonge, ferme les yeux et inhale la fumée. Aujourd'hui, je ne veux plus penser qu'à Feriel. Mon petit ange. Cette douce jeune fille tombée par hasard dans ma vie. Avant elle, des nanas, j'en ai connu des tas. Mais elle, elle est différente. Elle n'est pas superficielle, elle est drôle, elle essaye toujours d'être gentille et d'aider les autres. Malheureusement, elle est naïve et me parait encore très enfantine. Mais j'aime ces longs moments où on discute, rien qu'elle et moi. Elle m'écoute sans me juger. Elle m'aime, moi et pas seulement cette image de délinquant, de beau gosse rebelle qui me colle à la peau. Quand je suis avec elle, j'ai l'impression d'être un mec bien. Il faudrait que je change, que je m'améliore. Rien que pour elle.

Je me revois petit garçon tremblotant. Je suis arrivé en France à dix ans. J'étais encore, frêle, maladroit et timide à l'époque. J'avais peur de tout. Je portais des chemises trop grandes, j'avais un accent kabyle, je devais améliorer mon français et les mômes de mon école huppée se moquaient de moi. Ils me renvoyaient en pleine face le fait d'être un enfant adopté, un orphelin, si différent d'eux. Parfois, je les cognais. J'avais beau être petit, ça ne veut pas dire que j'étais faible. On a commencé à m'envoyer chez le psy. Avec Feriel, j'ai l'impression d'être à nouveau ce petit garçon.

A douze ans, j'ai fumé mon premier joint. J'ai rencontré des dealers et ils m'ont entraîné. A quatorze ans, j'avais déjà un bon petit business devant moi. Je me suis dit que plus jamais personne ne devait m'embêter. Durant toute ces années, je me suis forgé une carapace. Je rackettais les plus petits. Une fois, j'ai même attaqué un mec avec des ciseaux parce qu'il m'avait insulté. J'enchaînais les conquêtes, je sortais avec des filles qui ne me plaisaient pas vraiment, je copinais avec des gars qui me dégoutaient. Mais j'étais enfin respecté. Et puis, mes parents ont trouvé les billets que j'avais caché dans des gants, dans des boîtes à chaussures, dans mes tiroirs. J'ai été chez le juge. Plusieurs fois. J'ai été dans des centres. Je m'échappais et je continuais à dealer. Les psys, les parents, les profs, je désespérais tout le monde. Mes parents adoptifs s'en veulent. J'aurais dû passer le bac, devenir médecin ou avocat, travailler dur, être un bon fils comme mon grand frère.

Ils ont étés absents durant toute mon enfance et ma petite adolescence et c'est seulement maintenant qu'ils tentent de rattraper le temps perdu ! Je leur en veux, je les déteste, je les méprise ! Ils adoptent des enfants et ensuite, ils n'assument même pas leur rôle de parents ! Ils croient pouvoir acheter mon amour avec leur satané fric ! Ils vont encore rentrer, nous allons manger ensembles et ils vont jouer à être une famille heureuse. Comme d'habitude. Ils vont parler du foot, de la vente de charité, de leurs congrès internationaux.

Voilà, au début, beaucoup d'entre vous, se sont imaginés qu'Aylan ne pensait qu'au sexe, qu'il était forcément mauvais, qu'il allait lui faire du mal, voire même la violer ou qu'elle allait tomber enceinte. Je voulais qu'au début, on s'imagine que c'est un gros cliché puis qu'on le découvre progressivement. J'espère que ça vous plait. Progressivement, on va découvrir son passé, ses secrets.

Je vous remercie aussi tous et toutes (surtout toutes) pour les plus de 200 votes.

Que pensez-vous de cette partie sur Aylan ?

Je vais aussi poursuivre de son point de vue la prochaine partie.


Ma sœur est sous empriseOù les histoires vivent. Découvrez maintenant