Chapitre 2. Désillusion.

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« Je rêvais d'un autre monde où la Terre serait ronde, où la lune serait blonde et la vie serait féconde. Je dormais à poings fermés, je ne voyais plus en pied. Je rêvais réalité. Ma réalité. » - Un autre monde, Téléphone.

Point de vue de Gabriel.

Deux semaines plus tard.

Tous les yeux sont braqués sur la télévision. D'une minute à l'autre, le destin de la princesse sera scellé et par la même occasion, le nôtre aussi. Tragiques Destinées, la nouvelle série B en vogue, un douteux mélange entre une piteuse Telenovela et un énième épisode des Feux de l'Amour. Rien de si attrayant en somme, mais en réalité, je crois que je prends goût à la télé poubelle.

Merde alors, je deviens un abruti.

Après un suspense interminable durant lequel la caméra n'a cessé de faire des gros plans sur chacun des personnages, le verdict tombe. Triomphant, je grimpe sur la table basse en mimant des célébrations victorieuses, pendant que mes amis me maudissent de leur regard assassin.

— Aboulez le fric les potes !

— Mais tu fais partie de l'équipe technique ou quoi ? Comment t'as su ? Y'a pas moyen que je te file un rond pour ces conneries.

— Ça faisait partie du deal, Léon. T'as parié, t'as perdu, tu payes.

Mécontent, le blondinet me balance son billet de cinq euros au visage.

— L'amour, c'est de la merde, râle Alba, affalée dans le fond du sofa.

— Ouais, t'as raison. Allez, envoie l'argent.

— T'arnaques ta propre sœur, t'as pas honte ?

— Aucunement. Je t'avais dit qu'elle le planterait à l'église, t'avais qu'à me faire confiance.

À son tour, elle capitule, ne pouvant s'empêcher de me glisser un petit « enfoiré » au passage. La loyauté n'est clairement pas une qualité qui l'étouffe.

— Oscar...

— Oh non, pitié Gab, c'est le seul argent liquide qui me reste pour aller m'acheter un paquet de clopes.

— Pas mon problème, t'iras retirer. Ah non, mieux, tu n'as qu'à arrêter de fumer. Vois ça comme un signe du destin. Depuis le temps que tu dis que tu dois le faire, c'est le moment. Fonce ! Je crois en toi.

Allongé sur le tapis, mon colocataire lève les yeux au ciel et finit par se soumettre comme les deux autres. Je passe pour un rapiat, mais au moins, j'obtiens gain de cause. Les bons comptes font les bons amis, comme on dit.

Dans un claquement de porte, Romy déboule dans le salon, essoufflée. À force, j'en oublierais presque qu'elle n'habite pas ici. Au final, elle vit plus dans notre appartement que chez elle. Ce n'est pas pour me déplaire, elle n'est pas dérangeante. Elle est de bons conseils, elle rit à mes blagues et cerise sur le gâteau, elle sait apprécier ma musique.

— J'ai loupé quelque chose ? se renseigne-t-elle et déposant ses avant-bras sur l'appui-tête du canapé.

— Ma victoire.

— Et merde.

Sans se faire prier, elle me plaque un billet sur le torse que je m'empresse de saisir, glorieux.

— Tu regardes l'autre épisode avec nous ? demande Oscar en direction de sa jumelle.

— Non, je dois assurer la caisse, ce soir. Le dernier Marvel est sorti, ça risque d'être blindé de monde.

Harmonie (SOUS CONTRAT D'ÉDITION)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant