XII. Opération

12 1 0
                                    

L'hôtesse me regardait avec un regard mêlé de pitié et de dégoût. Je ne voulait pas affronter ce regard, je mis ma capuche et suivi mon père dans une salle d'attente.

Et tout les gens levèrent leur tête vers nous. Tous me fixaient. Un petit garçon me fixait et chuchotai pas très discrètement à sa mère :
- Oh, regarde la fille ! Elle s'est fait attaquer par un chien ?

Je baissai la tête, et m'assis. Je n'avais pas lâché la main de mon père. D'ailleurs, tout le monde devait le prendre pour mon ami ou mon frère tellement il avait l'air d'un enfant avec son corps maigre. Je m'en foutait royalement.

On nous avait donné un numéro.
« 258, blessure à l'arme blanche »

Arme blanche.
Comment ça s'était passé ?
Allez, essaie de te souvenir...

Je mis ma tête dans mes genoux, je mourrais de honte devant tout ces gens. Le petit garçon me fixait, je pouvais sentir ses yeux sur moi. J'avais arrêté de pleurer.
Mon père serrait ma main très fort. Il me chuchota :
- Assieds-toi correctement.

Je me redressai en gardant ma capuche sur ma tête, ce qui cachait mon visage au maximum de personnes. Par contre, en face de moi, des gens me regardaient furtivement. Il y avait la femme et son gosse qui essayait de le faire taire et me souriait poliment, un homme qui avait un bandage à la cuisse qui était en conférence téléphonique, et...
Un garçon étrange. Il avait environ dix-huit ans, des cheveux rouges aux racines noires, des yeux rouges, la peau pâle et des mains fines aux doigts longs. Il portait un ensemble de smoking très classe, qui faisait contraste avec ses piercings noirs aux oreilles, aux lèvres et ses multiples bagues noires aux doigts.
J'étais mal à l'aise car il me fixait et il y avait quelque chose dans son regard qui me brulait. On aurait dit que dans ses yeux rouges des flammes dansaient.
J'avais chaud d'un coup, mais il était hors de question d'enlever mon sweat.
Il continue de me fixer.
Qu'est ce qu'il me veut ?

Arrête de le regarder et il arrêtera.

Il me fixe.

Il jouait sur des touches invisibles avec ses longs doigts fins. Je trouvait qu'il avait de belles mains.
Arrête de le regarder.
Il me fait peur je crois.

Mon père se leva, m'entraînant avec lui.
- On nous a appelé.

En sortant de la salle d'attente, je pouvait sentir le regard du garçon me suivre. On traversa un couloir et entrâmes dans un bureau. Une femme en blanc serra ma main puis la main de mon père.
- Bonjour, je suis le docteur Laureen Kaph. Dites-moi ce qu'il s'est passé.
Elle me fixait. Je balbutia:
- Je.. euh..

Mon père lui raconta donc encore une fois cette histoire. Je détournais le regard.
Elle me sourit en me disant :
- J'ai besoin de ta version aussi, si tu veux bien m'expliquer.
Je baissai la tête.
- aujou... ce matin... je...
allez, parle !

- Ne t'inquiètes pas.
Tu te rappelles Aphnae ?
Tu te rappelles ?
Non! Laisse moi,
laisse moi.

- Ce matin je me suis réveillée... avec... le visage plein de sang... et... j'ai...

- Qui t'as fait ça ? C'est toi ? Un animal ?

- Non... je ne sais pas... c'est pas moi..
C'est pas moi !

- D'accord...
Elle avait l'air de douter de quelque chose.

- Je vous jure que c'est pas moi.

- D'accord, d'accord. Viens t'allonger.
On changea de salle et elle m'installa sur un lit qui ressemblait à un lit d'hôpital, pas à un lit de médecin.
Respire, c'est normal, on est aux urgences.

Je m'allongeai et je vis la femme parler à mon père un peu en retrait. Elle lui faisait remplir un papier.
Je suis sûre qu'il lui parle de Baihen.
Quel traitre !
Tu devrais le détester.
Non! Laisse moi.

Elle s'approchai de moi, enlevai les pansements que j'avais mis n'importe comment, j'avais mal. Je me mordait les lèvres pour ne pas lui montrer. J'avais envie de lui dire « vous voyez, c'est pas grave, je peux m'en aller » mais bien sûr je n'ai rien dit.
Après avoir regardé mes blessures dans le moindre détail, elle me dit avec un visage rassurant :
- Écoute, on va t'emmener en salle d'opération pour te recoudre. » En voyant ma tête apeurée, elle ajouta : « Ne t'inquiètes pas, mais il faut que tu comprennes que ce que tu a fait est profond et il faut refermer la plaie ou ça mettra trop de temps à cicatriser. »

- Mais ce n'est pas mo-  Aïe !

Elle m'avait planté une seringue dans le creux de mon bras et je me senti étrangement apaisée, tout me semblait parfait. Je pouvais bien me faire recoudre ces blessures non ?
(( Il ne sont pas là pour m'interner. Je suis parano ))

Des infirmiers m'emmenèrent en salle d'opération et juste avant d'y entrer, je crus voir  du coin de l'oeil l'homme au smoking de la salle d'attente dans le couloir, me sourire. Sûrement mon imagination.

Un homme, sûrement le chirurgien, me fis respirer un gaz et je m'endormis.
Tu n'aurais pas dû le laisser t'emmener.

« Il ne vont pas
m'interner,
il veulent..

aider les
gens alors...

pourquoi ils
voudraient faire...

ça ? »



~~~~

Je m'éveillai, le regard flou, les pensées brouillées.
qu'est-ce qu'il s'est passé ?

J'ouvrit les yeux et mon regard devint net. J'étais dans une chambre toute blanche, sur un lit d'hôpital. Mon père était assis à côté de moi. Voyant que j'étais réveillée, il se rapprocha.
- Ça va ? Comment tu te sens ?

Je me souvins des événements de ce matin. J'étais soulagée de voir mon père près de moi.
- Ça va... je crois...

Je levai ma main vers mon visage pour toucher mes cicatrices. Mon père l'arrêta.
- Il ne faut pas encore toucher.

Je sentais que mon visage était tendu, mais je n'avais pas mal du tout. Ils m'avaient anesthésié.
- ...C'est comment ?
Mon père me répondit avec un regard apaisé :
- Ils ont fait ça bien, ne t'en fait pas.

- Ah... c'est bien...
Maintenant on peut partir ?
Allez sors,
s'il te plaît.

- est-ce qu'on peut partir ?

Il eut un regard embêté.
- Non, le docteur Kaph va venir faire le point.
- Ah... d'accord. Et après on part ?

Il sourit.

- Oui, évidemment.

évidemment ?
j'ai eu tellement peur.
Pour rien.

tu es ridicule, Aphnae, ridicule.

The Scanns Theory Où les histoires vivent. Découvrez maintenant