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  J'ouvre difficilement les yeux. Un coup d'œil sur mon réveil m'indique qu'il est 11 heures 56. D'habitude je ne me réveille jamais aussi tard.

  Je m'étire en bâillant et me dirige vers mon armoire. J'abandonne le t-shirt taille L et le short de volley qui me servent de pyjama pour un sweat trop large et un jean. Mon style vestimentaire est bien la dernière chose dont je me préoccupe ces temps-ci.

  Je me surprends à me regarder dans le grand miroir, accroché à la porte de la penderie. Mes cheveux bouclés n'ont jamais été aussi emmêlés. J'ai des cernes et l'air fatigué. Je soupire avant de de fermer l'armoire, faisant disparaître le miroir par la même occasion, et descends vers la cuisine.

  Je me sers un peu de céréales et ouvre la porte du frigo pour attraper la bouteille de lait, en constatant au passage qu'il va falloir, très prochainement, que je me rende au centre commercial. Je n'ai presque plus rien.

  C'est la première fois que je vais sortir de chez moi depuis que je suis rentrée à pieds du centre-ville, après l'accident. Et je n'aurai jamais cru que ça me ferait peur à ce point.

   Qu'est-ce que je vais trouver dehors ? Dans quel état se trouve le monde à l'heure actuelle ? Et si je croise des gens que je connais là-bas ? Et si j'en rencontre qui n'ont pas de bonnes intentions ?

  Trop de questions se bousculent dans ma tête. Et je n'ai aucune réponse.

  Je me lève et jette le contenu de mon bol. Les céréales imbibées de lait produisent un bruit sourd quand elles atterrissent au fond de la poubelle. Étrangement, je n'ai plus faim.

⚫ ⚫ ⚫

  Je laisse mon vélo contre le mur de la petite rue, dans laquelle on avait l'habitude de boire nos granités avec Juliette et Ethan, derrière le centre commercial. J'ai beau habiter à moins de cinq cents mètres de là, je n'ai pas eu la force d'y aller à pieds. Dire que je n'ai pas eu le courage serait plus juste.

  Sur le chemin, j'ai aperçu les panneaux qui menaient à tous ces endroits qui m'étaient familiers avant l'apocalypse. La supérette dans laquelle j'ai travaillé cet été, mon lycée, le café du centre, Honey, le parc...

  Après avoir fais le tour du grand parking, j'arrive devant la porte principale. Arrachée de ses gonds, elle a été négligemment jetée sur le sol dur. J'aurai dû m'y attendre. Inconsciemment, je retiens ma respiration, à l'affût du moindre bruit, du moindre chuchotement, du moindre mouvement qui pourrait trahir une présence humaine. Rien.

  Je pose un pied à l'intérieur, sans aucune once d'assurance. Ma Jordan se pose sur le carrelage, au milieu des débris de verre, qui ont dû se retrouver là quand la porte a été enfoncée.

  Je m'avance entre les caisses, en me maudissant d'être venue ici sur un coup de tête, sans prévisions ni protections. En parcourant les rayons, je me rends compte que ceux qui sont passés par là avant moi n'ont rien détérioré à par la porte.

   Les produits semblent en place, il manque seulement un ou deux articles à droite à gauche. Ça me surprends avant que je me rende compte que, qui qu'ils soient, ils n'ont aucun intérêt à dévaster le seul accès aux réserves d'eau potable et de nourriture de la ville.

  Je me rends au rayon surgelé. Première règle : privilégier les denrées non périssables de toute façon. J'ouvre mon sac à dos et y dépose plusieurs boîtes de steaks hachés, et des sacs de légumes congelés, que je me promets d'essayer de manger en entier.

Juste avant la fin du monde Où les histoires vivent. Découvrez maintenant