Acte 3 - Le coup monté

1.8K 66 59
                                    


C'est l'heure de permanence obligatoire. Sophia n'a toujours pas daigné m'adresser la parole. La Taupe, le surveillant passe dans la rangée pour vérifier que chaque élève effectue bien son travail personnel. A côté de moi, sa voix stridente me fait sursauter.

- Jeune homme ! Lâchez ces crayons-feutres tout de suite !

Gwenolé Schiappa, car c'est à lui que le surveillant s'adressait, relève son visage couvert de gribouillages de feutre. Je secoue la tête, désespérée.

- Filez tout de suite chez le principal !

- Mais monsieur ! Je dessine le programme d'Emmanuel Macron ! s'exclame-t-il, hilare.

Je ne peux pas y croire. Comment pouvait-il parler comme ça alors que mon père était la raison de la réussite de sa mère, Marlène ? Finalement, la Taupe, presque aussi choqué que moi, l'emmène hors de la pièce. 

J'entends Pierre et ses nouveaux amis ricaner au loin. 

- Ah ah ! il s'exclame. Bien dit, mec !

Je me tourne vers lui.

- Mais c'est quoi ton problème ? lui lancé-je.

- Oh, j'pensais pas qu'une princesse comme toi était capable de me tenir tête comme ça... dit-il, moqueur, en mordillant un stylo. 

Un stylo... Mon stylo ! 

- Et, mais c'est mon quatre-couleur ! Tu me ne l'as pas rendu ! m'exclamé-je.

- Tu le veux ? Il fait touner le stylo entre ses doigts avant de le replacer entre ses lèvres. Alors va le chercher !

Oh mon dieu ! Je rougis, devant les yeux de toute la permanence, rivés sur nous. Je baisse la tête, extrêmement embarrassée, essayant de me reconcentrer sur mon travail.

A la sonnerie, je cours me réfugier aux toilettes, n'ayant pas envie de croiser les regards moqueurs de mes camarades. Je me regarde dans la glace, mes cheveux sont en bataille. Je m'apprête à sortir ma brosse de mon sac, avant de réaliser qu'il n'est pas avec moi. Je l'ai oublié en étude ! 

Vite, je me dirige vers la sortie, en espérant que la permanence soit toujours ouverte. Mais un groupe de filles me barre la route. Je les reconnais : ce sont les populaires, toutes trop maquillées et habillées vulgairement. Je ne les aimais pas. Peut-être étaient-ce mes insécurités qui me poussaient à détester tout autre femme à l'aise avec leur corps... Enfin, elles sont très aguicheuses, quand même ! Une fille blonde et botoxée qui semble être leur leader s'avance vers moi.

- Et toi, sainte Macron, si tu croyais que t'avais une chance avec Pierre, c'est mort. Il est à moi, compris ? Je les vois bien, vos petits regards, mais sache qu'il ne t'aime pas, il méprise les personnes dans ton genre !

- Euh, désolée, je bafouille, confuse.

Je me faufile entre elles et cours vers la salle d'étude. Mais, de quoi parlaient-elles, ces filles ? Jamais je n'aurais des vues sur un garçon comme lui ! Son magnifique visage me parcourt l'esprit... Je rougis. Non, jamais je ne sortirais avec Pierre !

J'arrive devant la porte de la permanence fermée. Oh non, comment vais-je faire ? Mais je vois Laeticia qui se dirige vers moi. Elle me tend mon sac. Je le prend.

- Merci, dis-je, étonnée.

- Oh, mais il n'y a pas de quoi, répond-elle d'un air sournois.

Son acte de gentillesse me surprend. Peut-être me suis-je trompée sur son compte. Après tout, il y a de la bonté dans chacun...

Mariée de force à un gilet jauneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant