Acte 2 - Une rencontre inattendue

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J'attends l'ouverture du portail devant le lycée. J'ai de gros cernes sous les yeux, je n'ai pas dormi de la nuit.  Au loin, je vois Sophia et Théodore. Il me fait un signe de la main, mais Sophia quant-à-elle semble ne pas me regarder. Cela m'attriste, j'aimerais tellement que mon amie redevienne comme elle était.

Ce matin j'ai éducation morale et civique avec Mme Poivra. J'adore cette matière, c'est celle où je réussi le mieux ! 

Je rejoins la salle. Je m'assieds au fond, ce matin, je veux être seule, même si mes amis me manquent.

La pièce se remplit peu à peu, et la chaise à ma gauche reste vide. La professeure arrive et commence le cours.

Pour la première fois de l'année je reste indifférente au cours passionnant de Mme Poivra.
Mon père va me marier. Je suis obligée de lui obéir, je n'ai pas le choix. Je n'arrive à réaliser ce qui va m'arriver. Dans quelques mois je marierai, à un homme que je ne connais même pas. Qu'ai-je fait à Dieu pour qu'il m'inflige cela ?

Laeticia , assise à quelques rangs de moi, me lance un regard méprisant. Elle prépare un mauvais coup.

"Corentin !" 

Je sursaute ! La douce voix de Mme Poivra me tire de mes rêveries... Celle ci était en train de distribuer les contrôles de lundi et se dirige vers un jeune homme aux cheveux roux, l'air totalement perdu.

"Aucune des compétences n'est atteinte Corentin ! Votre copie est nullissime "

"Ah ouais ? Bah pardon" 

Décidemment le pauvre garçon ne semble pas réaliser ce qui va lui tomber dessus. La professeure devient rouge de colère :

"Pardon ! Ne t'excuse pas auprès de moi Corentin !! Excuse toi envers tes parents, ENVERS L'EDUCATION NATIONALE !!! ENVERS TA PATRIE CORENTIN !!!"

Corentin, bouche bée, perd ses mots. Mme Poivra appuie ses paroles par des gesticulations de plus en plus violentes... 

Soudain, la porte s'ouvre. Un jeune homme entre dans la salle. Il est grand, musclé, et a des cheveux bruns décoiffés. Ses yeux bleus glacials parcourent les visages et s'arrêtent sur moi. Ils me fixent pendant ce qu'il me semble être une éternité. Je rougis : il est très intimidant. Je croise le regard de Théodore. Etrange, celui-ci semble tout aussi émoustillé que moi...

Il est accompagné par le CPE, qui regarde Mme Poivra d'un air perplexe mais n'ose pas poser de questions. Celle-ci, livide, s'essuie le front à l'aide d'un mouchoir aux motifs démodés :

"Oh- Je... Vous êtes là Pierre !"

Dieu merci, elle semble avoir recouvré la raison... La classe, tournée vers le nouvel arrivant, se questionne. Mais qui est ce fabuleux garçon ? La professeure s'éclaircit la gorge.

"Mesdemoiselles et messieurs, je vous présente un nouvel élève : Pierre. Celui-ci revient d'un voyage en Suisse avec sa famille, je vous prie de l'accueillir chaleureusement au sein de votre classe."

Une vague de compréhension parcoure la classe, et je remarque que le nouveau regarde Laeticia d'un air entendu. Décidemment, il y a déjà de l'alchimie entre ces deux là ! Humpf...

Pierre s'avance, ne sachant visiblement pas où s'asseoir... Je réalise que la seule place libre est la place juste à côté de moi ! Doux Jésus Marie Joseph, je sens mon coeur palpiter...

"Laurie ! lance la prof, Tu montreras tous tes cours à Pierre et tu l'aideras à rattraper son retard"

Le mystérieux jeune homme sursaute à l'annonce de mon prénom et me regarde intensément, je détourne le regard. Il s'assoit donc à mes côtés et lançe d'une voix rauque et ténébreuse :

" T'as pas une feuille ?

- Euh... si, si... Attends"

Je bafouille et lui tend une copie double.

"C'est tout ce que j'ai... Ahah j'ai utilisé ma dernière copie simple ce matin et mon chauffeur a oublié d'en racheter... Enfin je ne veux pas l'accuser de quoi que ce soit mais euh... Enfin tu m'as comprise..."

Je ris nerveusement. Oh non mais qu'est-ce qu'il me prend je suis vraiment ridicule... Je rougis de honte tandis qu'il hausse un sourcil et prenant ma feuille. Je redirige mon attention sur le tableau où la prof est en train d'écrire la définition de l'engagement citoyen. Je commence à écrire, mais je sens que son regard ne me quitte pas. Je me tourne donc vers lui, mal à l'aise. Il lance, l'air moqueur :

"Et tu crois que je vais écrire avec quoi ?"

Outrée par le ton qu'il emploie, je rétorque :

- Eh bien, peut-être aurais-tu pu apporter tes affaires !"

Je suis surprise par ma propre remarque. Il ricane, et continue de me regarder. Mon courage s'évaporant immédiatement, je lui tend mon stylo quatre couleurs.

Le cours se passe très lentement, je reste tendue et perturbée par la présence à mes côtés. Finalement, la cloche sonne et je m'enfuie presque de la salle pour ne pas avoir à recroiser ce regard hypnotisant...

"Attends, Laurie !" C'est la voix de Théodore, les cheveux aux vents, il court derrière moi un livre à la main.

Je m'arrête, souriant, je n'avais pas parlé à mon ami depuis longtemps !

"Théodore ! Comment ça va ?

- Ca va, ça va, j'ai vu que tu t'étais disputée avec Sophia !"

Je soupire : 

" Oui enfin... Ca va s'arranger, j'espère... C'est quoi le livre que tu tiens ?"

Théodore me tend l'objet,

"- Ah ça ! C'est un super bouquin ! L'histoire est vraiment très intéressante ! Enfin... il y a juste un moment un peu gênant avec un personnage secondaire qui tombe amoureux d'un autre gars.

Il rit nerveusement.

- Et ça c'est... mauvais ?"

Théodore écarquille les yeux, il semble de plus en plus mal à l'aise.

"Enfin... les gays ils sont... bizarres..."

Je soulève un sourcil, n'osant rien dire.

"Je vois." Dis-je en levant les yeux au ciel. Toutes ces histoires ne me regardent pas !

"Bon j'y vais Théodore, mon chauffeur m'attend"

Je lui lance un dernier petit sourire et me dirige vers la sortie tachant de ne pas penser à Pierre...

Mariée de force à un gilet jauneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant