J'étais - encore une fois - dans la merde. Mais là c'était vraiment grave. Il devait être trois ou quatre heures du matin. Charity m'avait réveillé à deux heures et nous étions partis avec Lukas - heureusement, Lachlan n'était pas venu - vers les falaises. Visiblement, les aptitudes de Spiderman dont j'avais déjà fait preuve étaient la partie de mes pouvoirs que je maîtrisais le plus facilement, et donc celle que je devais exploiter jusqu'à comprendre comment faire tout le reste. A savoir, les tremblements de terre et faire pousser des plantes.
J'étais donc dans la merde, encore.
J'étais tétanisé à plusieurs dizaines de mètres au dessus du sol et en dessous du parking. Pile au milieu de la distance que - d'après Charity - j'aurai du parcourir sans soucis. Mais voilà : j'avais commencé au pied de la falaise. Ah oui, nous étions descendus sur une espèce de nuage mi glace mi brume que Charity avait dirigé jusqu'au sol. Je m'étais mis à grimper. Le début avait été simple, j'étais plutôt sportif et j'aimais escalader. J'avais même senti que mes paumes adhéraient particulièrement bien à la roche et que je n'avais pas de problème pour répartir mon poids ; je fatiguais donc très peu. Et puis j'avais eu cette idée stupide : regarder en bas.
Alors, je n'ai jamais eu le vertige. Mais j'ai réalisé que je n'avais aucun harnais, rien pour m'assurer que ce prétendu pouvoir. Alors, j'ai paniqué. Mes muscles tétanisèrent brusquement et pire que tout : mon pied droit dérapa, me laissant à trois appuis. Charity voletait toujours sur son petit nuage à quelques mètres de moi et me regardait, mi inquiète mi rassurante. Et puis Lukas lança un conseil qui vola péniblement jusqu'à mes oreilles.
-Enlèves tes chaussures !
Je tournais douloureusement la tête vers Charity, espérant un peu de soutien de sa part. Mais au lieu de l'air compatissant ou indigné que je m'attendais à trouver sur son visage, une lueur approbative illuminait ses - beaux - yeux.
-Il a pas complètement tort. Tu devrais être complètement en contact avec ton élément pour commencer.
-Il y a juste un petit problème, je ne peux pas bouger.
Elle haussa les épaules et s'approcha de moi en flottant. Je sentis ma basket droite glisser, elle fronça le nez avant de me jeter un regard sévère.
-Tu pourrais porter des chaussettes.
Ben ouais, pour faire du surf ça serait pratique ça.
Elle posa sa main sur ma cheville et me força à plier le genou pour ramener mes orteils au contact de la roche. Alors que je m'attendais à retrouver la fraîcheur qui paralysait mes doigts crispés sur la pierre, la sensation que me renvoyèrent mon pied était chaude et douce. Presque vivante. Je transférais lentement une petite partie de mon poids sur mes doigts de pied. Aucun prémisse de dérapage quelconque. Je testais d'avantage mon appui. Mes orteils étaient comme collés à la paroi. Je relâchais lentement la prise de ma main droite et appliquais ma paume à plat contre la roche. De nouveau, cette sensation de chaleur et d'adhésion pure et dure. Je m'enhardis et basculais une partie de mon poids en arrière. Ma paume était tellement accrochée à la pierre que mon épaule ne tirait même pas, comme si la roche absorbais une partie de ma masse pour me ventouser à elle.
C'est à ce moment que je décidais de tout lâcher. En l'occurrence, ma main gauche. Mon genou droit vint naturellement cogner la falaise et y resta accroché, je sentis à travers le jean la roche aspirer une partie de mon poids et décoller mon pied gauche pour laisser tomber ma basket ne fut plus un soucis. Déplacer mes appuis les uns après les autres le long de la paroi devint rapidement un jeu d'enfant et je trouvais même grisant de prendre de la vitesse, laissant tout loisir à chaque parcelle de ma peau de successivement s'agripper et s'éloigner de la falaise.
J'étais le nouveau Spiderman. Ce qui était vachement cool.
Plutôt vache que cool, ce fut mon apprentissage de mes autres pouvoirs. Après avoir passé une heure à regarder en vain une micro pousse sans que rien ne se produise, je fis jaillir un arbre sous les pieds de Lachlan alors qu'il lâchait un rire moqueur en voyant mes efforts. Bon, un petit arbre mais quand même. Quant aux tremblements de terre, ma plus grande réussite fut la création d'un trou profond de cinquante centimètre dans le sable sur la plage.
Mais quand la semaine fut écoulée, j'acceptais de rester avec eux. Et nous avons plié bagage dans la demi heure.
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There were four of us
ParanormalMatt & Charity. Non, ce n'est pas une histoire d'amour. En fait, c'est à cause d'elle que ma vie n'a plus rien de normal. Et que je suis devenu extraordinaire.