Passions

29 ~ Elinore

C'est la peur au ventre et les mains moites que je franchis les portes du lycée.

Depuis que je suis parti de chez Armand, mercredi, en fin d'après-midi je ne fais que cogiter. Je me demande quelle sera sa réaction en me voyant après ce qu'il s'est passé entre nous. S'il sera distant, s'il regrettera ou si au contraire il sera si démonstratif que ça en deviendra oppressant - même si cette situation est peu probable.

Le jeudi matin j'ai maths en première heure. Avec Armand. Ça ne m'enchante pas vraiment. J'aurais préféré avoir un peu plus de temps. Enfin je ne sais pas : si j'avais eu plus de temps je l'aurais passé à m'imaginer des tas d'autres situations improbables. Plus contradictoire que moi vous mourrez...

Tandis que je me dirige vers un banc, dans le fond de la cours j'entends quelqu'un derrière moi. Louis m'apostrophe en levant le bras.

Louis est vraiment adorable avec moi. J'ai mangé avec Marie et lui tout le début de semaine. Et il m'a fait promettre de me joindre à eux dès que je le pouvais. Au départ, j'appréhendais la réaction de Marie mais elle a été très accueillante et j'ai envie de croire que je me suis fais des amis.

C'est vrai que j'avais promis de ne pas nouer quelques relations qu'il soit. Mais j'avoue, égoïstement, que cela me fait du bien. Ça me permet de penser à autre chose. De ne pas pensée qu'a moi et mes problèmes.

- Salut Eli !

- Salut.

Louis s'approche de moi et me claque la bise. Je suis surprise, mais ne laisse rien paraître. Nous nous asseyons sur le banc. Je ne vois pas Armand.

- Comment ça va depuis hier ?

Hier. Louis n'est pas au courant de ce qui est arrivé. Comment je vais ? Eh bien, j'ai un énorme bleu au niveau de l'estomac qui me fait mal quand je m'assieds et puis j'ai encore le visage tuméfié.

- Oh ! Qu'est-ce qui t'es arrivée au visage ? s'étonne-t-il en avançant sa main vers ma joue égratignée.

Automatiquement, je me décale avant que sa main ne me touche. Louis, comprenant le message, laisse retomber son bras le long de son corps.

Étonnamment, il ne cherche pas à comprendre et enchaîne sur un autre sujet. C'est aussi pour ça que je leur suis si reconnaissante : Marie et son copain ne sont pas des commères qui s'intéressent à moi seulement pour connaître les moindres détails de ma vie. Avec eux je ne suis pas contrainte de traînée derrière moi mon passé et de recevoir des regards emprunt de pitié chaque fois que les accidents de voiture ou la danse sont mentionnés. Avec eux je peux être quelqu'un d'autre, une nouvelle moi.

- Tu sais, je crois que Marie commence à se douter de quelque chose.

Je tourne la tête vers lui - enfin je lève la tête si on tient compte de sa taille - et fronce les sourcils.

- Pour les cours d'anglais, complète Louis.

- Ah. Et c'est grave ?

- Eli... Je vais passer pour un boulet, geint-il comme s'il était au bord de l'agonie.

Je suis un peu dépitée de ne pas comprendre ce qu'il ressent et de ne pas pouvoir l'aidé. Quoique je pense savoir comment je me sentirais si j'avais honte devant Armand. Je serais sans doute obligé de déménager une nouvelle fois.

Par je ne sais quel miracle, Marie nous rejoint à ce moment-là, m'évitant le rôle de piètre conseillère.

- Hey ! nous salue la petite brune et son habituelle énergie.

Avec son attitude chaleureuse et sa constante bonne humeur, elle me fait un peu penser à moi, avant, mais en mieux.

- Vous parliez de quoi ?