13. L'avortement

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Après en avoir parlé à l'infirmière scolaire, elle m'a alors parlé de l'hôpital de Doullens qui le pratiquait. Elle s'est chargé de tout. Moi je n'avais plus qu'à me rendre au rdv le mardi avec un gynécologue.
Elle m'avait bien expliqué en revanche qu'ils étaient assez "pro-vie" et que donc si j'étais sur de mon choix, ne pas me laisser influencer, refuser d'écouter le cœur qui pouvait me faire changer d'avis etc...

Entre temps, ma mère a vite été au courant. J'avais mes règles en même temps qu'elle normalement et elle avait bien vu que je n'avais pas utilisé de serviettes hygiénique. Elle a commencé à me poser des questions jusqu'au vendredi où elle m'a dit qu'il fallait que je fasse un test. Je me souviens encore de notre conversation dans la voiture ce jour :

Elle : "Tu as eu tes règles ?"
Moi : " Non toujours pas..."
Elle : " Il va peut être falloir que tu fasse un test."
Moi : " Ça y est c'est fait..."
Elle : " Et ?"
Moi : " Il est positif..."
Elle : " Et qu'est ce que vous comptez faire ?"
Moi : " On a décider de ne pas le garder..."
Elle : " Je pense que c'est la meilleure des décisions."

Finalement, elle l'avait plutôt bien pris. Est-ce parce que j'ai parlé avortement ? Je n'en ai réellement aucune idée. Mais contrairement à ce que je pensais, je ne me suis pas faite incendier ce soir là.

Nous nous sommes donc rendus au rendez-vous avec Wesley. J'ai fais cette échographie et je n'ai pas pu m'empêcher de regarder sur cet écran ce si petit être qui n'avait rien demandé à la vie.
Puis on est passé de l'autre côté et il m'a donné deux rendez-vous. Le premier le lundi à 8h pour les premiers cachets et le second le mercredi à 9h pour les derniers cachets.
On avait donc une semaine de réflexion.
On a du passer par une psychologue juste après ce rendez vous. Je pensais qu'on allait parler de ça, qu'elle allait nous demander comment on se sentait face à tout ça mais non. On a juste eu le droit à une leçon de morale et une explication sur comment mettre un préservatif suivi d'un cours sur la conception. Comme si ça allait nous aider. On en est sortis encore plus décomposés qu'autre chose. Parce qu'en réalité ce bébé il était plus que désiré. Ça faisait des années qu'on en parlé. Il est juste pas arrivé au bon moment. C'était donc à contre cœur qu'on avait choisi cette décision.

La semaine de délais est passé, ma mère m'a amenée à ce premier rendez-vous. C'était tellement morbide... J'ai pris ces 3 cachets et bu mon verre d'eau et je suis retournée en cours.

Puis le mercredi est vite arrivé. Je suis arrivée à 9h comme indiqué sur ma convocation et on m'a d'abord installée sur un banc dans le couloir avec Wesley. Dans la chambre juste à côté se trouvais une dame certainement en train d'avorter elle aussi.
On m'a donné mes deux derniers cachets et on m'a dit de les prévenir si j'avais envie d'uriner et de leur dire si j'avais du sang pour qu'on puisse ensuite me renvoyer chez moi. A cet instant je me suis sentie seule. Et aucunement soutenue par l'équipe médicale qui en avait littéralement rien à faire de moi puisqu'on à fini par me mettre dans une chambre. Celle à côté avec cette dame assise elle aussi. Puis une 3ème personne est arrivée dans un lit. Elle semblait avoir accouchée. On a fini par nous virer de cette chambre comme des malpropres. C'est comme ça que je l'ai ressenti en réalité. J'étais tellement mal...
Wesley a fini par partir travailler et ma mère est arrivée pour prendre le relais. J'avais quand même cette chance d'être entourée par mes proches.
Je me suis rendue aux toilettes et j'ai entendu comme un quelque chose tomber, puis quelques gouttes de sang. Je leur ai donc dit et on m'a renvoyer chez moi. Je croyais que tout était fini. J'avais d'horribles douleurs au ventre. Des contractions. Chose inconnue pour moi. Puis ma mère m'a emmener manger au Mc Do. On a pris notre commande mais à peine assise, j'ai senti une grosse masse sortir de mon vagin. Je me suis précipitée aux toilettes, j'ai abaissé mon pantalon et cette grosse culotte remplie de sang dans laquelle se trouvais une boule d'environ 5cm. C'était le bébé. Le bébé entier, encore dans sa poche avec le liquide amniotique. Je l'ai vu ce bébé presque formé avec sa tête, ses yeux, ses bras, ses jambes et ses doigts en orteils en formation. Il est sorti de mon corps et j'ai réalisé à quel point j'étais monstrueuse d'avoir fait une telle chose ! Le ciel s'est écroulé sur ma tête. La sensation de recevoir un gros coup de marteau. C'était fini... J'avais encore ce petit espoir au fond de moi qu'il s'accroche malgré tout. Et moi j'étais là. J'avais tout gâché. Je venais de tuer mon bébé. Après le décès de mon père où j'avais eu l'impression d'avoir perdu une partie de moi, je vivais une fois de plus cette sensation. Mais cette fois je perdais réellement une partie de moi. Cette partie qui se trouvais à l'intérieur de moi et que je n'ai pas pu protéger. Je me sentais sale. Seule.

Ma mère à fini par me rejoindre en me demandant si ça allait. Je me rappele lui avoir dit :

"Ça y est... C'est fini."

En larmes. Et la j'ai du prendre la décision la plus terrible de toute ma vie. Que faire de ce bébé ? Je n'ai pas voulu le jeter dans la poubelle. Trop peur qu'on le retrouve, qu'on en parle dans les journaux etc... Alors je l'ai emballé dans du papier et je l'ai déposé dans les toilettes. Pour finir par tirer la chasse d'eau. C'était horrible je sais. Et croyez moi je ne m'en remettrais jamais mais après tout, que faire dans cette situation ? Qui est le moins humain dans l'histoire ? Est-ce que l'hôpital a sa part de responsabilité ? Est-ce qu'ils n'aurait pas du me garder jusqu'à l'évacuation complète ? Est-ce qu'ils n'auraient pas du faire ça par aspiration plutôt que par médicaments ? Selon mes dernières règles, ce jour j'étais déjà à 8 semaines d'aménorrhée plus 3 jours.

Écorchée ViveOù les histoires vivent. Découvrez maintenant