Chap 22. Les recherches secrètes

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L'aérogare Citrine était connue sur Plombor pour ses charmantes mosaïques jaunes.

En soit le bâtiment n'était pas large ou imposant, à peine plus épais qu'une gare ordinaire au milieu des terres de l'arche, mais elle avait surtout un nombre incalculable de quais de décollage et d'atterrissage. Étant le point d'ancrage du commerce interfamilial, les dirigeables et les aérostats s'y rendaient en banquet par dizaines, ce qui en faisait aussi un excellent endroit à attaquer.

Yish'mael l'avait bien compris. Ce salopard.

Hyacinthe et Calypso laissèrent le pétale face aux marches devant les grandes entrées. En arrivant dans le hall, une petite foule inquiète les attendait. Un petit homme à larges moustaches, bonnet d'aviateur et lunettes grossissantes les accueillis. Le chef des employés.

  - Montrez-nous ce que vous avez trouvé, ordonna la rouquine à sa place.

  - Bien sûr, c'est par ici, dans l'entrepôt !

  - Vous y avez touché, quelque soit cette chose ? demanda Hyacinthe.

  - Non, nous vous avons prévenu sur le champs.

  - Bon travail, commenta-t-elle à leur égard.

L'entrepôt n'avait rien d'extraordinaire avec ses réserves d'hélium, ses cordages de rechange, ses sacs de sable, ses pièces de machinerie de secours. Rien d'inquiétant. Malheureusement, on la prévenait rarement pour rien. Au centre, un vieux plafonnier grésillant pointait une chaise droite et dessus trônait un livre illustré pour enfants. Ça sentait le traquenard à plein nez.

  - Que comptez-vous faire ? chuchota Calypso.

Hyacinthe garda avant tout son calme.

  - Vous allez faire sortir tous les employés et les oisillons en-dehors de l'aérogare, je n'ai pas besoin d'une catastrophe. Protégez-les.

  - Mais et vous, ma Lady ?

  - Je m'en sortirai, exécution Caly, je te laisse la situation bien en main.

La rousse acquiesça, sortit discrètement de l'entrepôt avec l'homme et referma à peine derrière elle. Hyacinthe en profita pour respirer, se concentrer.

Lentement, prudemment, elle s'approcha du cœur du plan. Elle le sentait terriblement mal cette affaire. Le livre était vieux, les couleurs ternies, la couverture cornée.  Hyacinthe leva un sourcil et ramarqua qu'il y était fadement inscrit : "Le besherelle de l'obéissance divine". Elle grimaça, Yish'mael et son humour douteux pouvait bien aller se faire foutre.

Le plus délicatement possible, elle ouvrit la couverture et elle s'attendait à tout, sauf un intérieur qui avait été découpé pour former un creux dans les pages, où y était glissé une boîte à musique minuscule. Merde.

Elle sortit l'objet, l'activa sans aucun son, pourtant le couvercle s'ouvrit en douceur sur un petit papier plié. L'entrepot devenait de plus en plus serré ou alors c'était ces tentatives d'échappatoires ou encore son estomac ? Elle reposa la boîte cassée et déplia le mot.

C'était là, que tout ne se déroula PAS comme prévu.

Hyacinthe déplia le papyrus et n'eut le temps de lire que du petit pâté d'encre : Les recherches secrètes [...]. Elle lut la suite, son regard valide s'écarquilla d'horreur mais ensuite, sa lecture dévia sur la boîte à musique qui venait de relâcher un nuage grisâtre. Trop tard.

Hyacinthe sentit un pivotement lui prendre la gorge, elle tomba à genoux et sa mémoire commença à lui jouer des tours. Elle lâcha le papier qui s'envola sous la brume toxique et s'évada dans l'obscurité.

La bras-droit ne pouvait plus réfléchir, plus elle essayait de se dire de ramasser le papier, plus elle oubliait. Quel papier finalement ? Elle oublia ce qu'elle avait appris sur le mot. Une information importante, terrible, qui avait disparu dans la poussière, sous les étagères. Un élément qui allait la briser. Un élément clef. Mais quel élément ?

Hyacinthe resta à tousser pendant dix minutes jusqu'à ce que la brume se dissipe. Alertée par son absence de retour, Calypso débarqua en courant dans l'enrrepôt éclatant les battants contre les murs.

  - Ma Lady ! appela-t-elle paniquée.

En l'aidant à se relever, Hyacinthe oublia autant la note, le danger que cette poudre horrifique.

  - Je vais bien, combla la belle androgyne, Samuel s'est bien foutu de nous, ce livre était une farce !

  - Pas de bombe ou autre ?

  - Non, rien, juste le sadisme de cet enfoiré de Tuteur.

Une fois debout, Hyacinthe passa une main dans ses mèches lapis-lazuli en coupe au bol et sur son visage, éprouvée. Elle avait l'impression de s'être prit un coup de poêle en plein faciès.

  - Citrine est sauve. Allez prévenir les cheminots.

  - Oui, ma Lady.

Calypso s'exécuta sans discuter. Hyacinthe avait l'impression de perdre quelque chose de trop important. Mais quoi ? De quoi parlait-elle déjà ? Il ne restait qu'un sentiment de malaise.

En revenant, son associée rapporta des employés en délire qui l'applaudissaient, la complimentaient pour le désamorcement quel qu'il soit de ce plan diabolique.

Ah.

Même si le plan de Yish'mael semblait terminé, eh bien... Il "semblait" juste. Bien que tout le monde l'acclamait, Hyacinthe avait un mélange de cendre qui se déposait su sa langue. Elle connaissait ce bâtard, elle le connaissait trop bien. Il lui avait arraché les bras, elle lui avait prit un oeil, ça créait des liens et elle était trop entêtée pour que ce soit si "facile".

Elle ne voulait pas être mauvaise langue. La machine était arrêtée, Citrine et ses employés sauvés ainsi que des centaines de marchandises et pourtant elle se sentait comme une victime avec la corde au cou. Ça ne pouvait pas être que... cet avertissement ridicule. Ou alors elle ne voyait pas les choses sous le bonne ordre ? Dans tout les cas, elle ne voulait inquiéter personne, mais elle n'allait pas baisser sa garde.

Elle avait l'impression d'essayer de jouer à "qui trouvera le fantôme" un jeu populaire sur l'arche de Viracocha et ça ne la faisait pas du tout rire.

  - Calypso, murmura-t-elle en laissant les autres à leur réjouissante

La rousse reprit immédiatement son visage professionnel, bordé d'inquiétude.

  - Ma Lady ?

  - Quelque chose cloche, confia Hyacinthe, je ne sais pas où, ni pourquoi, ni comment mais Samuel Martin n'a pas dit son dernier mot.

Son acolyte fronça les sourcils.

  - Vous êtes certaine ? Vous avez pourtant écarté le danger.

Vraiment ? Les longues jambes, les talons de Hyacinthe s'arrêtèrent sur le large perron de l'aérogare tandis qu'elles sortaient.

  - Certes, mais ce n'est pas suffisant. Je veux qu'on garde un oeil sur Citrine pendant les mois qui vont arriver, au moins jusqu'au mariage.

  - Bien sûr, ma Lady, vous pensez que Martin peut encore frappé ?

  - Je préfère prévenir que guérir. Et puis, ce type est comme une hydre, on lui coupe une tête, deux autres en repoussent.

Cela, par contre, elle en était bien certaine.

LADY HYACINTHE ━゙LA PASSE-MIROIR✔Où les histoires vivent. Découvrez maintenant