WRONG GIFT GONE RIGHT

Chapitre 8

La nuit précédant les funérailles de Laura, Stiles n'avait pas réussi à trouver un bon sommeil. Il avait dormi quelques heures mais avait été agité, il s'était tourné et retourné dans son lit espérant que Morphée vienne le cueillir mais son esprit était tiraillé par l'inquiétude. Derek lui avait demandé de le laisser seul avec sa nièce. Peut-être pour se prouver que malgré le chagrin il pouvait y arriver, il pouvait ne pas se laisser noyer dans la douleur comme la dernière fois qu'il avait fait face à un événement de ce genre. Mais le fait de ne pas savoir comment Derek allait, de ne pas savoir si il n'avait pas été dépassé par les événements ou ses émotions lui tordait les entrailles et l'obligeait aussi à faire face à sa propre douleur. Quand il était au loft, Stiles s'occupait de Derek et Louna, il les faisait passer avant lui, s'assurait que tout se passait aussi bien que possible au vues des circonstances, ce qui lui permettait de ne pas affronter sa peine. Mais là qu'il était seul dans sa chambre, il ne pouvait plus y échapper. La douleur l'avait rattrapé et tenait son coeur et ses entrailles d'une emprise à laquelle il ne parvenait pas à se libérer.  A plusieurs reprises, il se retrouva submergé par l'angoisse et le chagrin, la seule inconnue ici était de savoir à quelle émotion il allait succomber. Toujours là dans son lit, à la merci de tous ces sentiments, il avait plus d'une fois hésité à envoyer un message à Derek mais s'était ravisé de peur de le déranger. Lui venait de perdre sa grande soeur et avait ses propres émotions à gérer, il n'allait pas l'affliger davantage avec son coeur lourd. Il travailla sur sa respiration un moment et décida tant bien que mal que ce qu'il ressentait, à ce moment là, passerait au dernier plan. Il ferait son deuil plus tard, seul, une fois que personne n'aurait besoin de lui et à l'abri des regards de tous. Une fois cette décision prise, il avait fini sa nuit les yeux rivés sur le plafond blanc de sa chambre attendant la boule au ventre que le matin arrive. Il avait vu le plafond changer de nuances au fur et à mesure que le soleil se levait sans un nuage à l'horizon. Tout le monde pense que les enterrements se font sous la pluie, mais lorsque Stiles vit que le soleil était au rendez vous, il ne put s'empêcher de sourire. C'était un magnifique hommage pour Laura qui était une personne toujours de bonne humeur, au regard pétillant et dont le sourire illuminait tout le visage. Le jeune homme chassa le souvenir du visage de sa meilleure amie avant d'être à nouveau submergé par les émotions.

Quand le moment fut arrivé, il se leva et se prépara sous le regard inquiet de son père. Ce dernier semblait vouloir lui parler sans savoir quoi dire. Sachant pertinemment que Stiles ne dirait rien, comme effrayé que les sanglots qu'il tentait de contrôler s'échappent.

Une fois prêt, Stiles attrapa les clés de sa Jeep et partit en direction du cimetière. Tout le long du trajet, il se demandait comment il allait gérer ses émotions pendant la cérémonie, comment il allait faire en sorte d'être totalement là pour Derek, sans porter l'attention sur ce que lui ressentait. Etouffant les sanglots, il prit une grande inspiration et sortit de la voiture. Il marcha vers le cimetière pour aller retrouver les premiers arrivés. Une fois là bas, il alla vers Melissa qui tenait Louna, endormie dans ses bras, pour déposer délicatement sur son front un bisou avant de lui dire bonjour. Tous deux se regardèrent. On voyait dans le regard de Melissa toute la bienveillance d'une mère et dans celui de Stiles, la fragilité d'un jeune homme qui a perdu trop de personnes aimées. Cependant, Melissa pouvait aussi y voir une détermination à toutes épreuves. Elle posa sa main sur sa joue et lui parla tout bas.

- Ne t'oublies pas, Stiles. Toi aussi tu y as le droit.

Stiles hocha simplement de la tête. Sa façon à lui de lui dire qu'il l'avait entendue mais qu'il n'en ferait rien. Puis, sans dire un mot, il se dirigea vers Derek. Il se tenait près du pasteur, les yeux rivés sur le cercueil dans lequel reposait le dernier membre de sa famille, sa grande soeur, sa meilleure amie, sa confidente. Il ne sembla pas se rendre compte que Stiles était arrivé. Ce dernier copia sa position, s'installant à côté de lui et comme toujours, regardait dans la même direction que lui.

Quand la cérémonie commença et que le pasteur prononça les premiers mots, Stiles vit Derek se raidir. Sans réfléchir un instant, il se rapprocha de lui et saisit sa main. Les doigts du loup se resserrèrent autour de ceux du jeune homme. Ce simple geste soulagea Stiles d'un poids considérable. Depuis qu'il était arrivé, Derek n'avait pas bougé d'un centimètre, il s'était tenu, là, statique et muet, ne semblant même pas remarquer les invités qui venaient les uns après les autres lui présenter leurs condoléances. 

La cérémonie avait suivit son court, les témoignages des gens venus pour Laura passaient inaperçus jusqu'à ce que le pasteur annonce le nom de Derek. Tous les regards s'étaient posés sur lui et Derek se tétanisa. C'était son tour de parler devant tout le monde, son tour d'ouvrir son coeur, son tour de dire au revoir. Il regarda Stiles, la panique visible dans ses yeux, avant de s'adresser à lui, d'une voix fébrile.

- Ne me lâche pas.

- Jamais.

Derek se décala alors, pour prendre la place du pasteur, suivi comme promis de Stiles qui tenait toujours fermement sa main. Ce dernier serra furtivement la main du jeune homme pour lui donner la force de parler.

- Je... je ne sais pas quoi dire. Je suis sûrement supposé vous remercier d'être venus. Alors merci. Je suis censé lui dire au revoir aussi. Je devrais avoir l'entrainement, j'ai déjà perdu le reste de ma famille. Pardon. Je n'aurai pas dû dire ça. Je suis désolé.

Derek lâcha la main de Stiles et s'éloigna d'un pas décidé, laissant derrière lui tous ceux venus rendre un dernier hommage à sa soeur. Derek entendit quelqu'un le rattraper à la course et ne fut pas surpris de sentir le bras long mais ferme de Stiles s'enrouler autour de son dos. Il déposa sa main droite sur celle posée sur son flanc pour lui signifier que sa présence était bienvenue. Sans dire un mot, ils arrivèrent sur le parking du cimetière. Alors que Derek venait à peine de trouver les clés de sa voiture du fond de sa poche, Stiles lui tendit la main en maintenant son regard. Quand il sentit le métal des clés sur sa peau, Stiles ne savait pas si son regard avait été aussi persuasif que ce qu'il voulait ou si Derek était tellement anéanti qu'il avait cédé sans sourciller. Il referma la main sur celle de Derek, enfermant les clés entre leurs deux paumes, et le fixa des yeux. A ce moment là Stiles savait que des mots n'auraient aucun effet sur le loup alors à travers leurs regards qui se croisaient, le jeune homme assurait à son ami sa présence indéfectible. Ce n'était que quand il vit comme un poids se soulever des épaules de Derek que Stiles lâcha sa main, non sans regret, et alla s'installer au volant de la voiture de sport. Ne perdant pas de temps, ils partirent en direction de la maison de Mélissa qui avait insisté pour que le repas se déroule chez elle, évitant ainsi à Derek de devoir tout ranger et nettoyer après le départ des invités, sans oublier Louna qui avait besoin d'une présence quasi constante. Arrivant quelques temps avant tout le monde, Derek et Stiles avaient pu prendre le temps de se débarrasser de leur veste de costume, de détacher un ou deux boutons de leur chemise, et de s'asseoir côte à côte sur le canapé appréciant tant qu'ils le pouvaient le silence et la solitude avant l'arrivée des autres invités. Alors qu'ils se tenaient tous les deux droits, Derek se pencha subitement, posant ses coudes sur ses genoux et enfouissant son visage dans ses mains, laissant échapper un lourd soupir. A ses côtés, Stiles ne savaient pas si Derek laissait aller ses larmes ou avait simplement soupiré. Impuissant, il se rapprocha de lui, posa sa tête sur l'omoplate du loup et une main sur son dos. Il ne dit rien. Parce que ça aurait été inutile, parce qu'il ne savait pas quoi dire, parce que lui aussi avait mal et que parfois un contact vaut mille mots. Au bout de quelques temps perdus dans le silence consolateur de la maison vide, Derek tourna la tête pour embrasser la tempe de Stiles. Quand celui ci se redressa, Derek saisit sa main qui tenait toujours gentiment son bras. Leurs deux visages étaient proches, leurs regards ne se détachaient pas l'un de l'autre. Le loup ferma les yeux et s'approcha du jeune homme, collant leur deux fronts. Dans un soupir presque inaudible, Derek prononça un mot si sincère qu'il sembla résonner dans toute la pièce.

- Merci.