Volatilisé. Envolé. Il avait fui. Instinctivement, Félix baissa son regard sur ce qu'il contemplait chaque soir. Un groupe assez important de lucioles venaient de s'épanouir, et c'est alors que plusieurs cris résonnèrent autour de lui. Le garçon sursauta, s'écrasant contre un rempart pour constater ses congénères superficiels se tordre de douleur et s'effondrer. Alors la garde du Royaume ne tarda pas à se précipiter à leur secours, le visage sombre, les lamentations grondant dans leur dos.
« - C'est la faute des Dhaos !, hurlaient les uns,
- Comment avez-vous pu les laisser pénétrer le quartier des lunes ? » hurlèrent les autres.
La curiosité du jeune homme fut alors piquée au vif. Leurs ennemis ? Ici ? Attaquant la population ? En pleine rue ? Mais où étaient-ils au final ? Comment ne pas être démasqué par la garde ? Les Dhaos n'étaient pas censé ressembler à des personnes hideuses ?
Sagement, prudemment, le rouquin préféra s'éloigner de la scène. Il ne trouverait jamais les réponses à ses questions auprès de ses personnes. Un gouffre soudain se creusa en lui. Avide de savoir, il profiterait de son unique jour de congé pour se rendre à la bibliothèque de la cité, glanerait discrètement des informations dans la rue et se constituerait des réponses aux questionnements qui le rongeaient à présent. Il jeta un dernier regard en arrière, puis se mit en marche. Il se mêlait habilement à la foule, le regard au sol et la bouche close, pour n'attirer l'attention de personnes. Il était la proie de beaucoup trop de détraqués pour se permettre de ralentir le pas en publique ou de même se laisser aller à une conversation. Comme une ombre, comme un énième Phaos à la saveur fade, il n'admira pas une seule fois les étoiles, se contentant de la vue de ses pieds sur les pierres lisses. Puis lentement, il bifurqua et commença à s'éloigner des sentiers que tout le monde empruntait sans distinction aucune. Félix arriva alors face à un immense saule pleureur dont les imposantes ramures courbaient l'échine vers le bas, venant caresser de leurs grandes et douces feuilles son visage, lui arrachant un sourire espiègle et malicieux alors qu'il savait très bien où ce chemin allait le conduire. En quelques pas, il vint poser une main contre le tronc massif de l'arbre, dégageant ses branches pour dévoiler un escalier abrupte dont les marches étaient couvertes d'une fine couche de mousse chatoyante, dans laquelle éclosaient de minuscules fleurs blanches au cœur azur. Il se pencha en avant pour commencer à grimper, ses doigts agrippés à chaque nouvelle dalle. Sous ses pieds, l'escalier se para d'une faible lumière blanche, accompagnant son ascension qui ne fut pas bien longue, Félix atteignant enfin son but. Une bourrasque de vent vint lui fouetter le visage pour l'accueillir, s'engouffrant dans sa chevelure de feu et malmenant ses mèches impitoyablement. Le garçon inspira un grand coup, admirant alors l'immense prairie sombre qui s'étendait face à lui. Ici, il était seul. Il pourrait enfin être lui-même et relâcher toute la pression accumulée au cours de la journée. Tout oublier pour se concentrer sur lui-même uniquement.
Il déposa son sac dans l'herbe, commençant à fouiller à l'intérieur pour en sortir une petite boîte et une cassette. Un large sourire illuminait de nouveau son visage, alors qu'il emboîta les deux objets. Une mélodie particulière commença alors à jouer, un mélange d'instruments à cordes, à vent, de percussions, entrecoupé de moment calme où résonnait le tintement distinctif d'un xylophone.
Félix rejeta ses bras en arrière, faisant rouler ses épaules pour détendre chacun de ses muscles, expirant profondément en fermant les yeux. Il devait tuer chaque mauvaise onde qui avait dévoré son amour propre aujourd'hui encore.
Lentement, il étira ses bras jusqu'à les tendre vers la voûte céleste, puis son dos se cambra, ses grands yeux humides venant se perdre dans un monde qui était le sien. Son corps se brisa, et il se ramassa sur lui-même, ses genoux glissant contre l'herbe vers la gauche puis vers la droite, son être entier venant tourner sur lui-même. Ses bras affolés battaient l'air, le coupant brutalement avant de l'embrasser avec douceur, frôlant parfois l'herbe ; parfois ses cheveux emmêlés par le vent et ses mouvements dictés par la bande son. Enivré par l'instant, il releva son corps en pointant le torse en avant, son visage rejeté en arrière. Ses yeux presque clos ne discernaient plus rien, ses lèvres entrouvertes happant avidement l'air, et soudain le bas de son corps s'emballa : ses jambes se lançaient rapidement, pliant puis le portant fermement. Son souffle devint plus profond, résonnant à ses oreilles. Parfois, l'inspiration ne venait plus et il se tortillait sur lui-même avec souplesse, comme un animal marin, riant de bon cœur. Ses lèvres s'étiraient, plissant adorablement ses yeux, son expression sincère éblouissant la nuit.
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Change my world
FanfictionDeux peuples qui s'opposent. L'un vivant dans la luxure et le luxe, contre l'autre qui se dissimule, qui se cache et qui trouve refuge parmi ceux qui les fuient. Félix est un jeune homme dans la force de l'âge qui aspire à une autre vie, qui n'a jam...