Change my world

Passion

« - Est-ce que je peux dormir chez toi ? S'il te plaît ? » insista alors Changbin, plus sérieux et courageux qu'il ne l'avait jamais été.

Dans la cité, de telles propositions ne se lançaient jamais au hasard. Chamboulé par cette demande, Félix sentit son corps entier s'embraser, son cœur tambourinant dans son torse soudain bien trop étroit. Son esprit s'embruma, et sans qu'il ne le remarque, ses yeux et les milliers de petites étoiles parsemant ses joues se mirent à luire doucement d'une magnifique couleur tel à celle de l'océan, battant au rythme effréné de son être. Ô combien cet homme pouvait être tout ce qu'il désirait en cet instant ! Peu importe la tournure que prendrait cette soirée, il aurait bien pu le laisser le détruire par désir et par tristesse. Car si même lui venait à lui planter un poignard dans le dos, alors la vie deviendrait bien plus fade qu'elle ne l'avait jamais été. Peut-être qu'il aurait pu ne jamais le revoir, mais ils en étaient là à présent, à se retrouver depuis des lunes, et il voulait croire à un signe du destin.

Eblouis par la réaction que ses mots avaient déclenchés chez le jeune homme, Changbin ne put réprimer le frisson qui secoua son corps tout entier, une nuée de papillon prenant son envol au creux de son ventre. Félix n'était pas un simple Phaos. Et quand bien même ? Lui-même n'était pas un Phaos. Mais il se sentait sûr. Comme si son vis-à-vis était prêt à tout lui pardonner. Félix avait toujours été cet être magnifique et discret qu'il avait contemplé longuement des semaines en arrière. Il n'avait jamais ressenti ce sentiment si profond qui avait ébranlé sa vie de misère, qui lui avait arraché une vague d'une chaleur qu'il n'avait jamais éprouvé. Tendre et sauvage, brûlante et passionné. Il avait aimé cet homme dès que ses yeux avaient croisé les siens. Comme si cela avait été quelque chose d'inévitable, et visiblement partagé. La gorge nouée, il voulut parler mais fut surpris par Félix qui saisit sa main tout en se levant. Ce contact électrisa le brun qui se leva à son tour, posant un regard désespéré d'attention sur l'objet de tous ses maux.

Félix brillait telle la voûte céleste qui s'étendait au-dessus de leur course folle. Les étoiles descendues sur terre ne scintillaient que pour une personne ce soir. Malgré son corps engourdis par son désir ardent de jeune homme en quête d'amour, le roux courait dans les rues endormies, traînant derrière lui Changbin qui s'appliquait à ne pas le ralentir malgré son genou blessé. Eux-mêmes ne savaient pas pourquoi ils couraient, pourquoi ce soir tout avait éclaté. Mais ils étaient impatients de découvrir ce que leur réservait cette étrange nuit.

Félix referma son immense porte en bois, donnant un tour de clé dorée dans la serrure. Puis il se stoppa net. Il se sentit comme paralysé, rongé par la timidité. L'assurance dont il avait fait preuve semblait faillir. A vrai dire, il n'était jamais allé aussi loin dans quoi que ce soit, et il était apeuré. Apeuré par la tournure des évènements alors que sa peau était épargnée de toute marque que l'amour aurait pu graver...

Il ne put réfléchir plus longtemps, Changbin venant s'écraser contre lui, son torse tiède épousant la courbe de son dos pour l'accueillir au plus proche de son être. Le brun enroula fermement ses bras autour de ses épaules, déposant son visage dans le creux de son cou, priant pour ne pas être rejeté brutalement en arrière, le doute troublant sûrement l'esprit du jeune serveur. Ce dernier expira alors bruyamment, son corps figé fondant contre ce contact. Il pouvait sentir les battements affolés du cœur de l'homme qui l'entravait avec tendresse, ce qui le rassura. Tout cela était sincère... Loin de toutes les viles tentatives des clients qu'il côtoyait chaque jour. Ca n'avait rien à voir. La lueur de ses joues avait diminuée mais ne l'avait pas quittée, pas un seul instant, incitant le brun à continuer de le chérir. Félix laissa alors aller son corps et ses sentiments timides qui se mirent à brûler ardemment, montant ses mains à la rencontre des avant bras de Changbin pour les saisir comme s'ils étaient son seul repère.