Lettre numéro 6

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Elle m'a menti ! J'ai gobé les cachets, accepté les piqûres, compris que je devais m'éloigner des autres pour aller mieux et être là pour passer une armée de check-up plus humiliants les uns que les autres. Electro-encéphalogramme à gauche, Potentiels évoqués à droite et tu veux savoir pourquoi ? Pour qu'on me dise que c'était pas possible de me cataloguer dans une de leurs cages de papiers machés.

Celà fait presque deux ans que je m'étais promis de ne plus t'écrire, mais dis-moi, as-tu au moins reçu les petits mots que je donnais à Gaby ? Tu sais bien l'infirmière qui me prennait les lettres pour les expédier à leurs destinataires. Je prie pour que tu en ais eu une bonne réception.

"Comment vas-tu ?", ce sont les mots qui commençaient chacuns de mes mots tout simplement parce que tu es plus important à mon bien-être que tout le reste. Je pourrais vivre facilement sans toi m'avait promis les médecins, mais voilà... Ta voix est revenue souffler dans mon crâne après plusieurs années comme une musique de mon enfance revenant s'immiscer dans mon esprit.

Tu me parlais si calmement avant et aujourd'hui, tu hurles. Tu cries et implores pour que je te redonne ta liberté. Qu'ai-je fait pour enfermer le petit oiseau rêvant de s'envoler dans une prison noire et pleine de mouton de poussière. Tu ne veux plus me chanter ce petit air que j'aimais tant entendre sortir du plus profond de nos êtres.

Hier, j'ai supplié pour qu'on me donne du papier et un crayon pour dessiner... S'ils savaient  à quel point je déteste gribouiller sur ma feuille des heures pour n'en sortir qu'un cube... Ce même cube que l'on montrera à mon psychiatre pour qu'il ait encore un élément de plus à ajouter au dossier du raté de service de la chambre 609. Je pourrais dessiner un pénis et ils réussiraient à trouver une signification profonde de mon malaise de vivre.

Est-ce toi que j'ai vu passer tous les mardis devant le petit étang sur lequel ma fenêtre donne ? J'espère que "oui". Parce que je me dis que c'est toi et que tu viens pour me voir. Ces cons t'interdisent l'accès à ma pièce et tu leurs dis que tu reviendras mardi prochain. C'est là que je te reconnais loin des tabous du physique, tu es la métaphore glisssante qui enjolive l'histoire de mon  livre.

Aujourd'hui, c'est officiel ! Je signerai ce papier de libération conditionnelle et je pourrais te revoir en catimini comme on dit. Je ferme les yeux et je t'entends respirer dans mon cerveau. Ton souffle se coupe de temps à autres, mais je sais que tu es en vie et que comme moi, tu as envie d'être partout sauf là où le monde nous attend.

"Demande à un fou s'il est fou et tu verras ce qu'il te répond". Je suis normal, mais complétement foiré. Ce n'est pas banal ni original d'être occupé à penser comme ça à mon âge, mais je ne peux ni crier, ni chanter, ni pleurer. Je peux juste subir ce changement cachet après cachet ...

Fuyons tant qu'on est con ... <3


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Ps : Un chapitre comme ça pour vider ce que j'ai en tête.

All the love

J

SchizophreniaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant