Le lundi suivant, Bell eut une journée difficile. Il fallait, entre autres dossiers, appeler les victimes d'expropriation pour leur rappeler la date butoir, formaliser le recours contre les autorisations administratives obtenues par les Di Rezzi , préparer la lettre de revendication destinée à ces derniers.
Entre le stress et la pression que lui mettait son parrain, elle avait fort à faire. Le jour suivant, Ginette, la secrétaire était allée déposer la lettre de revendication au domicile des Di Rezzi pour être sûr que ceux-ci la recevront. Il y était mentionné le montant global réclamé par les victimes et la date de vendredi avait été proposée pour une assise en vue de trouver un terrain d'entente.
-Humm, ils ont une belle et vaste maison ; commenta Ginette après son retour.
-Qui a reçu le courrier, demanda Anne qui s'était intéressée au dossier.
-Monsieur Idalgo Di Rezzi en personne; répondit Ginette, des paillettes dans les yeux.
Bell et Anne se jetèrent un regard complice.
-Alors comme ça, il te plaît ! Fit remarquer Bell en la taquinant.
-Tu ne l'as pas encore vu en chair et en os ; répondit-elle. Il est canon!
Elles se mirent à rire. Idalgo Di Rezzi était le nom qui revenait le plus dans le dossier, à côté de son père Antonio. C'était lui qui tirait les ficelles. Bell aurait aimé lui faire entendre sa façon de penser. Elle avait hâte qu'il valide la confrontation de vendredi.
En attendant, elle avait tout aussi hâte de se rendre à son cours de danse. Peut-être que Damian sera là. Ainsi, ils pourraient continuer là où ils s'étaient arrêtés.
Heureusement pour elle, Damian n'avait pas dit son dernier mot. Il espérait aussi la revoir ce soir et au cas où elle ne viendrait pas, il avait prévu questionner le maestro jusqu'à obtenir des renseignements exploitables. C'était étrange comme il n'arrêtait de penser à elle. Elle avait chamboulé ses sens et il en redemandait encore.
Arrivé au club Dancy à vingt heures moins le quart, il alla directement dans la salle d'attente. Boyo n'avait pas pu venir ce soir. Mais c'était une autre présente dont Damian avait besoin. C'est alors qu'en regardant par la fenêtre qui donnait sur la salle d'apprentissage, son coeur se gonfla de joie lorsqu'il la vit. Elle avait formé avec ses cheveux blonds frisés, un chignon strict qui révélait davantage la rondeur de son visage. Elle portait une robe noire aux manches courtes, assortie d'une ceinture blanche à la taille; et bien sûr, des ballerines noires.
Il la vit s'essuyer le visage avant de mettre les mains aux hanches, le regard rivé, comme les autres, sur le maestro qui leur montrait les pas de ce qui devait être le Paso Doble. Damian sourit. Elle était magnifique. Il ne s'attendait pas à ressentir une telle joie et une telle chaleur dans la poitrine. Il n'avait plus qu'à patienter jusqu'à la fin du cours pour l'aborder. Il comptait déjà les secondes.Bell quand à elle n'était pas au mieux de sa forme. Elle n'arrivait pas à suivre le maestro correctement. Le Paso Doble n'était pas aussi facile qu'elle l'avait cru. Elle transpirait à grosses gouttes sans pour autant avoir l'impression de faire ce qu'il fallait. Vint le moment de la formation des duos pour approfondir l'apprentissage. Ce fut une vrai catastrophe. Ce soir, elle dansait avec Dan. Il était patient et on sentait bien qu'il était parfaitement à l'aise.
-Ça va aller; l'encouragea-t-il. Paris ne s'est pas construit en un jour.
-Mais toi tu réussis pourtant bien; répondit-elle boudeuse.
Il s'en amusa. Bientôt ce fut l'heure de la piste libre. Dan ne resta pas. Il devait retourner à son entreprise. Bell regarda autour d'elle. Elle avait eu espoir de revoir Damian. Mais, il n'était pas là. Elle eut un pincement au cœur et regretta pour la énième fois de s'être séparée de lui sans contact.
Elle se dirigea vers les casiers pour récupérer son sac et se résigner à rentrer, lorsqu'une main chaude lui tint le bras. Elle sursauta et se retourna aussitôt. Il était là ! De justesse, elle se retint de se jeter dans se bras. Il avait toujours ce sourire charmeur et ses cheveux noirs impeccablement soignés. Un tee-shirt et un Jean noirs faisaient ressortir la blancheur de sa peau.
-Bonsoir Bell. Ne me dis pas que' tu t'en vas déjà.
-Je...bien sûr que non. J'ai envie de danser; répondit-elle en riant.
-Viens.
Il l'entraîna sur la piste de danse sous un rythme de cha-cha-cha. Elle était chaude sous sa robe. La toucher lui procurait un plaisir insoupçonné. C'était comme s'il se desalterait après une longue marche dans le désert. Avec une certaine stupéfaction, il se rendit compte qu'il la désirait.
Après le cha-cha-cha, plusieurs rythmes se succédèrent. Ils étaient aux anges dans les mains l'un de l'autre. Plusieurs fois, des partenaires différents voulurent les séparer, mais ils refusaient catégoriquement. Dans les bras de Damian, Bell avait l'impression d'apprendre plus vite.
A vingt deux heures et demi, elle lui signala qu'elle devait rentrer. A contrecœur cependant. Elle avait besoin de se reposer sinon elle aurait une journée de travail pénible le lendemain.
-Cette fois tu me laisses te raccompagner ?
-Oui.
Comment aurait-elle pu refuser? Il n'était pas question qu'ils se perdent de vue une fois de plus. Ils s'entendaient trop bien. C'était bon d'être en sa compagnie. Et sans savoir pourquoi, Bell avait l'impression que cela allait au delà de la danse.-Alors, où est-ce que je dois vous déposer? Demanda-t-il lorsqu'ils furent parvenus à sa voiture.
Une berline blanche, vraiment très jolie et luxueuse. Ce type de voiture n'était pas à la portée de n'importe qui.
-Jolie voiture ! Apprécia-t-elle.
-Merci, mais c'est une voiture de location ; précisa-t-il en caressant tendrement la toiture de son bijou. Il lui ouvrit la portière et pour entrer, elle passa très près de lui. Bizarrement, elle eut envie qu'il la prenne dans ses bras. Il referma la portière et contourna le véhicule pour s'asseoir côté chauffeur.
-Mets ta ceinture et réponds à ma question ; dit-il doucement avec un sourire désarmant.
Bell s'humecta les lèvres.
-Quelle question ? Demanda-t-elle le plus naïvement en le fixant dans les yeux.
Soudain, il arrêta de sourire. Son regard descendit et s'attarda sur ses lèvres. C'était comme s'il n'arrivait pas à s'en détacher. Bell non plus ne contrôlait plus rien. L'intimité de l'habitacle, la chaleur de leurs corps, le désir qui bouillait de part et d'autre lui montaient à la tête. Sans crier gare, il posa ses lèvres sur les siennes.
Ce contact hérissa les poils de Bell. Le baiser se fit doux, puis peu à peu pressant. Damian dévorait ses lèvres en poussant des gémissements de plaisir. Bell se sentit emportée par le vertige. Elle lui caressa les cheveux, le visage, le torse sous son tee-shirt.
Il passa une main dans ses cheveux et défit son chignon. La douceur de ses doigts dans ses cheveux bouleversa un peu plus Bell. Damian caressa son cou et s'écarta un instant pour la contempler. Bell cru qu'il voulait s'arrêter et recula, la tête encore dans le brouillard cependant.
-Tu es si belle! Dit-il en embrassant ses doigts. Depuis la dernière fois, je n'ai pas arrêté de penser à toi.
Bell hésitait. Devait-elle se laisser aller ainsi? Elle ne savait rien de lui.
-Tu n'étais pas là jeudi. Je t'ai cherchée tu sais.
Bell mis quelques secondes avant de comprendre. Elle se rappela alors que les cours de danse avaient lieu tous les mardis et jeudis. Elle avait choisi d'y aller une seule fois dans la semaine non seulement pour ne pas se fatiguer, mais aussi parce que son travail le lui imposait. Ainsi, il l'avait cherchée...
-Je ne viens ici que le mardi.
-Je vois ça.
-Tu me ramènes ? Je vis au quartier Djam.
-Bien, allons-y. Mais, cette fois j'insiste pour avoir ton numéro de téléphone, sinon je te séquestre dans cette voiture.
Cette pensée la fit rire. Il démarra.
-Tu vas me montrer le chemin. Je suis nouveau dans la ville; précisa-t-il.
-Pas de problème; je vais te guider. A la prochaine intersection, tu vas prendre à gauche pour commencer.
-Oui M'dame; répondit-il de façon enjouée.
-Alors comme ça, tu es nouveau en ville?
-Oui, je suis là pour le travail.
Damian eut un instant de réserve. Les jeunes femmes africaines avaient tendance à se jeter sur des étrangers caucasiens, surtout lorsque ceux-ci étaient riches. Mais, il dût reconnaître que Bell ne pouvait pas faire partie de ces femmes. Elle n'avait pas l'air de courir après un prince charmant. Tous ceux qui fréquentait le club Dancy n'avaient pas à se plaindre, d'après ce que lui avait dit Boyo. Et puis, avec elle, rien n'était forcé. Elle l'appréciait autant que lui. Pas besoin d'être méfiant.
-En fait, ma famille tient à ouvrir une entreprise ici à Poli. Et moi en ma qualité de comptable, je suis venu donner un coup de main à mon frère pour l'implantation de la structure.
Sans qu'elle ne comprenne pourquoi, Bell sentit sa peau se couvrir de chair de poule. Ils roulaient tranquillement sur les routes légèrement fréquentées. Elle lui indiquait le chemin.
-De quel Pays vous venez?
-Devine.
-Humm, j'ai du mal...tu n'as pas d'accent particulier. Mais le prénom Damian me fait penser que tu pourrais venir d'un Pays latino...
Il fit une grimace pour lui signifier qu'elle était sur la mauvaise voie.
-Si tu me donnes ton nom de famille, je suis sûr de pouvoir trouver ton Pays d'origine.
-Très bien. Tu as raison.
Ils arrivaient bientôt.
-C'est bon, tu peux t'arrêter là. Je vais prendre cette ruelle et arriver chez moi dans quelques minutes.
-Je peux passer avec la voiture. Je voudrais te laisser devant ta porte...
-Non non; fit-elle en le retenant du bras.
Il caressa sa main. Et ils restèrent là un moment à se regarder sans rien dire.
-Atta; dit-elle.
-Pardon?
- Je me présente, Maître Atta Bell.
-Enchanté Maître, fit-il en lui baisant la main. Et moi, Damian Di Rezzi.
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Je plaide coupable !
عاطفيةUne Avocate aux prises avec un adversaire dangereux et passionné...