Le bruit que faisaient les gouttes de pluie sur le toit de la maison était quand même agréable. Couchée à même le sol sur le côté droit, je change de position en basculant sur le côté gauche, essayant en même temps de tirer le petit tissu qui me servait de drap.
Je sentais un liquide froid couler sur ma joue droite, mais j'avais tellement sommeil que je décide de ne pas prêter attention. J'ouvre petit à petit les yeux lorsque je me rends compte que le petit tissu qui me sert de drap est aussi trempé.
Ce que je crains le plus est en train d'arriver, toute la maison est inondée. Je prend soin d'alerter ma mère profondément endormie sur le lit avec les garçons.
J'entends des cris et des pleurs dehors. Ma mère, inquiète, m'aide pour repousser l'eau et ce calvaire dura toute la nuit.
Ellipse du temps
Le soleil brille à nouveau, les oiseaux chantent, c'est le beau temps. L'eau est descendue après avoir tout saccagé sans pitié, laissant la boue comme trace de son passage.
Ma mère est allée au marché vendre ce qui lui restait comme marchandise pour qu'on puisse avoir de quoi manger. Elle revient deux heures après avec du pain pour tout le monde et retourne au marché.
Mon carnet de croquis, mon seul refuge. Ce petit carnet bleu dans lequel je dessine des vêtements que j'espère reproduire un jour.
Les jours sont passés et tante Jenna à rappelé. On a donc décidé que j'irai chez elle sauf que je dois garder mes documents avec moi et qu'elle doit me payer si je travaille pour elle. Elle a tout de suite accepté... Un peu trop vite même !
***
En trois mois, j'avais déjà le visa. J'étais tellement heureuse que j'oubliais toutes les souffrances.
- Eva, tu ne retrouves pas mon peigne ?
- Si si, un instant maman, j'arrive!Je crie depuis la chambre. J'arrive aussitôt avec un peigne et du beurre de karité. Je lui fais de grosses nattes comme elle les préfère.
- Le voyage, est dans deux semaines et... j'ai peur de te savoir avec ma sœur aussi loin de moi.
-T'inquiète pas maman! Je suis une grande femme maintenant.
Tante Jenna a prévu nous envoyer l'un de ses amis, Tony me chercher. Tony était là une semaine avant mon départ. C'était un homme de 1m80 environ, le crâne bien rasé avec plein de tatouages sur le corps.
Il me faisait déjà flipper quand j'ai vu sa photo alors imaginez ma mine quand je le vois en face.
***
Enfin le jour du voyage arrivé. Je m'assure que tout est dans ma valise, un dernier au revoir a ma famille et mon entourage et c'est parti. Ma mère m'a quand même appelé 5 fois quand on était en route pour l'aéroport.
Déjà installé dans l'avion, je n'en croyais pas mes yeux. Comment une chose aussi grande peut paraître aussi petite dans le ciel !
Nous avons dû faire deux escales avant d'arriver à destination. Tony s'occupait de tout jusqu'à ce qu'on sorte de l'aéroport.
Tout était magnifique dehors ! Déjà que j'étais habitué à l'environnement précaire de SOWETO , je ne pouvais m'empêcher de sourire bêtement. Tony, silencieux de nature me regarde puis roule les yeux avant d'arrêter un taxi.
Le taxi s'arrête en plein centre-ville.
- Toi, tu restes ici et tu ne bouges pas. Je vais régler une affaire importante... Je te rejoins dans 30 minutes.
Dit-il en pointant un petit banc dans une propriété privée dont le portail était ouvert. Il regarde dans tous les sens comme un fugitif, puis fini par mettre sa capuche.
J'hésite, mais je finis par aller m'asseoir avec mes affaires. En murmurant
- Trente minutes, seule dans un endroit inconnu. Rien de plus normal.
J'était dans le parking d'un immeuble d'environ 50 étages. Je regardais l'immeuble du bas vers le haut lorsqu'un mot écrit en Jaune or écrit au sommet attire mon attention: LINS.
Je mets 1 minute pour me rendre compte qu'il s'agit de l'entreprise de mode que j'avais vu à la télé.
Je suis sortie de mes pensées par les gestes du gardien. Il semblait me faire signe en criant, mais je n'entendais rien.
-Mademoiselle vous m'entendez ?
Je lève la tête, me trouvant en face de lui. Je regarde ma montre.
- Il est 10 h 21!
Ça fait maintenant une heure que Tony est parti ! Panique totale !
-Mademoiselle tout va bien ?Je regarde le gardien sans répondre, les mains tremblantes.
- Ok mademoiselle, je ne sais pas ce qui vous arrive, mais je vais devoir vous demander de quitter les lieux. C'est une propriété privée ici et mon patron va bientôt arriver.
- Bonjour monsieur, excusez moi, on m'a demandé d'attendre ici...
- Dégage d'ici et c'est tout. Je ne veux pas avoir de problèmes.
Interrompt un autre gardien. Comment ose-t-il ? Je décide de faire appel à l'Eva que j'ai toujours connu.
- Non désolé, je ne bougerais pas d'un seul centimètre d'ici jusqu'à ce qu'on vienne me chercher.
Je remarque leurs yeux écarquillés.
- Il est arrivé ! Le patron est là !
Je lève les yeux au ciel avant de bâiller.
- Je suis sûre que c'est un endroit pour s'asseoir ici. Sinon quelle idée de mettre un banc en plein milieu du parking !
Ils font mine de ne rien entendre, trop occupés à sourire nerveusement à la grosse limousine noire et vitre teintée de leur boss. Il descend de la voiture en ouvrant la portière lui-même. Je reconnais aussitôt le monsieur de la télévision.
Il s'approche lentement de moi, mais sans me regarder, pose le pied-droit sur le banc où je suis assise et mets ses lacets, toujours sans me regarder.
Je décide quand même de le saluer.
- Bonjour monsieur, vous voulez que je me pousse un peu encore ou...
-Hum... Mmmmmm
Fait-il, toujours sans me regarder. Je baisse les yeux tout honteux jusqu'à ce qu'il s'en aille.
Une heure après, Tony s'emmène enfin ! Une fois dans la voiture qu'il a ramenée de je ne sait où je remarque qu'il a du sang du son t-shirt. Il me sourit ironiquement en criant "this is America"
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