Une charge s'écrasa lourdement sur le corps d'Evariste.Ce choc provoqua un grand frisson qui parcourut tout le corps du jeune homme. Il se réveilla en sursaut et avala une grande goulée d'air frais, les yeux exorbités. Allongé par terre, il ne pouvait pas voir grand-chose. Il devina une gouttière mal fixée qui pendait au-dessus de lui, oscillant au gré du vent. Ses autres sens étaient totalement anesthésiés.
Son regard se perdit dans l'étude du ciel. Quels arbres pouvait-il bien y avoir de l'autre côté pour former des nœuds de racines pareils ?
Un petit grattement à côté de son oreille raviva chez lui une peur primaire. Celle transmise par nos lointains ancêtres, qui est la peur des rampants et de toutes ces créatures qui vivent au ras du sol. Il tenta de s'asseoir vivement pour éloigner son visage du rongeur, mais la souffrance le paralysa. Il fut tout d'abord secoué par un hoquet de douleur provenant de son bras gauche : ce dernier était violacé et formait un angle étrange. Il détourna les yeux, ostensiblement dégoûté par la vision de son bras. La deuxième entrave était ce poids qui pesait sur ses jambes et son bassin.
Il jeta un coup d'œil de ce côté et découvrit la teneur du fardeau. Un corps gisait sur lui. Un corps tout ce qu'il y a de plus mort, les yeux révulsés, le teint pâle, et la peau froide.
- Charmant... Articula Eva de sa voix rauque.Il cligna des yeux plusieurs fois pour faire passer son haut-le-cœur. La situation imposait qu'il prenne un peu de recul pour prendre les bonnes décisions. Il était semi-allongé sur des déchets de nature indéterminée. Une partie de son poids reposait sur bras droit solidement enfoncé dans le sol. L'autre était hors d'usage. Trempé jusqu'aux os, il n'allait pas tarder à en ressentir les effets. Des bestioles particulièrement peu ragoûtantes tournaient autour de lui et un cadavre l'empêchait de tenter quoi que ce soit. Mais plus alarmant encore, il n'avait aucune idée de ce qu'il faisait là.
Il tenta de se dégager d'un coup, la main accrochée à l'une des planches qui composaient le mur à côté de lui. Elle grinça de façon inquiétante, mais ne fut pas la seule à grogner sous l'effort. Le pied d'Evariste était aussi sérieusement endommagé. Il chuta plusieurs fois, la tête la première dans les flaques d'eau croupie. Après plusieurs tentatives, il finit par se dégager et se redresser complètement.
Une larme brûlante de douleur dégoulina le long de sa joue, et creusa un sillon blanc à travers la crasse. Une deuxième la suivit, avant que le jeune homme ne renifle bruyamment et efface les gouttes du revers de sa manche.
Ne pouvant faire autrement il clopina, vacillant de droite à gauche jusqu'à la ruelle suivante. Là il trouva un bloc de granit qu'il jugea adapté pour s'asseoir. Il leva les yeux et tomba nez à nez avec son propre reflet.
Dans la vitre, un garçon à la tignasse ébouriffée et au visage couvert de boue et d'égratignures se tenait devant lui. Âge indéterminé, on pouvait cependant le situer dans cette catégorie où l'on ne sait si on doit qualifier ces jeunes gens de garçons ou de jeunes hommes. Une coulée de sang séché descendait de son arcade sourcilière le long de sa tempe. Seuls ses yeux bleus lagons gardaient un éclat de vie derrière cette apparence pouilleuse. Ses épaules plutôt frêles supportaient les lambeaux d'une écharpe et des vêtements de fortune d'une couleur indéfinissable, froissés, déchirés et trempés. La pâleur de sa peau était totalement masquée par la saleté.
Dans un élan de découragement il soupira :
- Putain, comment est ce que j'en suis arrivé là ..?Il chercha au plus profond de sa mémoire une quelconque information qui pourrait éclairer sa lanterne, en vain. Il se souvenait simplement de son prénom, et savait que les lieux lui étaient parfaitement inconnus.
Un volet grinça, quelques portes claquèrent et une légère rumeur d'agitation se répandit alentour. Une silhouette se dessina au loin. Le jeune homme tenta de se lever mais renonça aussitôt. Il était destiné à rester perché sur son rocher jusqu'à ce qu'un miracle se produise, il ne voyait pas d'autres solutions. Son bras, sa cheville et la totalité de son corps étaient en feu. L'adrénaline cessait de faire effet, et le moindre mouvement devenait une torture. Il ne put contenir l'expression de son désespoir.
De sa place, il pouvait encore voir l'endroit où il était allongé quelques instants plus tôt. Son regard fut attiré par une personne affublée d'une longue cape noire qui la couvrait des pieds à la tête. Elle se dirigeait justement droit dans la direction du cadavre. L'intérêt prit momentanément le dessus sur la souffrance d'Evariste. Le personnage dut sentir l'intense regard qui était posé sur lui car il finit par bifurquer à gauche, contournant ainsi le recoin sombre. Le manège se reproduisit plusieurs fois. L'Homme en noir revint, repartant chaque fois dans une direction différente.
Evariste n'eut pas le loisir d'observer ces allées venues plus longtemps. Déjà sa vue se troublait, son ventre se tordait dans tous les sens. Plusieurs haut-le-coeurs, et se pencha en avant, in extremis, pour vomir ce que son organisme rejetait. Ce mouvement brusque lui arracha un hurlement de douleur. Son poing valide se serra jusqu'à ce que ses ongles pénètrent sa chair.
Il lutta une dernière fois pour ouvrir les yeux avant de s'écrouler par terre. L'Homme en noir était penché sur lui.
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Hey ! Voilà un deuxième chapitre. N'hésitez pas à inaugurer les commentaires, je suis totalement ouverte aux avis et à la critique ☺.
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Les Fossoyeurs
Viễn tưởngEvariste se réveille au milieu du quartier le plus mal famé de la ville souterraine de Kronopolis. Il est incapable de se souvenir comment il est arrivé là mais ce qui est certain c'est qu'il est dans un sale état. Heureusement, une aide providentie...