La rupture

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Par ce samedi matin de novembre, gris, froid et pluvieux, rien, mais rien de rien, n'introduisait une journée favorable. La gueule de bois de tout le monde à la maison s'harmonisait très bien avec la couleur du ciel de Montréal à cette douloureuse époque de l'année.

Maxime ne savait pas trop ce qui se passait entre ses parents. Depuis quelques jours, ils ne se parlaient plus, ne se regardaient plus. Tour à tour Josiane et Éric pleuraient et Josiane avait passé les deux dernières nuits dans la chambre d'invités plutôt que de faire dodo avec Éric.

Ils ne se grondaient pas, mais lorsqu'ils s'adressaient l'un à l'autre, tout se déroulait sur un ton sec et tranchant. Un peu comme Manon le faisait lorsqu'un ami à la garderie n'écoutait pas.

Par contre, tous les deux étaient très gentils avec lui.

En ce samedi matin, Maxime avait le pressentiment que quelque chose allait se passer. Quelque chose de pas bien. Il ne savait pas quoi exactement et il était incapable de s'expliquer pourquoi.

Chacun était penché sur son du petit déjeuner, lorsque Maxime demanda à Éric pourquoi lui n'était pas gentil avec maman pourquoi maman n'était pas gentille avec lui.

Éric, qui était en train de boire son café, s'était d'abord étouffé, puis, avait répondu que c'était parce qu'ils étaient tous les deux préoccupés.

- C'est quoi préoccupé ?

- C'est quand on cherche les solutions à des problèmes et qu'on ne trouve pas ... Autrement dit c'est quand on cherche comment on va faire les choses difficiles et qu'on n'a pas encore trouvé

- C'est quoi tes choses difficiles à toi ?

Éric et Josiane se regardèrent un peu médusés. Ils ne savaient trop comment réagir à une telle question arrivée plus tôt qu'ils ne l'auraient cru. Les deux se firent un léger signe de tête, comme s'ils s'approuvaient l'un l'autre, puis c'est Josiane qui prit la parole.

- Écoute Maxime, tu sais, les grandes personnes, elles continuent à grandir, même si ça ne paraît plus. Elles grandissent par en dedans. Leurs goûts changent, elles s'intéressent à de nouvelles choses. Ton papa et ta maman aussi changent.

- C'est ça qui est difficile ?

- Non, mais lorsque les goûts de papa changent et que les goûts de maman changent aussi, mais pas en même temps, pas pour les mêmes choses, ça devient plus difficile.

Maxime les regardait tous les deux. Il ne comprenait vraiment pas ce qu'il pouvait bien y avoir de difficile dans les histoires de changements de goûts. Et ces deux-là faisaient une tête qu'on ne voit habituellement qu'au cinéma.

- Écoute Maxime - poursuit Josiane – papa et maman c'est plus comme avant. Avant, ils s'intéressaient aux mêmes choses et maintenant ils s'intéressent à des choses différentes.

Ça. Maxime le savait. Que papa et maman s'intéressent à des choses différentes, c'était certain, mais qu'ils aient pu un jour s'intéresser aux mêmes choses, il en était surpris.

- Et puis, papa et maman ont décidé de vivre séparés dans deux maisons différentes.

Josiane eut de la difficulté à terminer cette phrase. Elle avait quelque chose de pris dans la gorge et eut toute la difficulté du monde à prononcer « dans deux maisons différentes ».

La réaction de Maxime ne fut pas instantanée. Comme s'il avait mis une dizaine de secondes à décoder le message. Papa et Maman séparés dans deux maisons différentes. Et lui ? C'est ce qu'il craignait le plus ! Il se retrouverait comme Julie !

MaxOù les histoires vivent. Découvrez maintenant