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Je déposai alors sa canette sur le rebord de mon bureau de bois peint. M'installant sur mon lit juste derrière lui. Tristan fit pivoter la chaise d'un petit coup de pied et se tourna vers moi, saisissant la boisson entre ses doigts qu'il ouvrit dans un petit bruit distinctif. J'étais perturbé, certain que ce jeune homme éprouvait des sentiments pour les filles, plus particulièrement Amylia, une nana de notre classe avec qui il traînait souvent. Pour ne pas dire, tout le temps, en fait.

Il apporta la canette à ses lèvres, buvant quelques gorgées du breuvage tandis que moi, j'attendais patiemment qu'il m'en dise davantage. C'était inattendu, tout ce qu'il se passait aujourd'hui l'était. Et pour cela, j'éprouvais le besoin d'en savoir davantage, de connaître le fin mot de l'histoire, absolument tout.

« Dis Eliott, comment t'a su, que tu aimais les garçons ? »

Ah. Cette question, on me la posait souvent, les gens avaient toujours eu du mal à comprendre. Comment un homme peut-il aimer un autre homme? Est-ce que être gay te donne le droit de pleurer devant les gens? Est-ce l'envie d'être dominer, d'être pris par un corps puissant ?

D'une part, j'avais toujours considéré que pleurer était quelque chose de naturel, on était pas obligé d'être homosexuel pour pleurer devant les gens. Les gens, on le droit de pleurer, absolument tous.

Je portai à mon tour ma canette à mes lèvres après avoir l'ouverte. Je bus quelques gorgées avant de répondre.

« On ne demande pas aux autres, pourquoi ils sont hétéro. C'est juste de l'amour, tu sais. Tu sens ton cœur battre la chamade avec la personne, tes sentiments et cette sensation de devenir beaucoup plus fort. Quand tu le vois avec quelqu'un d'autre, t'a l'impression que ton cœur se déchire et que tu vas en mourir. Peu importe si c'est un gars ou une nana. Tu le sais, c'est tout. »

Face à ma longue tirade ininterrompue, Tristan semblait réfléchir, il se grattait le menton l'air attentif, est-ce-qu'il essayait d'avaler, tant bien que mal mes arguments quelques peu rudimentaire ? Où songeait-il à comment il allait vite fuir d'ici, loin de ce petit littéraire qui devait lui faire bien pitié ?

« Je n'ai pas peur de mes sentiments, ni même de qui je crois aimer. Si je suis homosexuel, qu'il en soit ainsi, je ne les déteste pas, je ne me déteste pas. »

Il déposa sa canette sur le bureau et me jeta un coup d'œil. Un doux sourire vint se dessiner sur son visage tout en tapotant de son index sur le bois vernis.

Merde, à quoi jouait-il? J'avais l'impression de devenir fou, seul dans cette pièce avec cette gueule d'ange qui semblait se foutre de tout, même de ses propres sentiments qui semblaient le tirailler.

« Tu compte lui dire quand, à ce mec que tu l'aime?, demandè-je, Je veux dire. Il ne faudrait pas qu'il te file entre les doigts...

- J'ai peur qu'il aime quelqu'un d'autre. »

Je finis alors par me lever, posant à mon tour ma canette sur le bureau. J'avais un peu de peine pour lui, c'était normal après tout. Voir la personne que l'on aime, ne pas oser se déclarer, c'était douloureux.

Mais je pense que de nous deux, je devais être celui qui souffrait le plus. Mon cœur se serrait au fur et à mesure que notre discussion devenait de plus en plus évidente, il aimait quelqu'un, et j'étais loin de me dire qu'il s'agissait de moi.

Tristan était le genre de mec cool, qu'on pense qu'il n'a aucun soucis dans sa vie. Tandis que moi, tout le monde était au courant de ma situation familiale catastrophique et de mes tendance à me laisser dépasser par mes sentiments.

Merde, est-ce que je suis en train de pleurer?

Je sentis soudainement une main attrapé ma chemise, me tirant délicatement en arrière tandis que je chutai sur le sol.

Non. Pas de coups. Pas encore. Je n'ai rien fais de mal, maman, j'ai le droit de pleurer, j'ai le droit de ressentir...

Mon cœur se remplit d'amertume, mes larmes salées semblaient brûler mes joues d'un acide horriblement douloureux, je pleurai, et en plus de cela, devant le garçon que j'aimais... Je voulais mourir, me cacher dans un trou pour ne plus jamais en ressortir.

Mais Tristan m'embrassa.

Tristan.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant