Chapitre 9

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« Eeeeeh ma poule, qu'est-ce que tu fous là ?

-Service fini !

-Déjà ?

-Si ma gueule te dérange, dis-le de suite, trou du cul !

Les mains claquèrent entre elles dans un salut rapide, les rires fusèrent, et d'un lancer habitué, Éric se déchargea de ses affaires dans le petit local derrière le bar. Ce soir-là, Thomas était seul, s'affairant face aux quelques clients qui commençaient à se présenter. La soirée ne battait pas encore son plein. Il était tôt.

-Où est So' ?

-Malade ! Je me retrouve tout seul, t'y crois, toi ?

-Tu vas t'en sortir ?

- Ça va être coton, mais pas le choix.

D'une main rapide, Éric remonta ses cheveux, et les coinça dans un chignon hasardeux avec un élastique lâche qui trainait autour de son poignet. Quand il se glissa au côté de son collègue, celui-ci lui glissa un regard en biais.

-Tu sais que t'es pas du bon côté ?

-Je t'aide.

-Mais non, t'es con...

-C'est vendredi soir, dans deux heures tu vas crouler sous les demandes, on le sait tous les deux.

Thomas pinça les lèvres, ses yeux sombres s'étrécissant dans une fausse menace. Mais il abdiqua, faussement réticent tandis qu'Éric lui dédiait un sourire tout en dents, ricanant de sa réaction.

-Tu fais chier. Tu prendras en heures supp' ?

-Ouais. Gab' va regretter de m'avoir fait partir plus tôt.

-Mmh. Tiens, on va faire comme ça, approche.

Il était, d'après le barman, inimaginable de laisser le serveur s'occuper des cocktails, aussi lui donna-t-il la lourde tâche de gérer le service des bières et de certains alcools plus simples. Le nettoyage des verres que le jeune glass collector ramenait régulièrement, aussi. Il ne fallait pas posséder de grandes connaissances pour s'acquitter de ces choses-là, et bientôt, les manches de son pull retroussées jusqu'aux coudes, Éric officiait à ses côtés. La première heure fut pour le moins tranquille. Les gens en étaient encore à terminer leurs assiettes dans les restaurants ou chez eux.

-Alors, t'en es où de ton appart ? demanda Thomas alors que la tranquillité s'installait au bar.

-La peinture, c'est fini ! J'ai meublé, cette semaine.

-Quoi, t'as déjà tout repeint ?

-Depuis dimanche, ça a séché, là.

-T'es un rapide.

Avec un rire, Éric essuya un verre parmi ceux qui venaient de lui être ramenés.

-J'ai eu de l'aide.

-Qui, Van ? Guillaume ? Quand est-ce que t'as réussi à les appâter chez toi pour les faire bosser ? Ils savent tenir un pinceau ?

-Mais non. Je parle du mec que tu m'as fait ramener samedi soir.

Il insista sur le mot, retroussant les lèvres. Haussant un sourcil, Thomas le dévisagea un moment.

-Nooon ? T'as osé le faire bosser ?

-Oh, ça va, il n'est pas en sucre, hein.

-T'as aucune considération pour les autres ? Ce mec s'est fait larguer par tous ses potes et toi tu lui fais repeindre ton appart...

Ma femme s'appelle Eric [Passion au Manoir Pourpre 1] [édité]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant