Chapitre 5

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 Les mains sur ses hanches l'agrippaient, avec une motivation qu'il ne pouvait pas décemment désapprouver. Qu'il ne voulait pas désapprouver, même. Car c'était, il fallait bien le dire, la raison de sa présence ce soir-là, en cet endroit, et ses amis savaient parfaitement à quoi s'attendre en l'amenant ici. Contre son dos, un torse s'appuyait. Un bassin collait au sien. Une bouche glissait contre sa nuque.

Théo avait eu le temps, plus d'une fois, de voir le visage de celui qui avait attiré son attention et son corps, sur un, puis deux, puis trois rythmes endiablés d'abord. Les yeux clairs l'avaient happé, dans une sentence qu'il aimait vivre lors de soirées de ce genre. Une coupe un peu courte, des cheveux noirs, qui passaient par toutes les nuances sous les néons colorés de la boîte. Ce type avait-il le teint pâle, ou avait-il encore un bronzage un peu tenace après l'automne qui venait de se terminer ? Il l'ignorait, et ne le saurait peut-être jamais. Pas avec cette luminosité qui laissait libre court à l'imagination. Pas ici, pas dans l'immédiat, alors qu'il se prenait à soupirer sous une main qui glissait sous l'ourlet de sa chemise. Le rythme s'était considérablement ralenti après l'enchainement de chansons, les mouvements vifs, et l'alcool qui faisait son chemin dans leurs veines. Ses nerfs étaient devenus sensibles, sa peau réceptive à tout contact, le bout de ses doigts électriques à chaque frôlement, et son cœur s'emballait. Il faisait chaud. Il était brûlant.

Il avait le sentiment, après tous ces cocktails qu'ils avaient pris ensemble, après les aléas du début de soirée, que le cours normal des choses était revenu. L'ambiance était festive. Au fil des heures, il avait croisé le regard amusé de Richard, qui avait ensuite disparu pour faire ses petites affaires. De la part de Kyle, plus loin, il y avait eu un haussement de sourcil qui voulait tout dire. Et vu l'engouement de ce type à l'instant précis, il ne finirait peut-être pas la nuit seul, comme promis.

Théo s'entendait presque ronronner sous les lèvres qui l'assaillaient, qui mordaient la chair tendre de son cou, de son lobe. Le souffle était brûlant contre sa peau. Le bassin oscillait à droite, à gauche, appuyant et frottant contre le tissu tendu du pantalon que lui avait fait passer de force Yannick. Entre deux balancements des hanches, il la sentait, cette excitation qui répondait à la sienne, alors qu'il glissait ses propres mains le long des poignets de cet homme, accompagnant les mouvements, glissant contre lui et ouvrant la voie pour la continuité de la soirée.

Lorsqu'il fermait les yeux, il y avait cette sensation délicieuse et familière. Il se perdait dans un vertige excitant, celui où il s'abandonnait, frémissant et fredonnant, gémissant et savourant tout ce qui se présentait : l'instant, les gestes, les contacts. Une main emprisonna la sienne, leva son bras, le fit tourner, encore, encore, encore. Plusieurs fois, il eut le sentiment que ses pieds, qui ne se mouvaient probablement que par habitude et sous l'injonction de l'alcool, menaçaient de le lâcher. Mais ses jambes ne se dérobèrent pas, tandis qu'une main se refermait sur sa taille et qu'un corps robuste le maintenait. C'était ce qu'il aimait : cette sensation grisante de stabilité, de sécurité, lorsque des bras puissants était sur lui, quand un regard brûlant se posait dans le sien et qu'il savait.

Qu'il se savait être, pour les prochaines heures, entre de bonnes mains.

Mais pas plus.

Car ensuite, ce serait le retour à la vie réelle, le retour au quotidien, des salutations rapides, une séparation sans déchirement, et un café pour commencer une nouvelle journée. Un cachet pour la gueule de bois, aussi, il le savait d'avance.

Les basses frappaient sur la piste, envoyant des décharges dans les corps, dans le sien, dans celui de ce type qui dansait effroyablement langoureusement contre lui. Ou peut-être était-ce ce corps, qui l'électrisait ? Ou l'alcool. Ou les deux. Il sentait ses doigts engourdis. Sa peau frissonnait sous le simple contact des tissus. Et que pouvait-il donc dire, en ce qui concernait ces mains glissées sous sa chemise ? Elles le dévastaient déjà en de simples effleurements.

Ma femme s'appelle Eric [Passion au Manoir Pourpre 1] [édité]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant