Chapitre 4 : Dans la tête

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Alors que je m'approchais des vampires qui sortaient de leur réunion, j'ai cru remarquer qu'il y avait comme un certain ordre. Les premiers vampires à avoir quitté la salle me semblaient plutôt faire partie de ceux que j'avais repérés comme conservateurs. Il y avait notamment Charles Leduc et son costume old-school, vers lequel Séléna s'est dirigée dès qu'il est apparu.

Carmen, Thomas Rivière ou le jeune vampire entrepreneur qui avait pris la parole sur l'estrade étaient, eux, toujours dans la salle. J'ai donc attendu devant la porte pendant quelques minutes, n'osant pas entrer dans la pièce de peur qu'on me signifie qu'en tant que simple humaine je n'y étais pas la bienvenue.

Lorsqu'elle est finalement apparue, Carmen faisait grise mine. Pour autant que cette expression puisse s'adresser aux vampires, qui ont tout le temps la peau d'un blanc pâle. Sauf Séléna, évidemment, mais elle était un peu la seule à cet évènement : le visage moderne du vampirisme semblait quelque peu monochromatique.

Mais je digresse. Toujours est-il que Carmen tirait un peu la tronche, et était au milieu d'une discussion agitée avec Thomas Rivière et quelques autres vampires de son groupe. Je me suis approchée un peu d'eux lorsqu'ils sont sortis de la salle, mais je n'ai pas osé m'immiscer tout de suite dans la conversation. Heureusement, Carmen a capté mon regard interrogatif et s'est approchée de moi.

— Ça ne s'est pas passé comme prévu, m'a-t-elle expliqué à voix basse. Les conservateurs ont quitté la salle, et on n'a pas pu prendre de décision.

C'était donc pour ça que la réunion avait été relativement courte. Je me disais bien que ce n'était pas normal.

— À quel point c'est mauvais ? ai-je demandé.

— Dans le meilleur des cas, un peu de diplomatie permettra de régler les choses à la prochaine réunion. Dans le pire... des tensions, voire une nouvelle guerre entre vampires.

— Chiotte, ai-je dit.

J'avais toujours le mot pour une remarque pertinente. Carmen s'est passé une main dans ses courts cheveux noirs.

— Je pense que ça n'ira pas jusque-là. Personne n'a intérêt à ça.

Je me suis demandé si elle y croyait vraiment ou si elle essayait de se rassurer.

— Ça n'ira pas jusque-là, a assuré Thomas Rivière.

Le beau gosse en smoking avait dû entendre ce que me disait Carmen, même si c'était à voix basse. Les vampires ont la réputation d'avoir une bonne ouïe.

— Les conservateurs ont perdu, ils n'ont plus la majorité. Ils refusent de l'admettre et ont recours à des arguties techniques pour nous mettre des bâtons dans les roues, mais ça ne durera pas éternellement. Au final, c'est peut-être rassurant. J'aurais peut-être été plus inquiet s'ils n'avaient opposé aucune résistance.

— Je ne serais pas aussi optimiste, a répliqué Carmen. Je pourrais croire qu'ils ont décidé de livrer bataille sur le terrain du débat et des arguties réglementaires s'il n'y avait pas la présence de Bloody Mary. Elle n'a pas été envoyée là pour ça.

J'ai jeté un coup d'œil à Séléna. Elle était pratiquement à l'autre bout de la pièce, en train de discuter avec Charles Leduc. Le leader du camp conservateur n'avait pourtant pas l'air très heureux de ce qu'elle pouvait bien lui raconter.

— À propos de ça, ai-je dit, je pourrais te parler en privé, deux secondes ?

Carmen a froncé les sourcils, mais elle a hoché la tête et s'est écartée avec moi du petit groupe de vampires « modernistes ».

Les coups et les douleurs (La chair & le sang, saison 1, épisode 1)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant