Aime-moi

Chapitre 3

Il n'entend qu'un bourdonnement. Tout semble flou autour de lui. Il n'arrive pas à se concentrer. Que fait-il en cet instant ? Que se passe-t-il autour de lui ? Il n'arrive pas à le saisir.

Il est comme prisonnier d'un nuage de coton. Non, pas du coton, il n'est pas doux, il lui brûle la peau. Un nuage de laine de verre. Oui, il est prisonnier un nuage en laine de verre.

Il brûle ses yeux, sa gorge, mais surtout son coeur. Oui, c'est lui qui est le plus douloureux, son coeur. Il n'arrive plus vraiment à le sentir mais il le sait, la douleur est bien là, tellement forte qu'il n'arrive plus à la sentir. Tellement forte qu'il ne sait plus quoi faire.

Il croit percevoir du mouvement face à lui, peut-être même une chaleur sur ses avant-bras, c'est si léger comparé à cette douleur. Tellement léger. Peut-être que son nom est prononcé, il y a un bruit derrière le bourdonnement. Qu'est-ce qu'il dit ? Il n'arrive pas à le savoir. Il n'arrive pas à se forcer à le savoir. Il doit pourtant savoir, comprendre. Il faut qu'il retourne à réalité. Oui, c'est ça, la réalité. Il s'est sorti de la réalité. Il l'a sorti de la réalité.

Ce qui semble être une voix au travers du bourdonnement semble insistante. Pourquoi est-elle insistante ? Non, il doit se concentrer. Il doit comprendre ce qu'il se passe. Où est-il déjà ? Il n'arrive pas à le voir, tout est si flou. Que faisait-il avant ? Oh, il pensait. Oui, c'est ça, il pensait. A quoi pensait-il déjà ?

La douleur de son coeur semble se manifester à cette simple question. Il entend un grognement aussi. Un grognement ? Quel grognement ? Il semble passer le bourdonnement lui. Un grognement... Oh oui, c'est vrai, son loup. C'est forcément lui qui l'a mis dans cet état. Il a dû vouloir le protéger, mais de quoi déjà ?

Il essaye de prendre une grande inspiration. Il essaye de se concentrer, mais rien à faire. Il n'y arrive pas. Il n'a pas la force de le combattre. Ou peut-être ne le veut-il juste pas. Revenir à la réalité, ce serait accepter cette douleur, celle qui est si forte.

Cette douleur... Plus il se concentre, plus il ressent ces picotements dans son corps. Il arrive même enfin à sentir ses joues. Elles sont mouillées, il croit qu'il pleure. Pourquoi pleure-t-il déjà ? Surement parce qu'il a mal, tellement mal.

Il ne sait pas trop comment mais, il finit par discerner les contours de ce qu'il devine être des personnes. Beaucoup de personnes. Elles semblent proches mais pas trop non plus. Pourquoi elles sont là ? Pourquoi le regardent-elles ? Est-il un spectacle si distrayant ? Ou sont-ils tous inquiets ? Non, s'ils étaient inquiets, il serait proche, comme cette personne qui semblent tenter d'essuyer ces larmes. Tiens, quelqu'un le touche en fait. Depuis le début peut-être ?

Il essaye de se focaliser sur cette personne. Juste cette personne. Mais un couinement de son loup le distraît. Pourquoi couiner si soudainement ? Qu'est-ce qui l'attriste tant ? Il croit ne pas savoir mais au fond de lui, il sait pourquoi. Son loup et lui ne sont censé être qu'un alors pourquoi semble-t-il ne plus vraiment être lui ? Il est sûr qu'il ne le percevait pas autant avant, ou du moins pas comme une entité à part entière.

Il entend une voix tenter de passer le bourdonnement. Elle est différente. Elle est plus clair. Pourtant, il n'a pas l'impression que c'est cette personne devant lui. Non, cette voix, elle est dans sa tête. Cette voix s'immisce dans sa tête. Pourquoi ? Comment ?

Oh. Il croit comprendre. Oui, ça fait sens. Il est un loup-garou, il n'est pas seul. Il a toute une famille qui veille sur lui. Toute une famille qu'il n'arrive pas à atteindre. Il essaye, soudainement. Il veut les atteindre, ça fait si mal. Il veut ressentir leur présence. Juste un petit quelque chose qui lui permettrait d'oublier cette douleur.