Chapitre 2 : Immeuble enflammé

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Je surplombe la campagne ensoleillée et l'admire à travers les nuages. Je réalise quelques figures pour donner plus d'enthousiasme à mon envolée. Mes pensées restent confuses mais je tiens à profiter du moment. C'est mon moment.

Je place mes bras de chaque côté de mon corps pour sentir le vent caresser ma peau. Mes doigts bougent légèrement pour sentir l'air autour de moi. J'adore cette sensation. Celle de pouvoir être moi-même et de vivre réellement.

Je ferme mes yeux quelques instants, me laissant guider par mes autres sens. Mes ailes planent en fonction des courants et mon corps se mouve selon les odeurs ou les sons. Soudain mon ouïe perçoit un bruit inhabituel. J'entends des cris.

Mes paupières se soulèvent instantanément et je cherche du regard de quoi peut-il s'agir. Je suis le chemin du retour et il doit être cinq heures de l'après-midi. Je décide de descendre légèrement pour comprendre l'origine des hurlements.

C'est à ce moment que je vois l'inimaginable. Une fumée épaisse se dégage dans l'atmosphère. La couleur rouge des flammes englobe chaque parcelle de ma vision. J'entends la sirène des pompiers au loin mais je sais qu'ils ne pourront jamais venir à bout de cet incendie. Ils n'arriveront pas à sauver tout le monde.

Je comprends que les cris qui m'ont attirée proviennent de cette catastrophe. Je survole la zone en haut du ciel sans savoir quelle décision prendre. Pourtant, je sais au fond de moi ce que je dois faire. Je ne peux pas laisser ces hommes, ces femmes et peut-être ces enfants mourir devant mes yeux. Je dois agir même si cela met en danger mon identité.

Mes parents ont tenu toute leur vie à me tenir éloignée de la civilisation mais ce temps est terminé. J'ai bientôt onze ans et je ne veux plus obéir à mes parents. Je ne veux plus être cachée.

Après une inspiration profonde, mon corps se laisse tomber pour rejoindre la terre ferme. Je ralentis mon avancée quand j'arrive près du bâtiment en flammes. Les gens autour appellent en vain leur famille restée coincée à l'intérieur. Ils ne remarquent pas ma présence.

Je fais plusieurs fois le tour pour analyser au mieux la situation. Les pompiers arrivent et ne tardent pas à s'équiper pour porter secours. Je reste quelques instants en retrait, encore hésitante. Je vois pourtant que les hommes habilités à combattre les feux ne sont pas sûrs d'eux. Je les entends même dire.

- Ce feu est gigantesque, personne n'a pu survivre dans cette fournaise. Murmure le dirigeant, ébahi par cet immeuble en feu.

- Qu'est-ce qu'on fait sergent ? Demande un novice.

- Commence à éteindre le feu et on ira sauver les personnes quand cela sera dégagé.

Leurs paroles me prouvent qu'il faut que j'agisse. Alors, sans perdre de temps, je plonge dans les abscisses. J'entre par une fenêtre au dernier étage et avance prudemment. Je me protège du feu grâce à mes ailes qui me servent de bouclier. Je pose un pied devant l'autre sans savoir ce qu'il va m'arriver si je fais un faux mouvement.

Soudain, une respiration difficile éveille mon attention et je me dirige vers le bruit. Je vois devant à quelques mètres, une femme d'un certain âge qui essaye vainement de s'échapper. Je me déplace jusqu'à elle et l'aide à se lever. Elle tourne son regard vers moi et je vois dans ses pupilles toute la peur qu'elle éprouve.

Je fais le chemin du retour, tout en soutenant la blessée. Arrivée à la fenêtre, je me penche en avant et comprends rapidement que la hauteur ne me permet pas de faire descendre cette personne. Sans moi, elle sera prisonnière des abîmes.

La femme affaiblie commence à s'inquiéter et cherche du regard une échappatoire. Je réfléchis à la meilleure option et lui dis calmement à travers ses pensées.

- Vous devez me faire confiance.

La dame me dévisage, hésitante et hoche finalement de la tête. Je regarde une dernière fois le bas de l'immeuble où se trouvent les pompiers et réalise mon plan.

Je pousse la victime des flammes dans le vide. 

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