Il ne pleut pas. On ne peut pas dire qu'il pleut. C'est une rivière qui coule du ciel, ou peut-être qu'un quelconque dieu renverse lui-même de l'eau sur nos petites têtes d'humains. Mais ça n'est certainement pas de la pluie. Une tempête, à la limite.
Abrité sous le préau, je tente vainement de me réchauffer sous mon sac. C'est bien évidemment un échec prévisible. Mon sac est tellement fin que je suis obligé d'oublier délibérément certains cahiers pour qu'il ne craque pas. Le vent glacial s'engouffre à l'intérieur, paralysant littéralement l'intégralité de mon corps à chaque rafale.
Il fait si froid qu'on se croirait en plein hiver au Groenland. Alors que non, nous sommes bel et bien en France, au début du mois d'avril. La météo et moi, ça fait quarante-douze, alors je suppose que c'est normal.
Évidemment, le préau est bondé de monde et est par conséquent plus bruyant que jamais. Un groupe 3èmes crient et se bousculent en rigolant comme des brutes. Ils possèdent à eux seuls les trois quarts du volume sonore.
Si je n'étais pas aussi faible, aussi timide, aussi lâche, aussi introverti et aussi flemmard bref, si seulement c'était possible, j'irai leurs geuler de se taire. Mais je suis faible, timide et lâche. Et fatigué. Alors je dois supporter leurs beuglements.
Exaspéré, j'observe le reste des élèves présents sous le préau. Les filles de ma classe -Idrissa, Viviane, Alice, Manon et Audrey pour ne pas les citer- se tordent de rire dans un coin, en matant discrètement -quoique, si j'arrive à les voir c'est qu'elles ne sont pas si discrètes que ça- les mecs de 3ème et 4ème. Quand à eux, ils sont assis en cercle à l'opposé des stalkeuses et on l'air de s'en battre les artichauts. Hypocrites.
Des couples s'enlacent un peu partout. Les populaires de 5ème squattent le milieu du préau et les 6èmes ont les meilleures places, au fond. La où il fait chaud. Les autres s'entassent dans les toilettes à la recherche d'un minimum de chaleur, et se font aussitôt virer par les surveillants.
Et puis il y a Tom. Inexorablement seul, se foutant royalement des conditions météorologiques. Il est assis dans la cour, trempé, et a réussi à s'endormir. Sa veste carrelée rouge n'a pas l'air épaisse du tout, pourtant. Je ne saurais pas dire si il fait preuve de flemme de courage. Bien qu'il serait stupide de se laisser inonder par pur bravoure... Finalement, je pense que ce gars déteste encore plus le bruit que m...
Un sac percute mes côtes avec violence. Je me tourne immédiatement vers la personne qui va très rapidement mourir dans d'atroces souffrances...
- Oh Suzie salut ça va attends je vais te faire de la place...
Non, je ne suis pas une victime. Mais Suzie est ma seule amie, je vais pas la tuer quand même...
Elle ne me regarde même pas et s'assied à côté de moi. Non mais je t'en prie, balance ton sac sur moi et ne m'adresse pas la parole surtout ! Je vais la tuer.
Soudain, elle lâche un soupir effrayant me lance un regard meurtrier. Non, un regard tueur en série. Le genre de regard qu'elle seule est capable de lancer. Un regard Suzie.
- Tu vas bien toi, petite larve ? Grogne mon amie.
Suzie n'est pas méchante. Mais quand elle est énervée, elle est incompréhensible.
- Non. T'es en colère à cause de ton chat ou de Baptiste cette fois ?
- Ta geule s'il te plaît.
Bon. Très bien ça n'est ni son chat, ni son petit frère. Je me blotti contre elle. Si il y a bien une chose qui peut la réconforter, c'est un câlin. Cette fille est adorablement câline. Elle me prend dans ses bras, et je jurerais l'entendre pleurer. Mais hors de question de lui demander. Elle me tuerais. Alors je la garde dans mes bras en silence.
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Sable
RomanceL'amour, c'est comme du sable. Ça s'infiltre partout, ça vole, ça colle et c'est chiant. Mais putain, qu'est ce que c'est beau. Je ne suis pas régulier. Mes chapitres sont courts. Ce livre sera peut-être un peu nul. Mais j...