Chapitre 8

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J'étais rentrée à leur suite, les mains dans les poches, le visage fermé. James retenait les portes de l'ascenseur pour moi en me regardant avec son habituelle expression impassible. Mais lorsque je me mis à sonder son regard, j'y découvris une pointe de culpabilité.

T'as de quoi te sentir coupable. Arrête de retourner le couteau dans la plaie. J'ai beau te considérer comme mon frère, il y a une limite à ne pas franchir. Et tu t'en rapproches dangereusement.

Je montai sans dire un mot, gardant la tête basse, ne voulant pas croiser leur regard. Je sais faire semblant. Avoir un visage joyeux alors que je souffre le martyr n'a jamais été un problème. Sauf que là je n'en ai pas envie. De toute manière, c'est les BTS, ils ne se souviendront plus de moi dans quelques jours. Pas besoin de me forcer pour eux.

Les portes s'ouvrirent sur un couloir au mur blanc. "Tout ce qu'il y a de plus banal en soit", songeais-je.

Je sortis la première et marchai à la tête du groupe. James, comme à son habitude, restait un pas derrière moi. Vestige de l'armée quand tu nous tiens.

Je me dirigeai dans les bureaux avec une grande facilité. Au détour d'un couloir, je pris la première porte à droite et rentrai sans faire part de ma présence.

La salle de réunion était bondée. La jeune femme qui faisait la présentation fronça les sourcils en me voyant débarquer de cette manière mais ne fit aucune réflexion. James retint les autres dans le couloir, me laissant seule dans la salle. Je refermais la porte derrière moi alors qu'il faisait comprendre silencieusement au groupe de me laisser gérer la situation.

Un des hommes assit autour de la table se leva avant de dire sur un ton insurgé :

- Excusez-moi jeune femme, mais vous n'avez aucunement le droit de vous trouver dans cette salle.

- Au contraire, le coupa la femme debout devant la table circulaire. Elle en a tout à fait le droit. La personne qui est en face de vous travail pour moi et je lui en ai donné l'autorisation. Veuillez vous rasseoir pour que je puisse terminer ma présentation.

L'homme d'affaire serra les poings de rage.

- Peu importe son rang dans cette société, on n'entre pas comme ça en plein milieu d'une réunion d'une telle importance! Sans compter que si elle était aussi importante que vous le dîtes, je saurais qui elle...

- Silence, dis-je sur un ton glacial, le foudroyant du regard.

Devant mon ton de voix impérieux, il se figea brusquement, écarquillant les yeux. Un frisson de peur le parcourut alors qu'il se rasseyait à sa place, la bouche pâteuse. Il ne savait sans doute pas comment une gamine comme moi avait fait pour le calmer de cette manière. Mais il valait mieux pour lui qu'il ne sache pas comment j'avais appris à mater mes opposants.

Je détournai mon regard de cette personne qui m'indifférait et fis un léger signe de tête à Leila.

- Bien, comme je vous le disais, notre taux de pro...

Je n'écoutais que d'une oreille, scrutant les personnes dans la pièce. Tous des hommes dans la quarantaine. Celui de tout à l'heure n'arrivait pas à rester calme en ma présence. Il sentait un danger venant de moi, mais il ne parvenait pas à en saisir la source.

La personne à sa gauche ne m'avait prêté que peu d'attention lors de ma dispute avec son collègue jusqu'à ce qu'on évoque mon rang. Il est intéressé par le bénéfice et le pouvoir.

Celui qui était en face de lui, et dos à moi ne cessait de jouer avec son crayon. Chez certains, c'était un signe de réflexion, chez d'autre, d'ennui. Et quand je me mis à regarder son reflet dans la vitre qui nous faisait face. La vue qu'il admirait n'était pas celle qu'il laissait supposer.

Calmement, je posais ma main droite sur mon décolleté avant de lui faire un majeur à travers le reflet de la vitre.

La seconde suivante, son crayon tomba.

- Monsieur Zokovik, si ce que je vous raconte ne vous intéresse pas, vous savez où se trouve la sortie.

Leila avait parlé d'une voix glaciale. Le principal intéressé ouvrit la bouche mais il n'eut pas l'opportunité de parler.

- En faite non, reprit la petite amie de James. Vous pouvez prendre la porte, j'en ai plus qu'assez de vous voir baver comme un bambin devant son biberon.

Une chape de plomb eut l'air de lui tomber sur les épaules. Je ne réagis pas à la remarque de Leila, tandis que les collègues du pauvre malheureux se retenaient tant bien que mal de rire.

Le fautif rassembla rapidement ses affaires, évitant tout regard avec les personnes occupant la pièce pour sortir en trombe de la salle. Je lui ouvris la porte, le laissant passer devant moi alors qu'il me marmonnait un "merci" gêné. Bon sang, c'est que maintenant que tu te sens gêné.

En refermant la porte, je croisa le regard de James qui attendait dans le couloirs avec les autres. On ne se regarda que quelques dixièmes de secondes, mais il comprit immédiatement ce que j'avais en tête. Je le vis lâcher un lourd soupir en secouant la tête avant que je ne referme la porte. Je retournai à ma place comme si de rien n'était avant de me remettre à dévisager les occupants de la pièce.

"Plus que deux."

Bultaoreune //BTS (en pause)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant