I- "Ma maîtresse, ma confidente"

39 8 2
                                    

Welmington House, Oxfordshire, Lundi 20 mai 2010

Par ce temps magnifique de printemps, je me réveille. Comme tous les matins qui ont jalonné ma vie, depuis 90 années, je me lève et me prépare. Comme un robot je reproduis les mêmes gestes. Je ne me plains pas cependant, je suis en forme, quelques rhumatismes par ci par là mais rien de bien méchant, on a connu pire pendant la guerre. Cette journée pourtant s'annonce différente des autres qui se succèdent à une vitesse digne d'un escargot, ou pire, digne des rouages de Big Ben. Big Ben, une horloge qui depuis des siècles régit Londres, c'est une belle comparaison que je peux faire avec moi : une antiquité qui fonctionne encore et régit encore la vie de quelques personnes. Différente en effet est cette journée, car je vais accueillir dans ma demeure mon cher petit-fils Thomas. Il a 15 ans, est tourné vers les technologies actuelles et n'entend rien à l'Histoire. Pourtant, il continue à venir voir son grand-père ; ce vieux fou qui ne parle que du Passé. Je descends les trente marches qui séparent ma chambre de la salle à manger ; chaque matin c'est la même chose et je ne peux m'empêcher de penser que c'est grâce à cet exercice perpétuel que mon corps tient encore le coup ! Thomas est un gamin de la ville, un Londonien pur souche, alors pour le récupérer je suis obliger de me rendre à la capitale. Puisque j'ai le temps, je pense me rendre à la caserne où j'ai fait mes débuts : l'Académie Royale de Sandhurst dont je suis président d'un club des anciens élèves. Ayant eu cette idée, je décide donc d'aller me changer. Je ne peux pas entrer dans cette zone militaire en tenue civile, je vais donc revêtir mon uniforme. Quelle fierté d'enfiler cette tenue, même à mon âge, après avoir vu et vécu des choses extraordinaires, le simple fait de m'habiller ainsi me donne des frissons. Bien qu'ayant un grand âge (90 ans) je ne peux me résoudre à laisser l'armée derrière moi, cette grande Dame qui a été ma maîtresse, ma confidente pendant 74 ans. Une fois prêt, je positionne ma casquette sur ma tête et par rejoindre ma voiture de fonction (j'ai réussi à avoir la faveur de garder un aide-de-camp même si je ne vis plus sur une base militaire). Après une heure de route environ, me voilà devant l'imposante bâtisse, qui, depuis des siècles forme l'élite des officiers de notre Grande Armée. L'union Jack flotte en maître, majestueux sur le fronton du bâtiment central. Un jeune élève-officier, probablement de garde, s'approche du véhicule afin de savoir ce que je fais là. Son air sûr et quelque peu hautain je dois l'avouer se change très rapidement lorsqu'il me reconnaît ou plutôt lorsqu'il reconnaît les insignes sur mes épaulettes. Immédiatement, il se met au garde-à-vous. Ne voulant pas que mon grade ou bien même mon influence me donne un « passe-droit » je décline mon identité :

- Bonjour élève-officier, je suis le général James Arthur Foyle, je viens voir votre commandant, le Major-Général Marriott.

Je sors rapidement (si je puis dire) de la voiture et le salue comme il se doit. Je suis toujours très heureux de voir de jeunes personnes prêtes à s'engager dans l'Armée. Celui-ci doit avoir environ le même âge que j'avais quand moi-même j'ai rejoins les drapeaux.

- Monsieur, euh mon général, je suis navré mais le commandant n'est pas là. Il est allé à Bulford Camp. Me dit ce jeune homme tout-à-fait déstabilisé par la situation. Il fut un temps où j'aurai probablement pris le partie de le taquiner mais aujourd'hui je n'en ai plus l'envie. Je préfère donc le rassurer.

- Ne vous en faites pas. Je venais simplement le voir mais aussi retrouver cette école. Voudriez-vous me servir de guide ? Oh et si on vous demande, vous direz que c'est un ordre.

- Bien monsieur. Me répond-il toujours droit comme un piquet. Le pauvre je fais cet effet là à tout le monde ; sauf à une personne : la Reine.

Après quelques minutes, mon accompagnateur se décide enfin à briser le silence :

Papy raconte-moi la GuerreWhere stories live. Discover now