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À l'école, Tala n'était pas comme nous. On le savait et elle le savait aussi. Peut-être que c'étaient ses parents qui lui avaient dit, peut-être que nos regards lui avaient fait comprendre. La première fois son sourire avait été tellement rayonnant qu'on en avait eu peur. Ses dents étaient si blanches, et son attitude de ne pas attendre l'approbation du maître pour prendre la parole, de toujours rectifier les erreurs des autres à haute voix, d'une voix de « je-sais-tout » que l'on imitait avec des regards moqueurs, sa manière de marcher, de s'habiller, de courir en sport, de jouer dans la cour de récré... Tout, absolument tout, attisait notre haine étouffée.

Mais on la partageait, et à plusieurs, on se sentait invincible. Alors, on continuait de rire, de souffler, de l'imiter, un an, puis deux, ensuite sept et à dix, on avait enfin mis un sens à nos agissements. On savait pourquoi on faisait ça. On avait trouvé des excuses pour justifier ce pourquoi. Elle est bizarre. Elle nous parle mal. Elle est agressive. Elle a des poux, il ne faut pas l'approcher. On ne se jetait pas de pierre pour punir notre méchanceté. Non. On les jetait sur elle.

Et les professeurs se fichaient pas mal de ce qu'on disait, pensait, faisait. Ils en parlaient dans leur salle secrète où, comme le nom indiquait, tout y restait secret. Ils riaient même des attitudes que l'on prenait. Et le soir, en y réfléchissant, je les maudissais. Élèves comme enseignants, on se prenait pour des grands. Mais on était tous des enfants.

TALA : IL N'AVAIT D'YEUX QUE POUR ELLEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant