Gymnaste en péril

Ne pas réfléchir

PDV EMMY

Emmy fut réveillée par ses amies qui lui sautèrent dessus en lui souhaitant un joyeux anniversaire. Voilà, elle avait enfin 18 ans. Elle n'était habituellement pas du matin et les aurait donc probablement jeté dehors à coup de mocassins si elles avaient osé venir la réveiller ainsi n'importe quel autre jour de l'année.

Mais c'était son anniversaire, alors elle allait faire un effort. Surtout que sa coach entrait avec un cadeau dans les bras.

- C'est de nous toutes, lui annonça-t-elle en lui tendant le carton emballé.
- Oui mais c'est Maman qui a eu toute l'idée, sourit Louise redonnant le crédit à sa mère.

Eva quant à elle, se contentait de sourire en attendant qu'Emmy se décide à ouvrir son présent.

C'est donc ce qu'elle fit. Elle découvrit avec plaisir qu'il s'agissait d'un kit avec pleins de petites enceintes qui avaient été peintes à la main avec des illustrations de gym.

Elle adorait la musique et avait toujours rêvé de mettre des enceintes dans sa chambre pour ne pas toujours être obligée de mettre la musique sur son téléphone  portable. Le souhait était resté enfoui puisqu'elle n'avait ni le temps ni l'argent pour ce type de dépense. Le fait que sa coach ait pensé à ce cadeau montrait à quel point elle faisait attention à elle et cette pensée fit immensément plaisir à Emmy.
Elle était vraiment une seconde mère pour elle.

Eva annonça joyeusement qu'elle était l'auteur des peintures et Emmy la remercia chaleureusement, les trouvant magnifiques. Finalement, elles installèrent les enceintes à différents endroits de la chambre "pour une écoute 360" comme disait Louise et elles commencèrent à danser sur les derniers tubes avant que leur entraîneuse ne les rappelle à l'ordre. En effet, elles n'avaient plus que 10 minutes pour être changées et être descendues au self pour leur petit déjeuner.

C'était les vacances, elles n'avaient donc pas cours mais bien gym. 

Pour une fois bien réveillée, c'est avec plaisir qu'elle prit part aux habituelles conversations matinales entre Eva et Louise. Cette dernière était particulièrement heureuse aujourd'hui car elle reprenait l'entraînement sur les agrès après sa blessure. Emmy se promit que maintenant qu'elle le pouvait, elle s'habillerait en écoutant de la musique, histoire de se mettre de bonne humeur du matin.

Elles se dirigèrent ensuite vers le gymnase. Elle firent les échauffements habituels et Frank, l'entraîneur, lui demanda de s'entraîner aux barres. Elle y alla donc, et commença avec une bascule équilibre simple. Se sentant en forme, elle décida de passer quelques Jaeger. C'était un mouvement qu'elle avait mis bien plus longtemps que les autres à avoir mais qu'elle réussissait très bien depuis. Elle attrapa donc la barre la plus haute et commença à faire des soleils. Elle sentait que quelque chose était étrange, mais elle ne s'en inquiéta pas plus que ça et lança son Jaeger.

Elle ne comprit pas ce qu'il se passait. Mais ses jambes heurtèrent la barre et elle se sentit tomber la tête la première. Elle savait qu'il fallait qu'elle réussisse à pivoter sans quoi elle pouvait se briser la nuque mais la peur et la vitesse la pétrifièrent. Finalement, elle sentit des bras autour d'elle et elle ne toucha pas le sol. Les bras la remirent à l'endroit et elle put se rendre compte que son sauveur n'était autre que Frank, son entraîneur. Elle le remercia mais il se contenta de lui lancer d'un air dédaigneux qu'il fallait qu'elle apprenne à vérifier que ses barres étaient serrés. En effet, pour une raison inconnue, les siennes n'était pas correctement serrées et donc, en lançant son Jaeger le choc les avait fait bouger, ce qui avait entraîné sa chute.

Emmy fronça les sourcils. Jamais elle n'avait eu de problème d'agrès mal-fixés et voilà qu'elle manquait deux accidents en deux jours à cause de ça ?

Son entraîneur la fit immédiatement refaire son mouvement et elle le réussit sans problème cette fois-ci. Elle n'était peut être pas gracieuse ni très rapide pour apprendre les mouvements mais au moins, elle ne réfléchissait jamais au point de se bloquer. C'était bien son plus gros point fort à la gym et son plus faible dans la vie de tous les jours : elle ne réfléchissait jamais avant de faire quelque chose.

Ayant été témoin de l'incident, sa coach était revenue la voir pour s'assurer qu'elle allait bien. Dans la même journée un peu plus tard, alors qu'elle travaillait des enchaînements toujours aux barres, Emmy entendit un cri de douleur.

Se retournant, elle vit Eva au sol, à côté de la poutre, tenant douloureusement sa cheville. L'infirmière et la kiné arrivèrent rapidement alors que Dorine, l'entraîneuse, leur expliquait ce qu'il s'était passé. Alors qu'Eva travaillait sa rondade demi-vrille sur poutre, elle s'était soudainement décalée au milieu de sa demi-vrille. Dorine qui la paraît avait voulu l'aider et l'avait rattrapé sans quoi sa chute aurait pu être bien plus grave.

Cependant, la cheville y était restée.

Les entraîneurs préférèrent arrêter l'entraînement ici face aux nombres d'incidents et Emmy et Louise remontèrent dans leurs chambres.

Emmy songea qu'elle aurait pu mourir le jour de ses 18 ans avec cette histoire de barres. Elle lança un regard à son téléphone et constata douloureusement que sa mère ne lui avait rien envoyé pour son anniversaire. Elle ne l'avait pas appelé non plus.

Songeant qu'elle avait sans doute une bonne raison, Emmy s'empressa de composer le numéro.

Mais sa mère ne lui accorda pas le temps qu'elle aurait voulu. Il fallait qu'elle s'occupe des autres, mais elle lui souhaitait un Joyeux Anniversaire de loin. En moins de 10 minutes, l'appel était terminé.

Emmy fut morose quelques minutes, puis relativisa. Sa mère faisait sans doute de son mieux de toutes manières. Et puis, c'était pour elle qu'Emmy faisait tout ça. Pour la rendre fière. Pour la remercier de ses sacrifices.

Entendant qu'Eva était rentrée, Emmy l'a rejoignit. Elle apprit que ce n'était rien de bien grave mais que ça faisait sacrément mal, si bien qu'elle n'allait pas pouvoir s'entraîner (voire même marcher) pendant quelques jours. De ce qu'elle comprit, Dorine avait directement compris et soutenue sa décision de se reposer quelques jours tandis que Frank était contre et voulait quelque reprenne l'entraînement au plus vite.

Emmy rassure Eva, lui expliquant que Frank était sans doute  un cas désespéré. Comme la veille, elles passèrent une très bonne soirée à rire et raconter des anecdotes.

Eva était définitivement devenue une de ses amies.

Une fois couchée dans sa propre chambre les pensées d'Emmy  dérivèrent vers tous ces accidents. Les barres, la poutre déréglées. Ça n'avait jamais eu lieu. Quelqu'un devait forcément être derrière tout ça. Elle trouva l'idée stupide à peine l'avait t'elle eu. Mais elle n'arrivait pas à se le sortir de l'esprit. Si quelqu'un trafiquait réellement les agrès, il le faisait forcément de nuit. Le matin, tout le monde entre dans le gymnase en même temps. Et puis il risquerait d'être vu. Non. C'était forcément la nuit.

Emmy n'y réfléchit pas plus que ça et songea que si quelqu'un s'amusait à dérégler les agrès la nuit autant qu'elle le prenne la main dans le sac. Il lui aurait suffit de prendre l'habitude de vérifier ses agrès pour être en sécurité mais elle n'avait pas réfléchi jusque là et était déjà sortie du lit. A pas de loup, elle descendit jusqu'au gymnase. Le silence et l'atmosphère du lieu la nuit lui donnaient des frissons. La seule chose qu'elle entendait était sa respiration. Elle s'approcha d'une fenêtre intérieure par laquelle on voyait la salle de gym et tendit le cou à la recherche d'une ombre ou d'une trace quelconque du passage de quelqu'un. Elle était sacrément concentrée car elle ne se rendit pas tout de suite compte qu'il y avait maintenant un écho à sa respiration.

Celle de quelqu'un d'autre, tout près d'elle.

Avant qu'elle n'ait pu réagir une main s'abattait sur sa bouche tandis que l'autre lui entourait la taille et elle se faisait traîner en arrière.