Un (non)-héro

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PDV ADAM

Adam connaissait le gymnase comme sa poche. Peut être même un peu mieux. Il y avait grandi en même temps que les gymnastes qui s'essoufflaient chaque jour sur les agrès. D'ailleurs ils les connaissaient tous et toutes. Mais aucun d'eux ne le connaissait. Il était l'homme invisible, celui auquel personne ne faisait véritablement attention.

Il n'était pas gymnaste au Pôle non, il était le fils de "l'homme de ménage". De ce fait, ils habitaient au gymnase, en dessous des chambre des gymnastes.

 Quand il était petit, Adam passait des heures dans la salle de gym, à regarder les gymnastes s'entraîner. Il trouvait ça fascinant. Et puis, il n'avait pas grand chose d'autre à faire. En grandissant, il avait arrêté, se rendant bien compte que si c'était mignon de voir un enfant se balader sur les tapis et admirer les gymnastes, c'était beaucoup plus dérangeant de voir un adolescent faire la même chose. Pour continuer à accéder à la salle, il avait donc commencé à aider son père. Petit à petit celui-ci avait commencé a lui déléguer du travail qu'Adam s'appliquait à faire soigneusement en rentrant de l'école.

Un jour, il avait obtenu le Graal ultime. En atteignant ses 18 ans il s'était fait officiellement engager aux côtés de son père, en parallèle de ses études. Ses journées étant occupées par l'école, il travaillait le soir tard.

C'est le moment où vous le plaignez, parce que vous songez que faire le ménage pendant la nuit après une journée de cours doit être ab-so-lu-ment affreux. Et vous n'avez pas totalement tord. Mais vous oubliez où il fait le ménage. Maintenant imaginez que vous ayez presque tous les soirs, pour vous tout seul, une salle d'entraînement de Pôle de Gymnastique. Et tous ses équipements. Bien sûr, si quoi que ce soit avait la moindre égratignure, il se le serait fait reprocher. De toutes manières, il se contentait de nettoyer les agrès, bien qu'il les ait déjà bien sûr tous essayé. Il n'avait jamais tenté quoi que ce soit de très audacieux : il n'avait pas cette inconscience. Si la moindre chose tournait mal, personne ne pouvait lui venir en aide et lui et son père pourraient dire adieu à leur emploi.

Par contre, il passait son temps dans la fosse. Il ne pouvait pas réellement se faire mal sur les agrès menant à celle-ci et il adorait les sensations que ça lui procurait. Il avait d'ailleurs appris à faire un salto arrière de l'arrêt, mais il ne le faisait qu'en étant certain d'atterrir dans la fosse.

Ce jour là, il venait de terminer une longue journée  de cours, mais il profitait maintenant d'une semaine de vacances bien méritées. Fatigué, il repassait un dernier coup de balai dans le gymnase lorsqu'il vit la fosse du coin de l'œil. Il termina rapidement son travail avant de tirer un tapis jusqu'à la fosse et de faire quelques saltos.

Il adorait cette sensation.

Mais très vite, il se figea. Il ne comprit pas tout de suite pourquoi il était soudainement aux aguets.

Il retint même sa respiration pour faire le moins de bruit possible et, dans le silence de la nuit, il comprit.

Quelque chose n'allait pas.

Il en avait passé des nuits ici. Innombrables. En été, en hiver, sous le soleil et sous la grêle. Le gymnase n'avait aucun secret pour lui. Il connaissait chacun de ses grincements, craquements et autres bruits funestes.

C'est bien pour cela qu'il était en capacité de dire que quelque chose n'allait pas aujourd'hui.

Ça aurait pu être n'importe quoi et pourtant son intuition lui criait quelque chose qui lui glaçait le sang.

Il n'était pas seul.

Adam n'allumait la plupart du temps pas la salle quand il y travaillait. Son père la nettoyant toute la journée elle était déjà plutôt propre et les éclairages publics de la rue traversaient facilement les fenêtres. Mais aujourd'hui il s'en voulu, parce que ces éclairages laissaient beaucoup d'ombres dans lesquelles se cacher.

Il tenta de se résonner. Ce n'était peut être que sa patronne, la directrice des lieux. Il ne risquait pas grand chose dans ce cas-là, elle l'aimait beaucoup l'ayant vu grandir et c'était bien la seule raison pour laquelle elle l'avait embauché.

Mais cette version ne correspondait pas. Elle n'avait rien à faire au gymnase à une telle heure. Surtout qu'elle détestait l'endroit et tentait désespérément de trouver quelqu'un pour la remplacer depuis des années.

Et puis, elle ne se serait pas gênée pour mettre la lumière. Alors que celui qui était là n'avait même pas de lampe de poche.

Il ne voulait pas être vu.

Il y eut soudainement un grincement très fort et distinct vers les agrès des filles, de l'autre côté de là où se trouvait Adam.

Prenant son courage à deux mains, il tenta de se rapprocher pour apercevoir quelque chose.  Mais le silence était revenu.

Adam recula dans un coin pour avoir toute la salle en visuel et sentant toujours une présence, eut une réaction stupide. Le genre de comportement qu'ont les "gens rationnels" dans un film d'horreur.

Il lâcha un :

- Il y a quelqu'un ?!

Et s'en voulut immédiatement.
Très bien ça, Adam, merveilleuse idée. Vous voyez les enfants, quand vous êtes avec un inconnu ayant probablement de mauvaises intentions et qu'il ne vous a pas vu, n'hésitez pas à clairement lui indiquer votre présence et votre emplacement. Ne pas hésiter non plus à lui offrir une tasse de thé tant que vous y êtes, ce serait bête de se priver des formules de politesse.

Personne ne répondit bien entendu mais des petits pas précipités se firent entendre et très vite, un claquement de porte étouffé résonna.

Comprenant qu'il était de nouveau seul, Adam récupéra rapidement ses affaires et rejoignit sa chambre où il s'enferma.

C'est seulement une fois dans son lit que son rythme cardiaque se calma un peu.

Il arriva à deux conclusions :
Premièrement il n'était définitivement pas un héro plein de courage.

Deuxièmement, si n'importe lequel des films apocalypse qu'il adorait regarder venait à se réaliser,  il serait l'un des premiers à y passer.

Et d'une façon bien stupide, du type s'auto-griller en indiquant sa location en demandant s'il y a quelqu'un.

Oui, c'était définitivement lui.

Gymnaste en périlOù les histoires vivent. Découvrez maintenant