Chapitre 7 Marine

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Mon cerveau est partagé entre le sentiment de confiance que mon cœur souhaite lui imposer et la peur présente en moi depuis tellement longtemps. Ce Lloyd m'inspire confiance contrairement aux autres hommes que j'ai croisés auparavant. Je suis face à un dilemme, dois-je lui faire confiance ou au contraire dois-je me méfier de peur qu'il n'en profite. Je ne veux pas me lancer dans la gueule du loup trop vite. Je ressens son regard insistant mais ne relève pas la tête pour autant. Je ne veux pas qu'il voit la détresse et la peur en moi. Je ne veux plus être cette petite fille qui se laisse faire, je veux me battre une bonne fois pour toute même si ma vie doit s'arrêter. Je sens son exaspération face à mon mutisme à sa respiration qui se fait plus imposante dans le silence nous environnant. Je récupère le collier posé sur ma jambe. Une larme de tristesse coule sur ma joue. La douleur d'un père tué en mission, d'une mère et d'un frère morts dans un accident et les souvenirs d'un gouffre s'ouvrant sous mes pieds lorsque j'ai compris que je serai seule. Un espoir m'avait parcouru lorsque j'ai rencontré ma première famille d'accueil mais cet espoir avait vite disparut laissant place à la souffrance et la peur.

- Ils me manquent tellement que je pourrai donner ma vie pour les retrouver.

Ces mots sont sortis tout seul. L'incompréhension sur le visage de Lloyd m'oblige à continuer.

- Mes parents et mon frère étaient la seule famille que j'avais.

- Que leur est-il arrivé ?

- Ma mère et mon petit frère sont morts dans un accident de voiture peu après mes huit ans. J'étais avec eux ce jour-là. J'étais assise à l'arrière car mon frère n'avait que quelques mois. Un camion nous à barrer la route. Je ne me souviens pas très bien de la suite mais je me rappelle des dernières paroles de ma mère, elle m'avait promis que tout irai bien, que ce n'était rien. Un simple accident. J'ai entendu son dernier souffle au moment où les secours sont arrivés. Je ne voyais plus mon petit frère, la voiture s'était repliée sur lui. Ce jour-là à était l'un des plus durs de ma vie. Tu sais je ne dis pas tout ça pour que tu aies pitié de moi, je ne veux plus de pitié de personne depuis le décès de mon père où ses amis qui avaient promis de veiller sur moi ont rompu leur promesse en m'envoyant en foyer. Je me suis jurée que plus personne ne me fera souffrir par la suite mais avant de rencontrer toutes ces familles. Toutes plus folles les unes que les autres.

Ce n'est plus une larme sur ma joue mais un torrent qui se déverse à présent. La douleur est bien trop forte pour pouvoir y faire face seule. Je ne veux plus me battre avec cette douleur. Je me penser forte mais une simple aide d'un inconnu et tous les murs que j'avais réussi à monter autour de moi sont détruit. La pression de la main de Lloyd sur mon épaule me réconforte un peu mais la douleur ne me quittera pas de sitôt. Il exerce une pression un peu plus forte pour que ma tête se pose sur son épaule. Je laisse mes émotions se perdre dans ce moment de souvenirs douloureux. Lorsque la police m'avait questionnée sur l'accident je me souviens qu'un officier m'avait demandé de mentir en disant que je ne me souvenais de rien. A huit ans on écoute les personnes plus âgées, c'est ce que j'avais fait mais j'ai su par la suite que ce même policier avait bloqué mon dossier pour que personne ne puisse le lire, pas même moi. Il y a tant de mystères sur cet accident. Aucun policier n'avait donné les réponses aux questions de mon père. Il est mort dans le doute que cet accident était bien un accident. Le silence de la chambre est coupé par mes reniflements et ma respiration saccadée.

- Je suis désolé pour tes parents et ton frère. Si je peux t'aider n'hésite pas. Je serai présent pour t'aider maintenant. Tu n'as plus besoin de vivre cette vie seule. Tu peux me faire confiance, je te le promets.

- Ce n'est pas contre toi Lloyd mais je ne te connais pas, je ne peux pas te faire vraiment confiance, même si je ne te le cache pas, mais le fait de parler de ma famille à une personne qui m'écoute réellement, enfin je l'espère, me fait du bien.

Un petit rictus vient dessiner ses lèvres. Il me sourit et son sourire se veut franc. Je pense qu'au fil du temps je pourrai lui faire confiance mais pour le moment c'est trop tôt. Mes larmes se calment doucement. Ma respiration se fait plus calme et mon esprit imagine ce que serait ma vie sans tout ça. Deux parents s'aimant, un frère qui devait avoir douze ans et une vie parfaite. Des études parfaites. Un sentiment de sécurité, je présenterai même peut être mon premier petit copain à mes parents et mon père se ferai un malin plaisir de lui faire peur pour voir à quel point il m'aimera. Mon regard se perd rapidement dans le vide, à la recherche de toutes réponses à cette nostalgie présente dans mon esprit. La voix de Lloyd me sort de mes pensées.

- Parle-moi de toi Marine.

- Il n'y a pas grand-chose à savoir. Que veux-tu savoir exactement ?

- Quel âge as-tu ?

- J'arrive sur mes dix-huit ans et donc je serai enfin libre et adulte face à la loi.

- Pourquoi ?

- Pourquoi quoi

- Ce sentiment de liberté. Pourquoi tu ne veux pas avoir de vie stable tout simplement.

- Je n'en n'ai jamais eu à vrai dire. Je me suis toujours dis qu'à ma majorité je quitterai cette dictature que m'impose la loi. Que je ne subirai plus l'indifférence de ces familles d'accueil qui ne me recueil uniquement dans le but de toucher quelques centaines de dollars en plus par mois.

Il ne répond rien et reste muet face à mes mots. Je n'attendais pas qu'il me réponde une tirade mais un simple oui m'aura suffi. A la place il se lève et se place devant la fenêtre, le regard perdu sur l'horizon. Je ne pense pas qu'il a posé toutes les questions qui lui trottent dans la tête. Je redoute le moment où il me demandera qui a levé la main sur moi, combien de fois et pourquoi. Je n'aurai même pas toutes les réponses, j'en suis certaine. Comment peut-on dire à quelqu'un les raisons des coups qu'on a subit s'il n'y a pas de raisons apparentes. Ses mains s'ouvrent et se ferment, signe qu'il est sur le point de poser une question mais qu'il se retient. Je ne suis pas prête de tout lui avouer. Je ne pense pas être prête à ce qu'on m'aide vraiment. Je me suis tant imaginer cette scène où enfin, quelqu'un vient à ma rencontre et m'aide à me relever, m'aide à relever la tête et à avancer face à tout ça. Même si mon cœur me dit que ce jour est arrivé je ne pense pas que ce soit le cas. Quelque chose au fond de moi m'implore de me méfier de Lloyd car il peut me faire du mal comme tous les autres.

- Pourquoi ne pas avoir fui ?

Sa question m'étonne. Je m'attendais à toute sorte de questions mais pas à celle-là en particulier. Comment lui annoncer que j'ai fui plusieurs fois, quatorze pour être exacte, mais que la justice fait de telles sortes que je ne peux pas vivre seule à chaque fois ? Que cet homme qui est intervenu pour la mort de mes parents intervient aussi lors de mes fugues et s'arrange pour que j'aie une famille d'accueil au plus vite. Comment lui dire que je me sens prisonnière ici-bas alors que ma vie est près de ma famille.

- Je l'ai fait, plusieurs fois mais la police est bien plus forte.

Un nouveau silence s'en suit. Un silence pensant cette fois. Il se trouve toujours face à la fenêtre, son regard perdu au loin. Mais je peux voir dans ses yeux qu'il se pose des questions, mais qu'il bataille aussi pour autre chose. Il sert tellement ses poings que ses jointures sont blanches. Une image qui fait naître en moi un sentiment d'insécurité. Il se retourne vers moi. Ses yeux sont tellement foncés qu'un courant d'air me passe dans le dos. Le sentiment d'insécurité laisse place à la peur lorsqu'il s'avance vers moi tel un prédateur.

- Pourquoi tu ne t'es pas protéger ? Qui à oser lever la main sur toi ? Dis-moi !

Son cri est si fort que par simple réflexe mes yeux se ferment. Je ne veux pas savoir ce qu'il va me faire. Lorsque j'entends un grand fracas, j'entrouvre les yeux et ce que je vois me terrifie. Lloyd se défoule sur le mur au-dessus de moi. Je suis pétrifiée. Ma respiration s'accélère. Ma vue se brouille. Il hurle. Ses poings qui frappent le mur au-dessus de ma tête et ses hurlements sont tout ce que j'entends. Je n'arrive plus à respirer. Mes yeux se ferment au moment où je vois deux hommes entrés dans la chambre. Je ne discerne pas bien leur visage. Tout est noir désormais. Je n'entends plus rien, mon esprit se mets en veille mais j'ai espoir que ces hommes qui sont entrés vont me sauver. Je l'espère.

Mon ange gardien  [TERMINE] SOUS CONTRAT D'EDITION CHEZ ST-HONOREOù les histoires vivent. Découvrez maintenant