Prologue

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Ma tête me fait un mal de chien quand je soulève avec difficulté mes paupières aussi lourdes que du plomb. Après plusieurs efforts, mes yeux retrouvent la vue. Je ne vois d'abord rien, puis ils s'habituent progressivement à l'obscurité ambiante. En observant du coin de l'œil tous les côtés de ma position, je constate que je me trouve dans une ruelle déserte et plutôt mal famée si j'en juge l'odeur nauséabonde qui parvient jusqu'à mes narines délicates et me provoque un haut-le-cœur. Elle vient sûrement des grandes décharges situées de part et d'autre de l'allée. Je ne reconnais pas l'endroit. Ma main droite tremble quand je la lève doucement pour tâtonner mon crâne douloureux et en identifier la cause. Quand je la retire, je m'aperçois que mes doigts sont couverts d'un liquide poisseux. Du sang. Pourtant, je n'ai trouvé aucune plaie. Ça n'a aucun sens. Mon cœur commence à s'emballer et à se glacer tandis que je me rends compte de ma situation vulnérable. Il faut que je parte d'ici, tout de suite. Avant que je ne meure de froid.

Je me redresse lentement, car le monde se balance autour de moi comme si j'étais sur un bateau. Une étude approfondie de mon jean m'apprend qu'il est déchiré, et ma cheville me fait si mal que j'ai un peu de mal à tenir sur mes deux jambes. Mais au moins, je suis debout. Je m'apprête à partir, quand le clignotement d'une lueur rouge attire mon regard sur le sol. En me penchant, je constate avec un grand soulagement qu'il s'agit de mon portable, dont l'écran est brisé mais qui fonctionne toujours puisqu'il s'allume sans difficulté. Je vais m'en servir comme d'une torche pour regarder ce qui se trouve sur mon chemin et sortir de cet endroit lugubre. Je ne me souviens plus du tout comment je suis arrivée là, et pourquoi je suis dehors à quatre heures du matin. J'ai un seul appel manqué. De mon père. Je le rappellerai plus tard.

Quand je me retourne enfin pour m'en aller, je manque de trébucher sur un obstacle un peu en retrait de ma position. Je sursaute en entrant en contact avec cette chose molle non identifiée. Je ne l'avais pas remarqué avant. Une sueur froide coule le long de mon visage lorsque je dirige le rayon de lumière vers l'objet de ma frayeur. Un hurlement strident m'échappe quand mes yeux se retrouvent finalement face à l'impensable. Je recule et me pince pour vérifier qu'il ne s'agit que d'un cauchemar. Ça ne peut pas être réel ! C'est impossible ! Mais j'ai beau me pincer, la réalité autour de moi ne change pas. Le cadavre est toujours là. Un visage livide. Du sang. Beaucoup de sang. Des yeux révulsés. J'occulte ma douleur et cours aussi vite que possible chercher de l'aide, tandis qu'un doute s'insinue dans mon esprit. À qui appartient le sang sur mes mains si ce n'est pas le mien ? Est-ce-qu'il vient du...

Une lumière aveuglante interrompt le fil de mes pensées insensées, je m'en rends compte. Je place un bras protecteur devant mes yeux, mais la lumière s'intensifie encore et je ne vois bientôt plus rien du tout. J'entends alors une série de sons dont je n'arrive pas à savoir si ce sont des cris ou des rires.


Double JeuOù les histoires vivent. Découvrez maintenant