Nous avions fait à peu près les trois quarts du vol lorsque j'ouvris les yeux. Tout s'était déroulé sans encombre. La cabine entière était encore en grande partie endormie. Je levai le volet du hublot. Le ciel orangé de l'après-midi allait bientôt faire place au crépuscule. Encore une petite heure et nous serions à Seattle. Je pourrais alors profiter de ma permission, boire, jouer et coucher, pourquoi pas ? J'en avais envie.
Le signal sonore me sortit de mes rêveries. Le capitaine prit la parole au micro. Avec une voix très cordiale, il dit : « Mesdames et Messieurs, suite à des perturbations inhérentes à notre volonté, nous allons être contraints de modifier notre trajectoire. Nous atterrirons au Portland International à l'instar du Seattle-Tacoma initialement prévu. Nous tenons à nous excuser pour ce désagrément et vous tiendrons informés des correspondances disponibles dans un instant. Merci de votre compréhension. »
Et merde. Il fallait presque trois heures pour rejoindre Seattle depuis Portland par la route, voir plus le soir avec les embouteillages. C'était bien ma veine, je pouvais oublier ma soirée de débauche et de perversité. L'annonce du capitaine avait soulevé un mouvement de mécontentement dans la cabine. On ne pouvait pas ne pas entendre cette mère de famille protester au fond de l'avion.
Le signal sonore retentit de nouveau et un signe lumineux nous indiqua d'attacher notre ceinture. L'ensemble des passagers se préparait pour l'atterrissage et nous amorcions notre descente sur Portland. Après de longues minutes, je voyais par le hublot que nous approchions de la piste. Avec le soir qui tombait, on pouvait voir les lumières qui bordaient le tarmac. L'appareil se posa sans encombre.
Mais un instant plus tard, nous entendions un vacarme assourdissant. J'en étais persuadé, l'avion venait de heurter quelque chose. L'incompréhension montait dans la cabine, alors que l'avion finissait sa course. Une fois à l'arrêt, nous les passagers nous regardions de côté, stupéfaits. Un bébé hurlait quelques rangées plus haut et une femme plutôt âgée demanda « Qu'est-ce qu'on fait maintenant ? ».
« Je vais quand même aller voir ce qui se passe.
- Je refuse de descendre de cet avion. »
Il était impossible de faire débarquer les voyageurs, les embarcadères, pour une raison obscure, n'avaient pas été mis à disposition. Le capitaine aiguillait comme il pouvait les passagers vers les toboggans qu'il avait déployés. Mais la plupart voulait absolument rester à l'abri dans l'avion en attendant les secours. En vérité, personne ne comprenait, ni n'avait d'informations sur ce qui se passait. Je pris mon sac à dos dans le compartiment à bagage, enfilai ma veste et m'engageai vers la sortie, où je rejoignis le capitaine et quelques personnes décidées à ne pas rester là.
Le spectacle sidérant sous nos yeux était à la hauteur de la violence du choc. Nous étions au beau milieu de la piste, seuls, horrifiés. Des débris de part et d'autre du tarmac. Au loin, des flammes, de la fumée jaillissaient. Puis, je devinais à plusieurs mètres de là le pushback étendu sur le côté, enfoncé, que nous venions sûrement de percuter.
« Le mieux serait de rentrer dans l'aéroport, on ne va pas quand même pas rester au milieu de la piste ?!
- Ecoutez, je ne sais pas ce qui se passe, mais il est hors de question que je reste ici plus d'une minute, dit le pilote.
- En effet, un autre avion pourrait se poser d'un moment à l'autre.
Le capitaine regardait autour de lui. Puis son attention se posa sur l'aéroport, et plus particulièrement sur un embarcadère en hauteur à quelques centaines de mètres de là.
- J'ai l'habitude de transiter par cet aéroport, je pourrais vous guider une fois à l'intérieur.
- Je vous accompagne, dit une jolie jeune femme. Lieutenant Jessie Blake, je suis de la police, afficha-t-elle en nous montrant sa plaque.
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Your shadow ends / Mort comme mort peut l'être ***12 PREMIERS CHAPITRES***
HorrorIls ont déferlé sur les grandes villes et tout décimé sur leur passage. Ils nous ont traqués et réduit à quelques colonies limitées à une seule chose : la survie. La loi du plus fort a vu s'élever des tyrans. J'ai fait des choses terribles. Et on...