Chapitre 10: Rue de traverse

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La petite voiture noire d'Elliott roulait à vive allure sur cette longue route qui paraissait interminable. La taille du véhicule, et la mauvaise qualité de ce dernier provoquaient une chaleur étouffante à l'intérieur. Adéwalé, assis à l'avant place passager, ne semblait pas dérangé le moins du monde par la température. Même s'il avait les yeux fermés, Elliott s'imagina facilement qu'en réalité, le bonhomme ne dormait pas le moins du monde. Il pensa alors qu'il s'agissait d'un curieux personnage difficile à cerner. À l'arrière, Élise se tenait allongée sur la banquette et essayait tant bien que mal de s'aérer avec un morceau de journal, visiblement laissé là depuis quelques semaines.

« C'est quand qu'on arrive ? rouspéta la jeune fille. Et puis, où on va ?

— La demoiselle aurait dû se renseigner un minimum, remarqua le vieil homme, toujours les yeux fermés. On se dirige vers la ville de Sainte-Lucienne, t'as déjà entendue parler gamine ?

— Rien que le nom c'est déjà hyper chiant.

— C'est à une heure du domaine, on y arrivera dans pas longtemps, répondit calmement Elliott »

La jeune fille ne rétorqua pas, et sortit de son sac une peluche Pikachu pour jouer avec. Adéwalé rigola à cela, même s'il n'eut pas vu ce qu'elle avait fait.

Après dix minutes de route silencieuse, un grand panneau afficha « Sainte-Lucienne 3 ». Au loin, l'on pouvait distinguer les silhouettes d'une multitude d'immeubles, si grand qu'ils pouvaient presque toucher le ciel lui-même. Cette ville avait survécu à des siècles d'histoire, ancienne place forte d'un duc de la région, aujourd'hui, il ne reste de la forteresse qu'une vieille tour dont l'accès était interdit au public, par souci de préservation du patrimoine historique.

Une fois atteinte, Elliott chemina dans les allées de la ville, et finit par stopper son véhicule dans un grand parking, non loin de sa destination. Les trois compères sortirent rapidement, Élise se jeta en dehors et s'étira un grand coup avant de pousser un grand soupir, heureuse de pouvoir s'aérer un peu, après avoir fait si longue route en compagnie de deux types étranges.

« D'après ce que Toni m'a raconté, il faut se rendre à cette vieille tour là-bas, indiqua le garçon.

— Il faut marcher en plus ? Vas-y c'est loin, moi je vous attends ici, amusez-vous bien à vos ruines, vos histoires de merdes ça m'intéresse pas, rouspéta la gamine. »

À peine eut-elle fini qu'Adéwalé se tourna vers elle et la fixa avec grande insistance. Élise dirigea alors son regard vers le sien. L'œil encore valide de l'homme vira du marron au noir pur. Son visage se crispa, ses veines ressortirent d'une manière inhabituelle. La jeune fille qui semblait apeurée devant un spectacle autant déroutant, ne put dire un mot. Elle avait l'impression de se faire scruter jusqu'à ses entrailles par ce regard. Un regard si noir, si profond, que l'on pouvait se perdre à l'intérieur. Élise crût entendre des cris de douleur, mais elle comprit que ce n'était pas qu'une simple impression lorsqu'elle aperçut des flammes dans l'œil du vieil homme. La fille ne pouvait faire le moindre mouvement, paralysée de peur, lorsque quelque chose la tira de son état.

« Élise ? Mais qu'est-ce que tu fais, tu vas pas rester là, je dois veiller sur toi, lui rappela Elliott d'une voix douce. »

Devant elle se trouvait le jeune garçon, et au loin Adéwalé qui déambulait en direction du château, allumant un gros cigare tout en sifflotant. Mais alors, avait-elle rêvé tout cela ? Le mauvais air de la voiture lui aurait-il joué des tours ? Ces questions resteraient sans réponse un long moment. Après cela, elle se décida finalement à les suivre tout en gardant un œil inquiet sur l'homme, et restant près de son jeune protecteur.

Aljo Chronicles Part I: Among USOù les histoires vivent. Découvrez maintenant