Thirteen

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Nous sommes rentrés du tribunal en silence, moi sous le choc pendant que Veronica et Nicolas appréhendaient l'arrivée de l'assistante sociale. Je n'arrivais pas à y croire. Nous avions réussi, mon père était loin de moi pendant une très longue période. Je n'allais plus jamais être maltraité, plus jamais malheureux, je pouvais envisager de vivre heureux, pourtant, il y avait quelque chose qui m'empêchait de l'être complètement. J'avais l'impression qu'une chose allait arriver et détruire le peu d'espoir qui s'immisçait dans mon cœur.

Je me suis dirigé d'un pas las jusqu'à ma chambre pour me délaisser de ce costume où j'avais l'impression qu'il m'étouffait, que ma cravate m'étranglait, la dernière fois que j'avais porté un costume, c'était pour l'enterrement de ma mère. Être habillé de cette manière me rappelle sans cesse ce que j'ai perdu et ce mauvais souvenir qui est figé dans ma mémoire. Veronica arriva dans ma chambre, des énormes cernes étaient voyante sous ses yeux, des cheveux étaient sortis de son chignon strict, du mascara a coulé suite aux larmes qui ont coulé après certains aveux que j'ai dus énoncer au tribunal.

_ Pourquoi tu ne m'as pas parlé de ce moment où tu as voulu plonger dans l'eau ?

_ Parce que je ne voulais pas que tu me regardes de cette manière.

_ De quel genre ? Me demande-t-elle en fronçant les sourcils.

_ Avec de la pitié ! Je déteste ce regard. Tu crois que j'aime me vanter sur ce jour de désespoir ? Ce jour-là, je croyais qu'il m'avait abandonné, que personne ne me retrouvera alors, j'ai pensé que mourir d'hypothermie était mieux que mourir de faim.

_ Mon chéri... Elle s'approche de moi en tendant les bras vers moi, mais je me recule.

_ Laisse-moi s'il te plaît ! Je veux être seul !

_ Te terrer dans un silence n'arrangera pas les choses Magnus. S'énerve-t-elle.

_ Je ne reste pas silencieux, mais essaye de comprendre, j'ai 10 ans et malgré toutes les horreurs qu'il m'a fait subir, savoir que mon père est en prison et quelque chose de... D'effrayant ! Mon avenir est complètement flou Veronica.

_ Vivre avec moi ce n'est pas un avenir flou !

_ Nous ne savons pas si je vais rester. La dame va arriver à n'importe quel moment.

_ Je vais me battre pour te garder Magnus ! Je vais te donner la vie que tu mérites. Nous allons être heureux !

_ " Nous allons être heureux " Elle m'avait dit la même chose avant de mourir le soir même.

_ Ce n'est pas la même chose.

_ Si. Pour moi, c'est la même chose.

Elle avait compris que peu importe ce qu'elle me dirait, mon ressenti restera le même. La dernière fois qu'on m'a assuré avec tellement de vivacité que nous allons être heureux, le lendemain, on m'a appris sa mort et ça m'a détruit au plus profond de mon âme sans que personne ne s'en rendre compte. J'ai passé des années à jouer la comédie, à prétendre que la mort de ma mère était un accident, que ce n'est pas moi qui l'ai tué, car pour moi, c'est de ma faute si elle est morte, si elle n'avait pas envisagé de partir, de le quitter, elle serait toujours vivante. Certains jours, j'ai même pensé que ma naissance lui avait signé son arrêt de mort.

Je ne suis pas sorti de ma chambre pendant des heures. Je me rappelais sans arrêt ma courte vie, j'essayais de faire revenir dans ma mémoire le visage souriant de Johanna, mais je n'y arrivais pas, je ne voyais qu'un visage faux-semblant, des bleus sur les joues, un cocard aux yeux. Ses mains tremblantes et des yeux humides à chaque fois que son regard croisait le mien. Peut-être que j'étais un fardeau pour elle, ça se trouve elle voulait m'emmener chez ma tante Cassandra pour m'abandonner, si je n'étais plus dans sa vie, peut-être que papa aurait arrêté de la frapper. Qu'elle pourrait être heureuse. Voilà à quoi résumer mes pensées. Même en prison, il a réussi à me pourrir l'esprit.

BaneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant